Algérie - Revue de Presse

Doit-on transférer le marché Tlatha ? Aujourd?hui, ce marché est au centre d?un débat relatif à son éventuelle « délocalisation ». A cause de l?anarchie et des blocages de la circulation qu?il génère, le déplacement du marché qui se tient tous les mardis au chef-lieu de la commune de Tizi Rached semble être sérieusement envisagé par les autorités locales. D?aucuns murmurent même que la décision est déjà prise mais que les responsables appréhendent la réaction de la population. Les concertations menées par l?administration de la commune avec quelques comités de village n?ont abouti, jusqu?alors, à rien de consensuel. « Nous avons suggéré que des mesures soient prises afin de mieux structurer et réglementer le marché, tout en procédant à son extension s?il le faut. Quant à son déplacement, il est clair que nous nous refusons à apporter notre caution car il s?agit d?abord d?un patrimoine historique, partie intégrante de l?identité de la région », nous confie le président du comité de Boushel, village attenant au centre-ville. Appelé souk n?Tlatha, en référence au jour de sa tenue et eu nom que donnent les natifs de Tizi Rached à leur centre-ville, le marché représente un repère ancré dans l?histoire de la région. A ce propos, les opposants à l?option du transfert de ce marché ne manquent pas d?agrémenter leur plaidoirie de faits historiques. Ainsi, certains témoignages expliquent que la fréquentation des lieux par la gent féminine, trait qui fait aujourd?hui encore une des spécificités de ce marché, serait consécutive à une décision de l?administration coloniale durant la guerre de libération, visant à empêcher la tenue du marché, considéré à juste titre comme un point de contact entre les militants nationalistes. Cependant le plan aurait été mis en échec grâce au courage des femmes qui seraient allées braver l?interdit la semaine suivante. En revanche, d?autres personnes considèrent, à l?instar des pouvoirs publics, que le marché est devenu ingérable et porteur de beaucoup de désagréments (insécurité, insalubrité, embouteillage et traficotage), d?ou l?impératif de son transfert en dehors du périmètre de la ville. « Il ne faut pas être trop pessémiste et puis le marché a perdu de sa superbe d?antan », argue, pour sa part, un jeune citoyen du chef-lieu. Il est très difficile, en fait, quels que soient les motifs, de tirer un trait sur une « manifestation » séculaire qui a traversé les âges et qui s?est statufiée tel un rite dans la réalité sociologique, propre à la population de la région. Véritable survivance du passé, le marché existait bien avant la conquête française. On y vendait quelques produits locaux : blé, orge, figues sèches, plants d?oignons et du bétail. Les principales transactions concernaient des produits « importés », notamment des céréales apportées de Tizi Ouzou, et aussi du bovin et des ânes achetés aux marchés de Sétif, Relizane et Kroubs par les maquignons de Taourirt Mokrane (Fort national) et des environs de Michelet (Aïn El Hammam). Il y avait aussi des transactions sur les b?ufs de labour mais pas sur les mulets, monopole des marchés de Tizi Ouzou et de Djemaâ (Michelet). Lieu de commerce très prisé à l?époque, le marché de Tizi Rached était tout particulièrement fréquenté par les tribus des Oussameur Oumalou, Ath Djennad, Tikobaïne, Aït Fraoucène et Ath Ghovri. Enfin, même si « avec le temps va, tout s?en va », dixit Léo Ferré, il n?en demeure pas moins que la préservation de la mémoire collective est un devoir primordial.
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