Tlemcen - Cuisine traditionnelle, patrimoine culinaire

Ramadhan à Tlemcen.. Le mois de toutes les envies



Ramadhan à Tlemcen.. Le mois de toutes les envies
A chaque année donc ses préparatifs et malgré la cherté de la vie, nul ne lésine sur les moyens pour s’approvisionner en ingrédients et autres denrées alimentaires, indispensables dans la confection des plats spécifiques à ce mois.

La modernité des temps présents et l’évolution de la société n’ont rien changé aux mœurs du mois sacré de Ramadhan. Ses rituels n’ont point perdu de sa ferveur et de sa spiritualité qui reprend naturellement ses droits dans la vie quotidienne des personnes. Ramadhan demeure au cœur des algériens un mois de piété, de solidarité et d’entraide car il revêt un caractère religieux, social et sentimental. A chaque année donc ses préparatifs, et malgré la cherté de la vie, nul ne lésine sur les moyens pour s’approvisionner en ingrédients et autres denrées alimentaires, indispensables dans la confection des plats spécifiques à ce mois. On dit dans le jargon à Tlemcen que «c’est le mois des envies par rapport aux envies de la femme durant sa période de grossesse». C’est tout un autre art culinaire qui prend le relais. Cela n’est pas spécifique à Tlemcen ou à une région.
Hrira, Frik ou Dchicha…
En Grande Kabylie, c’est la galette aux herbes médicinales et le frik épicé qui refont surface, en plus du traditionnel couscous à la semoule d’orge et les piments verts macérés dans l’huile d’olive, alors qu’à Djelfa, par exemple, la réputée «doubarad fait le bonheur des jeûneurs. Un plat incontournable et très apprécié par presque tous les gens du sud du pays à cause de ses vertus appétissantes. A l’est du pays, les tajins sucrés ainsi que la soupe de frik en plus des boureks à la viande hachée et aux œufs qui sont prédominants dans la gastronomie des constantinois et annabis. A Oran, la chorba est accompagnée par la maâkouda, un beignet de purée de pomme de terre, d’œuf et de persil, très digestive et très appréciée dans l’Oranie. Dans la capitale des zianides, il a une connotation particulière et les femmes, au cours des soirées post-ramadhan se rencontrent entre voisines dans leurs foyers respectifs pour la préparation de la précieuse pâte roulée appelée el-mkatfa, indispensable pour la soupe quotidienne, tout en gazouillant le fameux chant ancestral de «Tamtam Yatam Tam Yadjmaâ Sidi Ramdane Rah Ja wa jab Kheiro Maâ» et au-delà de ces escarbilles, ce mois sacré est accueilli dans la capitale des zianides dans une ferveur singulière et la ville connaît une intense activité.
Toutes les épiceries de la Médina, de Derb Sidi Hamed et de Derb Messoufa sont prises d’assaut par la gent féminine pour s’approvisionner en épices, dchicha, frik, semoule, beurre et herbes. Cette fièvre est vécue par l’ensemble des familles algériennes, car dictée par la tradition, la soupe aux légumes, hrira, frik ou dchicha, selon les régions, sont un plat incontournable pour rompre le jeûne. Elle doit être, donc, bien épicée et bien fournie en ingrédients très consistants tels les fèves, les pois chiches et le riz. Le mois sacré ressuscite et ravive nos rituels, nos traditions et nos valeurs culturelles ancestrales, et malgré notre diversité culturelle traditionnelle et sa richesse, il est accueilli par l’ensemble des populations avec la même dévotion.

C’est un mois qui tisse des liens solides dans la société car il est vécu dans un esprit communautaire. Jadis à Tlemcen, le mois de Ramadhan rassemblait voisins et proches autour d’une table bien garnie où tout un chacun apporte un petit plat préparé minutieusement ; mais autres temps, autres mœurs, la modernité a changé les habitudes. Les familles préfèrent rester cloîtrées chez elles à regarder les interminables feuilletons. Autrefois, on n’achetait guère le pain du boulanger. Il était confectionné par chaque mère de famille dans les fours traditionnels. Ce délicieux pain est vendu aujourd’hui dans tous les étalages ou au bord des routes nationales par des femmes ou des enfants. Il est devenu de nos jours un commerce très lucratif car ces galettes traditionnelles font baver tous les passants. L’hospitalité est de mise. On passe ses journées à faire des emplettes beaucoup plus pour assouvir ses envies que par nécessité. Toujours est-il, le mois sacré en Algérie garde encore ses traditions culinaires, ses rites et ses habitudes nocturnes malgré les mutations sociologiques qu’ont connues nos villes au fil des siècles.
Partage et hospitalité…
Le matin, les pères de famille se dirigent machinalement au marché pour s’approvisionner en produits frais, notamment les légumes et les fruitsn et avant la rupture du jeûne, on se dirige vers les pâtisseries pour acheter chamia, zlabia, qualb El-louz et d’autres sucreries qui font partie d’un rituel presque quotidien malgré leurs prix élevés. Les repas du ftour rassemblent tous les membres de la famille autour de la table. Parfois, on invite un nécessiteux, un passant, un voisin ou un collègue de travail. L’hospitalité est encore de mise dans toutes les régions du pays. A ce titre et à l’entrée de la ville de Boussaâda et dans le sud du pays, les visiteurs sont accueillis dans les familles. Il y est ouvert un restaurant gratuit pour tous les routiers et autres voyageurs. Autrefois à Tlemcen, avant la rupture du jeûne, les gens apportaient avec eux des dattes et du lait, se massaient le long des remparts de la ville et attendent les coups de canon (el-madfaâ) qui annonçaient la rupture du jeûne ; aujourd’hui, c’est la sirène. La rupture du jeûne est ainsi faite dans un esprit communautaire avant de se diriger à la mosquée pour la prière du Maghreb.
Après avoir rompu le jeûne, les cafés sont pris d’assaut pour l’éternel café expresso en attendant l’annonce de la prière des Tarawih, très suivie au cours de ce mois. Les mosquées se retrouvent parfois trop exiguës pour contenir tous les fidèles. La prière terminée, les villes connaissent une grande animation, notamment dans les cafés, jusqu’à une heure tardive de la nuit. On discute de tout. D’autres font des parties de jeu de cartes à défaut d’animation culturelle ou d’autres occupations. Généralement, les gens rentrent chez eux pour le rituel dîner fait à base de raisins secs, de pruneaux ou de marrons qu’on appelle Tajine hlou, car dans la tradition, la rupture du jeûne se fait uniquement par la soupe, des salades et des fruits, et ce n’est qu’un peu tard dans la nuit qu’on consomme le plat de résistance pour, ensuite, avant l’aube, prendre le s’hour, un plat de safa, couscous préparé avec du beurre et du sucre, servi avec du petit lait ou du lait selon les goûts et les régions.


Mais c’est incontestablement la nuit du destin qui marque le plus le mois de Ramadhan au cours de laquelle les familles ramènent des plats de couscous et des dattes à l’entrée des mosquées. Elles sortent en grand nombre pour faire les magasins afin d’acheter pour leurs enfants les éternels tenues de l’aïd. D’autres profitent de l’occasion pour procéder à la circoncision de leurs enfants, fêtée comme un événement, tout comme les petits enfants qui jeûnent pour la première fois. La dernière semaine du mois de Ramadhan connaît elle aussi une intense activité. Toutes les familles préparent les gâteaux traditionnels de l’Aïd. Ainsi, kaâk, makrout, samsa, griwech, ghribia et d’autres gâteaux faits à base de cacahuètes et d’amandes sont minutieusement préparés dans les maisons et servis le jour de l’Aïd aux invités.
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