Tlemcen - Cuisine traditionnelle, patrimoine culinaire


Les traditions culinaires de Tlemcen
« Mangez les excellentes nourritures que nous vous avons dispensés » verset du Coran

Avant d’entamer l’analyse du discours oral, nous avons jugé utile de fournir en premier lieu, quelques précisions sur ce que nous entendons par «cuisine algérienne ».

Certains plats frugaux composés d’herbes, de céréales ou de légumes frais ou secs, toujours appréciés dans nos campagnes ainsi que dans nos villes, sortent directement des marmites en terre, de nos aïeux les plus lointains. Puis ce fut au tour de la civilisation musulmane de transmettre à nos grands-mères, les secrets des cuisines de Bagdad, du Caire et de Cordoue. A l’époque moderne, les apports ottoman et méditerranéen furent non moins importants. Ces plats du terroir ainsi que ces apports extérieurs ont donné naissance à une cuisine variée, changeant d’une région à l’autre, souvent par de légères variantes mais parfois de façon radicale. Signalons aussi que la cuisine française, elle aussi si riche, n’a eu que peu d’impact sur la gastronomie algérienne, pour différentes raisons, notamment les interdictions, par la religion musulmane, de certains aliments.

A. Soupes, hors d’œuvres, plats, conserves salées, gâteaux utilisés quotidiennement

Nous avons une variété de soupes à commencer par la spécialité de la région qui est la soupe au levain (hrira). La préparation traditionnelle et comme son nom l’indique «au levain » était faite de farine additionnée de levure de bière et du jus de citron préparée quelques jours à l’avance. Actuellement, celle-ci tend à être remplacée par de la farine délayée dans de l’eau et du jus de citron faite au moment même de la préparation. Ce procédé fait gagner du temps au cuisinier qui exerce une activité extérieure. Nous avons aussi la soupe aux légumes à base de vermicelle acheté ou à base de pâtes préparées à la maison : les petits plombs ou les petites pâtes roulées à la main. Lorsque le (TLITLI) est bien sec, il se conserve plusieurs mois. Ces petites pâtes servent à la préparation de la soupe aux petits plombs aux légumes, la soupe au thym sauvage. L’orge concassée, le thym sauvage pilé, l’huile ou graisse de « khli » sont des ingrédients nécessaires pour la préparation de cette soupe. Nous remarquons que beaucoup de plats Tlemcéniens utilisent le « khli ». Avant, pour préparer la viande confie, on mettait des morceaux de viande de bœuf et de la graisse que l’on enduisait de marinade (ail pilé, carvi, poivre rouge, poivre noir, cumin, graines de coriande, sel). On laisse macérer une nuit puis on fait sécher au soleil pendant quatre à cinq jours. Ensuite, on met à cuire dans de l’eau et l’huile. Actuellement, on met directement la viande à sécher après l’avoir salée. C’est une préparation qui peut se conserver jusqu’à une année. Ces différentes soupes sont accompagnées d’hors-d'œuvre comme : les poivrons à la tomate, les fèves à la vapeur, les poivrons à l’huile d’olive pour ne citer que quelques uns. Pour ce dernier, il faut piler les poivrons dans un mortier en bois. Pour les plats, nous avons les escargots au thym sauvage, le poulet en sauce, le poulet aux olives, les petites galettes de viande hachée en sauce, les oignons gratinés ou l’appellation « bain marie » signifiant entre deux feux s’explique par le fait que pour gratiner ce plat, on utilisait un récipient en terre qu’on disposait sur un feu de braises et on recouvrait le tout d’une plaque en fer ou un couvercle sur lequel étaient également disposées les braises ; le ragout d’aubergines fortes qui est présenté avec un certain art de préférence dans un plat en terre (tadjine), la viande et les pois chiches sont disposés d’abord, ensuite les rondelles d’aubergines, puis on arrose de sauce ; les courgettes farines la purée de fèves séchées, le couscous. Avant, on préparait, on roulât le couscous en grande quantité pour le conserver durant des mois et s’en servir au besoin. Actuellement, cela ce fait de moins en moins en ce sens que la femme active ne trouve plus le temps matériel pour ce travail, aussi engage t’elle une femme, qui en général se trouve dans le besoin, pour le faire si non elle le prépare elle-même en temps voulu mais avec de la grosse semoule ce qui facilite le travail. Ce plat, en général, se prépare le vendredi accompagné de sauce de « khli » ou de légumes ou de pense farcie. C’est un plat de grandes occasions telles que : la circoncision ou le décès. Certains plats comme la « bissara », les escargots au thym sauvage, les petites galettes de viande hachée en sauce, les courgettes farcies sont de plus en plus délaissés car ils sont soit méconnus par la nouvelle génération, soit modifiés en enlevant certains ingrédients. Quand il y a la viande ou la viande hachée, on utilise l’une ou l’autre seulement compte tenu de la cherté de la vie. En parallèle, nous avons le pain maison et le pain à la semouline qui viennent en tête et gardent encore leur place dans la cuisine algérienne. Nous constatons que même la femme active les prépare pendant les week-end. La viande confite, les poivrons crus à l’huile, les poivrons rouges en conserve les poivrons confits dans le vinaigre, le concentré de tomates, les olives vertes au sel, les olives vertes cassées sont des conserves salées qu’on prépare suivant les saisons et qu’on mange avec beaucoup de plaisir. En ce qui concerne les gâteaux, on peut citer le pain perdu, le gâteau de semoule qu’on fait cuire dans le tadjine, lamouna le mantécaos à l’huile, le mantécaos aux œufs, les crêpes épaisses les carrés de pâte feuilletée frits les beignets. Plats, gâteaux, desserts, pâtes et feuilletés utilisés occasionnellement.


Ce sont donc des mets qui, de part leur composition trop coûteuse ou leur préparation nécessitant trop de temps, ne sont faits qu’à titre occasionnel. La région de Tlemcen est renommée pour ses plats préparés durant les festivités, à titre d’exemples, on peut citer les losanges d’amandes en sauce qui sont faits d’amandes moulues, de biscottes moulues ainsi que l’autres ingrédients, la viande aux pruneaux la viande aux coings, la viande aux pommes en la viande aux raisins secs. Les raisins secs au miel et à la viande est un plat obligatoire le jour du mariage. Après le café, ou invite les femmes à goûter à ce magnifique plat qui est propre à notre région. En peut citer aussi la bastela qui est faite de feuilles de diouls, de poulet et d’ingrédients. Avant, ces plats étaient présentés parsemés d’amande mondée ou grillés.


Actuellement, c’est un luxe que l’on ne goûte que dans les mariages, les fiançailles des familles aisées. La crème de riz au lait et les coings à la vapeur sont des desserts qu’on savoure à la fin des repas. Pour les gâteaux, nous avons les oreillettes, les cornes de gazelle aux amandes, les couronnes aux arômes, les petites lunes au amandes les madeleines aux amandes, les petits triangles aux amandes, le gâteau de semoule. Ce gâteau est préparé à l’occasion d’une naissance. Il semblerait que sa consommation par la femme allaitante fortifierait la montée laiteuse. En ce qui concerne les pâtes et les feuilletés, on peut citer le pain au beurre ainsi que les crêpes très minces. Ces crêpes peuvent être consommées telles quelles accompagnées de thé ou de café. Elles remplacent le pain pour certains plats. L’Aid El Adha, fête où le mouton est sacrifié, voit des plats propres à lui. Durant ces fêtes, ou prépare la tête d’agneau ou de mouton en sauce la tête de mouton à la vapeur, le foie en sauce tomate, les brochettes de foie, la cervelle à la tomate, la panse farcie.

Pour bien illustrer cette richesse culinaire Tlémcénienne, nous ne manquerons pas de parler des festivités du mariage qui ont leurs particularités de part la durée, l’abondance et la diversité des mets. En ce qui concerne la durée, il est vrai qu’actuellement le mariage se limite à trois jours alors que, du temps de nos grands-mères, il durait quatorze jours (sept jours avant le jour du mariage proprement dit et sept jours après). Ces festivités se terminent par le bain de la mariée. A la veille du mariage, on égorge le mouton le matin de bonne heure où seuls les proches parents du marié sont présents ainsi que la cuisinière qu’on a eu la précaution de prévenir à l’avance car réputée comme étant un cordon bleu, elle est très sollicitée non seulement pour les mariages mais aussi à l’occasion des fiançailles, des baptêmes, des circoncisions, des décès paissant ainsi de leur « métier » leur gagne pain en ce sens que ces femmes là, veuves ou divorcées, vivent dans des conditions déplorables ayant souvent des enfants à charge. Cependant nous remarquons qu’il y a des familles qui s’occupent elles-mêmes de la cuisine mais en général les maîtresses de maison préfèrent engager une cuisinière experte afin qu’elles puissent être disponibles pour la réception des invités et veiller au bon déroulement de la cérémonie. L’après-midi, sœurs et cousines de la mariée ramènent le trousseau qu’elles rangent délicatement dans la chambre nuptiale. Ensuite elles sont invitées à prendre le café qui est servi dans la plus belle porcelaine gardée précieusement pour les événements heureux. Juste après avoir desservi le café, les femmes commencent à servir le dîner composé de la Hrira, des hors d’œuvre et du plat sucré fait soit de raisins secs, des pruneaux ou de coings. Les traditions veulent que ce soit un plat sucré décore d’amandes qui est servi à la belle famille car selon les dires de nos grands-mères, il serait d’une bon présage pour la vie future des mariés. Un fois le dîner achevé, la belle famille quitte les lieux pour rejoindre ses propres invités. La soirée de la veille du mariage est consacrée aux amis. Pour le dîner, la Hrira est servie dans des plats profonds autour desquels se réunissent six à huit personnes. Pour ceux qui peuvent se permettre, chaque invité a droit à son propre bol. Une fois la soupe débarrassée, le plat principal qui est la sauce de viande est présenté accompagné des hors-d'œuvre (salade et poivrons). Le dîner se termine par les fruits ou la limonade. Au courant de la soirée et sur fond musical, thé et café sont servis avec deux ou trois sortes de gâteaux. Le jour du mariage proprement dit, ou égorge le deuxième mouton. Les abats sont préparés pour le déjeuner. Les marié n’y a pas droit par crainte d’une éventuelle intoxication alimentaire. L’après-midi, une fois les invités installés, et après la distribution des serviettes à papier, le café et le thé sont servis par les proches du marié et ceux, dans des tasses et des vers à thé disposés sur des plateaux. Les différents gâteaux sont également présentés gracieusement dans des plateaux et servis par des jeunes filles dans l’espoir qu’elle soient remarquées. Les gens plus aisés présentent ces gâteaux dans de jolies petites boites. L’autres beaucoup moins aisés estiment que le café nécessite une grande variété de gâteaux tant quantitative aussi préfèrent ils se limiter au plat unique qui est la sauce au miel. Ce met est présenté dans des plats de forme arrondie autour desquels se regroupent les convives. Le dîner est retardé par l’attente de l’arrivée du marié. Le repas se compose de la Hrira, des hors-d'œuvre, de la sauce de viande et des fruits ou de la limonade. Les familles aisées peuvent se permettre un troisième plat sucré. Au courant de la nuit et contrairement à ce qui se faisait au temps de nos grands-mères, les mariés rejoignent les invités et participent à la fête durant laquelle tartes et friandises font le régal des «fêtards ». Le lendemain appelé un déjeuner est préparé en honneur de la belle famille. Ce jour est celui de la Chorba et de la Sfiria. Quelques jours après, c’est le bain de la mariée. Certains membres de la mariée sont invités et le Braniya est le plat de circonstance.


Conclusion


Nous venons de découvrir la richesse et les variations de ce patrimoine culinaire, conséquences du mode de vie dû lui-même aux conditions géographiques, climatiques et aussi à certaines situations et influences historiques.

La multitude de plats, de gâteaux, de conserves, de desserts qui remontent à l’ère de nos ancêtres et qui se transmettent de génération en génération se sont perpétués dans différentes régions du pays. Cependant, nous remarquons que certains mets anciens comme la grande soupe et la Bissara sont menacés de disparition car ils ne sont connus que par quelques vieilles femmes. D’autres plats et gâteaux telle que la Sfiria ont tendance à être délaissés car leur préparation demandé beaucoup de temps et reviennent trop chers. Malgré la richesse et la diversité de notre cuisine, qui reflète notre identité culturelle, nous constatons avec beaucoup de regret qu’à part certains plats, tel le couscous, ayant conquis à une date récente les places fortes dans certaines régions du globe, les autres demeurent méconnus.



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