Le port de la
burka est une pratique archaïque, qui ne peut en France que susciter une
profonde réprobation. L'interdiction du port de la burka serait une grave atteinte
à nos droits fondamentaux. Le débat en cours dévoile surtout les aspects
misérablement politiciens des enjeux.
On ne pourra pas,
dans les colonnes de journal, suspecter l'auteur de cette chronique de la
moindre sympathie pour l'islamisme radical. Malgré une connaissance
certainement très insuffisante du Coran, il n'apparaît pas dans les paroles du
prophète que la notion de « voile féminin », présente dans l'Ancien et le
nouveau Testament, source des trois religions monothéistes, se transforme en volonté
de retrait absolu au regard qui se termine en « encagement » de nos sÅ“urs.
Plus généralement, le Chroniqueur de Paris est
issu d'une vielle tradition française, républicaine (égalité des citoyens et
citoyennes dans la société et devant la
Loi) et laïque (séparation de l'église et de l'Etat, droit
absolu des individus à pratiquer leur propre religion, dimension privée des
pratiques religieuses).
Interpénétration
des peuples : don / contre-don
Allons plus loin.
Le racisme est une théorie qui codifie une hiérarchie des races et des
cultures. Il doit être absolument combattu. La xénophobie, la haine, la peur,
l'incompréhension de l'autre, le voisin, l'étranger, le barbare, l'ennemi est
également critiquable mais c'est un phénomène anthropologique aussi vieux que
l'humanité. Toutes les grandes civilisations de l'Antiquité, de Babylone à la Grèce en passant par
l'Egypte pharaonique ont toujours considéré les peuples à leurs portes,
qu'elles venaient régulièrement piller, mettre en esclavage, ou imposer un tribut,
première forme du racket, comme des quantités négligeables. Les grands penseurs
arabo-andalous, porteurs d'une culture raffinée, considéraient les habitants
habitant au-delà des Pyrénées, dans l'ancienne Gaule donc, comme des rustres,
illettrés et balourds.
La plupart des grands progrès de l'humanité
furent produits par la confrontation des « barbares » et des « civilisés »,
chacun jouant alternativement ce rôle et l'autre. Le christianisme, petite
secte juive, a connu le succès que l'on connaît en devenant religion d'état à
Rome, les travaux des penseurs grecs ont été sauvés par les philosophes arabes.
Tous exemples pour ne rester que dans le périmètre méditerranéen.
Toute interpénétration de culture, toute
acceptation de l'autre quand il vient « chez vous » ou que vous allez « chez
lui » est le plus souvent rugueux ou à tout le moins méfiant. D'autant que
l'autre arrive le plus souvent par la force militaire, commerciale ou
culturelle…
Il arrive néanmoins que l'osmose se fasse de
façon plus douce. Curieusement, les « mélanges » culinaires se font dans
l'histoire de l'humanité de façon beaucoup plus soft. Le pain, les céréales, le
vin, la semoule, les sauces vinaigrées, les desserts sucrés, l'olive, les
fromages, tout cela a circulé autour de notre « mer commune », sans que cela
crée beaucoup de troubles et souvent malgré les interdictions des états ou des
gouvernants. Dernier avatar, le couscous algérien, introduit tardivement en
France métropolitaine dans les années 50, est consacré régulièrement comme plat
préféré des Français !
C'est une vieille leçon anthropologique de la
rencontre pacifique de tribus voisines, celle du « don /contre-don » : on donne
quelque chose à quelqu'un en acceptant en retour son cadeau. Sur le plan des
sociétés, l'interpénétration des cultures se traduit par : on prend un peu de
l'identité de l'autre, on perd un peu de la sienne et vice-versa.
Un principe : la
liberté absolue de disposer de soi-même
Mais comme
Français républicain et laïque, la polémique développée actuellement sur la
burla me choque sur le plan des droits fondamentaux, certes d'origine
occidentale et plus précisément française, pays de la « Déclaration des droits
de l'Homme et du citoyen ».
Pour le résumer un peu rapidement, chacun a le
droit de faire ce qu'il veut pourvu que cela ne nuise pas à l'autre.
A titre personnel, on peut trouver consternant
que des femmes s'enferment volontairement dans une carapace de tissu. Mais, si
elles n'y sont pas contraintes (par un mari, un frère, un père, un environnement
familial ou social..), elles exercent leur droit à une liberté fondamentale :
faire de leurs corps et de leur vie, ce qu'elles veulent. Dans le cas des
porteuse de burka en France, on constate que le phénomène est à la fois
extrêmement marginal et très militant. Sur les 1500 cas recensés, un grand
nombre est le fait de française de souche, chrétiennes, converties à un islam
intégriste et qui font de leur burka, l'étendard de leur nouvelle foi.
Consternant, certes mais c'est à ranger dans les zozoteries excessives d'un
droit inaliénable, celui de la liberté d'expression.
Il existe dans le droit romain, ancêtre du
droit français, une autre notion, beaucoup plus flou qui est celle du « trouble
à l'ordre public ». En d'autres termes, vous pouvez faire ce que vous voulez,
sur la voie publique, mais il ne faut pas que cela choque la collectivité. On
voit tout de suite que, sur le plan des droits fondamentaux, la notion de «
trouble à l'ordre public » est particulièrement subjective et renvoie aux
pouvoirs coercitifs d'une société et donc d'un Etat, pour imposer à tous son
propre système de valeurs, sa gradation des interdits assortis d'une échelle de
sanctions.
Mais une fois les lois fixées, qui détermine
dans ce qui est nouveau, original, inconnu, ce qui est tolérable ou non ?
Pourquoi constater qu'un grand quotidien français, pousse des cris d'offrais
sur le port de la burka alors qu'il a pendant des années accueilli
quotidiennement la publicité d'un club de rencontres sadomasochistes dans ces
colonnes ? Avec le recul, il apparaît que ces deux pratiques se ressemblent
étrangement et que finalement, il vaut mieux rire de tout cela.
Sauf à penser qu'il faut, comme nous disent
toutes les bonnes consciences de droite et de gauche ajoutées à certaines féministes
radicales, qu'il faut réformer à tout prix l'individu, surtout si c'est une
femme, malgré sa volonté de personne libre (même idiote)
Tambouille
politicienne
Ce débat sur la
burka, intéressant sur le plan sociologique et anthropologique, ubuesque sur le
plan du droit fondamental, a évidemment une arrière-cuisine peu ragoutante, la
tambouille politicienne.
Soyons clairs ! Sur le plan législatif et
réglementaire, de très nombreuses dispositions imposent à toute personne vivant
en France de présenter son identité dans toute démarche administrative. A la
sécu, à la mairie, à la préfecture, à l'ANPE, à l'hôpital, bref, dans toute
administration où l'on vient demander un document, une allocation, un service,
il faut montrer son visage.
Dans la rue, si
une loi stupide allait être adoptée, comme celle-ci pourrait être appliquée ?
Les forces de police et de gendarmerie seraient-elles chargées et en mesure de
faire appliquer de force cette contrainte pour un dispositif de toute façon qui
sera retoquée peut-être par le Conseil Constitutionnel français, nécessairement
par la Cour
européenne de Justice ?
Cette opération anti-burka, ajouté aux
borborygmes du débat de l'identité nationale ne pourra que convaincre la
communauté musulmane française, seconde religion du pays, qu'il y a décidemment
beaucoup de suspicion autour d'elle. Ce malaise ne manquera d'être manipulé par
quelques courants extrémistes et convaincra quelques jeunes excités de banlieue
ou intellectuels décentrés qu'ils sont effectivement en situation de guerre
avec leur propre pays, la
France.
Tout cela n'a guère de sens et trouve, hélas
!, l'essentiel de son explication dans les difficultés actuelles d'un
gouvernement confronté à une échéance électorales difficiles, celles des
élections régionales prochaines.
Plus généralement, les vieilles sociétés
européennes s'attendent à nouveau, au pire : rebond proche et prévisible de la
crise financière, explosion du chômage, vieillissement de la population,
réduction du pouvoir d'achat, concurrence des pays émergents…
Les gouvernants, incapables de répondre sur le
fond à cette énorme et inextricable crise économique, ont nécessairement la
tentation d'agiter des leurres, comme le toréador agite sa muleta devant le
taureau. La haine de l'autre, de l'étranger fait évidemment partie des
classiques. Un jour, c'est la lancement d'un grand débat sur « l'identité
nationale », un autre, c'est l'oukase porté sur la pratique rétrograde et
infiniment marginale en France de la port de la burka (histoire de convaincre
quelques militantes radicales à adopter cette mode vestimentaire) et hier,
c'est notre cher ministre de l'immigration, Eric Besson, a fait savoir, mardi 2
février, qu'il refusait la nationalité française à un homme qui, selon son
communiqué, «imposait à son épouse le port du voile intégral». Une mesure qui
«la prive de la liberté d'aller et venir à visage découvert et rejette les
principes de laïcité et d'égalité entre homme et femme».
Ce socialiste félon, transfuge rallié au
sarkozisme, a donc bloqué très médiatiquement l'accession à la nationalité
français d'un « musulman » (on ne connaît ni son nom, ni sa nationalité)
présent depuis plusieurs années car il imposait à son épouse « d'origine
française » et donc de nationalité française, le port d'une burka.
Du coup, décret ministériel ! Annonce
triomphale de M. Besson devant les télés et radios ! Mais pas d'informations
précises. Circulez ! Il n'y a rien à voir ! Ce qui est un terme opportun dans
le cas précis du port de la burka, niqab et autres fanfreluches…
Reste qu'il faudrait en savoir un peu plus.
De deux choses, l'une. Soit c'est une
opération provocatrice de milieux intégristes musulmans qui ont trouvé dans ce
débat, un bon moyen de jouer la palme du martyr dans les milieux musulmans
français. Soit, c'est une opération un peu hâtive de notre bon Besson qui vient
de constater avec dépit que seulement 22% des Français ont trouvé «
constructive » son débat sur l'identité nationale. Un plouf !
On suppose que dans les prochaines heures, des
journalistes intègres, investigateurs opiniâtres, iront interviewer le méchant
mari et la femme soumise pour connaître leur version des faits…
Lutte anticapitaliste
Barak Obama veut
sanctionner les banquiers « profiteurs ». Nicolas Sakozy, au sommet de Davos, rassemblement
en Suisse, du gratin politico-financier, fustige devant une assemblée un peu
interloquée, les erreurs funestes du capitalisme et exige un meilleur partage
des richesses entre capital et travail. On vous le dit ! Le salut est proche…
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Posté par : sofiane
Ecrit par : Pierre Morville
Source : www.lequotidien-oran.com