Blida Un lourd héritage

Le rideau est donc tombé sur des joutes qui auront mis aux prises des centaines d'Algériens, chacun voulant prendre la place laissée vacante par d'autres qui ont présidé aux destinées des plus de 1.500 communes que compte le territoire national. La longue attente est enfin terminée et chacun connaît maintenant la place qu'il occupe dans l'estime de ses concitoyens, même si certains crient au scandale et au trafic. Quelques formations politiques ont, quand même, déposé des recours auprès de la cour de Blida et attendent les décisions des juges qui seront connues dans trois jours. En attendant, les supputations des citoyens vont bon train et chacun avance un pronostic pour connaître le futur P/APC. Le suspense est de mise et les nouveaux élus le maintiennent sciemment, donnant des informations au compte-gouttes, l'air suffisant de celui qui s'est élevé au-dessus du lot. Mais comme tout a une fin, cette situation ne durera pas plus de huit jours et, déjà, les nouveaux P/APC de certaines communes ont été installés, à partir d'avant-hier mardi. Ces communes où l'installation des nouvelles équipes a débuté sont celles où il n'y a pas eu de recours, comme la commune de Bouarfa ou Guerrouaou. Pour celles où des recours ont été déposés, il faudra attendre les décisions des juges mais, quoi qu'il en soit, les assemblées seront connues et installées dans moins de dix jours. Tout cela est bien beau, mais ces nouveaux élus ou ces réélus, savent-ils ce qui les attend durant les cinq années que durera leur mandat? Peut-être bien que oui mais la négative est bien plus probable. En effet, quand on voit l'état de délabrement avancé dans lequel se trouvent la plupart des rues et ruelles, les réseaux d'évacuation des eaux usées qui laissent déborder un peu partout leur contenu nauséabond, les mille et une masures construites par des citoyens venus d'un peu partout, fuyant les hordes terroristes il y a plusieurs années et qui refusent de rejoindre leurs anciens lieux de résidence malgré le retour de la paix et de la stabilité, les milliers de demandes de logements dont le nombre ne fait qu'augmenter malgré les différents programmes déjà réalisés et distribués, les nombreux ouvrages entamés et non encore terminés, les malfaçons flagrantes dans la quasi-totalité des réalisations, les conduites d'AEP vétustes devenues un véritable foyer de MHT, les marchés mal gérés, les jeunes qui accaparent des trottoirs et perçoivent une dîme de tout automobiliste qui y gare sa voiture, les trottoirs -encore- occupés par les marchands qui y exposent tout ce qu'ils vendent et les cafetiers qui en font leurs terrasses, les écoles primaires qui sont dans un état lamentable, les occupations illicites de centaines d'hectares par une faune d'arrivistes et de profiteurs, les espaces verts des différentes cités squattés par des jeunes qui les utilisent comme parking gardé durant la nuit et d'où personne n'a pu -ou voulu- les déloger, les mendiants qui occupent toutes les rues, la saleté repoussante qu'on retrouve partout, les centres-villes qui tombent en ruine car datant de l'époque coloniale, les problèmes vécus par les sportifs au quotidien, les commerçants qui ne paient pas leurs impôts malgré les fausses déclarations et les sous-estimations, la pluie qui inonde et emporte tout sur son passage par manque d'avaloirs ou défaut de curage de ces derniers, et... beaucoup d'autres tares encore, nous ne pouvons que nous demander si tous ces nouveaux élus ont vraiment bien recensé tous les problèmes qu'il leur faudra résoudre. Se peut-il que nos concitoyens nouvellement élus aient, contrairement à leurs prédécesseurs, la volonté de tout faire pour remettre les pendules à l'heure et corriger toutes les erreurs et les errements accumulés à ce jour? L'Algérie verra-t-elle, enfin, un autre type de personnalités politiques qui tiendraient enfin parole et oeuvreraient pour le bien du Watan bien-aimé et de ses habitants? Si la réponse est positive, tant mieux pour nous, mais si elle est négative -ce qui est beaucoup plus probable- où allons-nous? L'héritage laissé est lourd à porter et il faudra beaucoup d'adresse, d'abnégation, de bonne volonté et de peur de Dieu pour qu'ils réussissent, s'ils le veulent, à réduire la fracture douloureuse entre eux et les citoyens. Alors, est-il écrit quelque part que notre si beau pays l'Algérie est condamné à subir une trahison abjecte de tous ses enfants jusqu'au jugement dernier? Ne pouvons-nous plus espérer voir des Algériens intègres être élus à la tête des APC pour le plus grand bien de tous? La réponse que nous a donnée un citoyen, rencontré au hasard, est bien plus qu'édifiante quand nous lui avons demandé ce qu'il pensait d'une équipe formée des meilleurs citoyens de la commune, aussi bien du point de vue de l'instruction que de la probité: «cela n'aurait servi à rien, car personne ne voterait pour eux».