Algérie

Qu?a-t-on fait de l?université ?


L?université n?arrive pas à placer ses diplômés sur le marché du travail. » Bel euphémisme de Rachid Harraoubia qui, manifestement, ne voulait pas enfoncer davantage le clou. Car la situation est autrement plus dramatique : plus qu?une immense fabrique de chômeurs, l?enseignement supérieur ne dispense qu?un savoir approximatif et gravement décalé par rapport à celui enseigné dans les nations développées. Le secteur n?assure qu?une sorte de « gardiennage » à des centaines de milliers d?étudiants venus pour arracher un bout de papier qui leur servirait de justificatif, sacrifiant pour cela quelques belles années de jeunesse dans des conditions éprouvantes pour leur santé physique et mentale, avant la grande désillusion du marché du travail : lorsqu?un job est miraculeusement trouvé, à l?issue des études, il s?avère inaccessible de par ses exigences professionnelles, non étudiées ou très superficiellement. Il fut un temps pourtant - durant la décennie 1960 et le début des années 1970 - où l?université algérienne était un pôle de science et de culture rayonnant, y compris au plan international. C?est sur les cadres de grande valeur formés en ce temps-là que le pays a pu, quelque peu, tenir debout toutes les années écoulées. Le ras de marée intégriste en a exilé une bonne partie et le découragement a affecté lourdement ceux qui ont fini par se rendre compte que leurs efforts ne servaient à rien devant l?ampleur des dégâts. Ce qui s?est passé depuis la fin des années 1980 relève essentiellement de la politique, car les étudiants ne sont responsables de rien, des salles de cours surchargées, des faiblesses de l?encadrement et des inadaptations des programmes. Encore moins et c?est une « spécificité » algérienne, de l?« analphabétisme » régnant sur les bancs des universités scientifiques, les cours se faisant avec une langue qu?ils n?ont presque pas étudiée (le français). La descente aux enfers a commencé vers la fin de la décennie 1970, lorsque le pouvoir politique a intensifié la répression de la pensée moderne et tolérante et encouragé les visions islamo-baassistes, sur fond d?afflux massif d?étudiants, rançon de la démocratisation de l?enseignement. La désastreuse réforme du primaire et du secondaire, dont le quantitatif a pris le pas sur le qualitatif, associée à une systématisation de l?arabisation conçue davantage en termes idéologiques que pédagogiques ont accompli le reste du massacre. En bout de chaîne, l?enseignement supérieur a fait les frais de tous les ratages, règlements de comptes politico-idéologiques et visions étriquées des responsables qui se sont succédé à la tête du pays depuis un quart de siècle. Le massacre continue aujourd?hui, aucune réforme ambitieuse et stratégique ne venant tourner la page du passé et jeter les bases d?une université pour l?Algérie de demain.


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