Algérie

Affrètement des navires de moins de dix ans : Le gouvernement fait-il marche arrière ?



Exaspération, irritation, colère, désappointement... Les professionnels de la pêche n’ont plus de mots pour dire leurs sentiments face aux tergiversations du ministère de la Pêche et des Ressources halieutiques (MPRH).

Des promoteurs professionnels avérés qui, conformément à la loi, celle sur les sociétés mixtes de droit algérien et le décret 419-02 de 2002 qui encadre l’exercice de la pêche dans les eaux sous juridiction nationale, se sont investis dans la création de sociétés mixtes pour l’affrètement de bateaux étrangers sous pavillon national, sont, depuis cinq ans, dans l’attente d’un ultime décret d’application qui doit fixer le quota des marins algériens à embarquer obligatoirement sur le navire étranger. Ils ont pris toutes les dispositions en Algérie et à l’étranger et ont dû mettre la main à la poche sans aucune aide de l’Etat auquel, disent-ils, « nous avons cependant fait confiance, notamment dans les lois qui ont été promulguées après avoir été adoptées par toutes les institutions du pays ». Mais depuis peu, une rumeur persistante fait état d’un recul systématique du MPRH qui s’apprête, après l’avoir gelé cinq ans, à abroger le décret 419-02 qui autorise l’affrètement de navires de moins de dix ans et de qualité certifiée acquis en leasing par voie d’importation. Motif invoqué par les concepteurs de ce revirement qui sont les mêmes que ceux qui ont élaboré la loi : la pêche avec des bateaux affrétés comporte des risques de déprédation du stock national en l’absence de moyens de surveillance et de contrôle des activités. Pourtant, la loi en question prévoit tout un arsenal d’instruments de contrôle : système de statistiques, contingentement des prises (quotas) et des observateurs embarqués délégués du MPRH. L’argument ne convainc pas les professionnels parce que les résultats des deux dernières campagnes d’évaluation de février/mars 2003, puis de 2004, accompagnés des commentaires du MPRH, reconnaissent l’existence de nouvelles perspectives de développement, notamment pour la pêche au large, la faiblesse du niveau actuel de l’exploitation, l’état de bonne santé de nos stocks estimés à 187 000 t pour le pélagique et jugés intacts et qui pourrait favoriser la migration vers d’autres endroits de la Méditerranée. D’autre part, ajoutent les investisseurs, l’affrètement de bateaux étrangers s’avère être la solution la mieux appropriée dans un premier temps pour toutes les parties concernées. En effet, il est plus aisé dans une première phase d’exploiter rationnellement et de « contrôler » à la fois le stock avec une limitation du nombre des bateaux affrétés en attendant la mise place d’une flottille exclusivement nationale qui, par ailleurs, pourrait nous mener à terme vers une situation semblable à celle de l’Europe où la communauté subventionne le démantèlement de sa flottille devenue pléthorique en regard des quotas en baisse constante accordés pour chaque pays. D’autre part, l’affrètement de bateaux apporte avec lui un savoir que les Algériens sont encore loin de détenir pour ce genre de pêche et construits par et pour les Européens sont d’excellente facture. Ce n’est, en effet, un secret pour personne que les professionnels qui se sont lancés dans l’acquisition de navires neufs se sont rendus otages des équipages étrangers, surtout espagnols, quand ils n’ont pas à faire face aux innombrables défauts de construction, conséquence malheureuse des acrobaties et malversations infligées par incohérences entre les montages techniques et financiers balisés entre le bureau d’études et la banque par le MPRH. Pour illustrer cet aspect de la situation, on rapporte le fait connu de tous de ces navires commandés en acier et revenu en plastique de certains chantiers navals européens. C’est par ailleurs, ajoutent nos interlocuteurs, de là que viennent les plus véhémentes oppositions à l’application et au gel depuis bientôt cinq ans de la loi sur l’affrètement. Pour les professionnels qui viennent de saisir les autorités du pays, on ne peut pas s’empêcher de penser qu’il y a anguille sous roche. D’autant plus que la discrétion la plus totale entoure cette rumeur qu’on se garde de démentir sans pour cela rassurer les professionnels sur une application sans détour de loi gelée depuis cinq ans en dépit des engagements pris par le ministre, Smaïl Mimoune en personne, que ce soit en Algérie ou auprès des partenaires étrangers comme cela a été le cas lors de sa rencontre à Madrid avec le ministre espagnol de l’Agriculture, Michel Arias Cañet. Cinq années de gâchées pour une « humeur de rond de cuir » qui bloque une loi de la République et tout ce qu’elle a suscité comme effort, comme sacrifices, comme rêves et comme espoir et qui de plus n’est fondée sur aucun bilan d’application ou de sérieuses prospectives.


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