Algérie

Omar et Mustapha Point Net



ça fait très longtemps que Mustapha et Omar ne se sont pas vus. Oh, ils n'ont pas été vraiment de grands amis comme le veulent les' critères de l'amitié, mais ils partageaient beaucoup de choses. Omar et Mustapha partageaient d'abord un métier. D'autres auraient tout de suite dit une «passion», mais Omar et Mustapha sont des gens «tranquilles», les envolées lyriques ou les termes pompeux, ce n'est pas ce que leurs proches peuvent attendre d'eux. De toute façon, ils le savent, alors ils n'ont pour eux que de la mesure.
Une tendre mesure qui sied à merveille à leur tempérament apaisé, renforcé par l'âge. Mustapha a soixante-deux ans et Omar soixante-cinq. Des cadres sup à la retraite.
L'un d'eux se demande d'ailleurs s'il n'est pas le plus jeune retraité d'Algérie, d'Afrique ou du monde. Soixante-deux ans' dont 21 de retraite, aimait-il dire pour plaisanter. Omar aussi est dans ces zones-là mais il avait quand même «réussi» à dépasser la cinquantaine quand on lui a signifié qu'il était temps d'aller se «reposer» après tant d'années de «bons et loyaux services» comme on dit dans les documents qui accompagnent'
les liquidations. Parce que Omar et Mustapha sont convaincus qu'ils ont fait les frais d'une chasse aux sorcières, sinon on ne les aurait pas renvoyés comme ça, alors qu'ils avaient encore «beaucoup à donner». Bien sûr, Omar et Mustapha ne crèvent pas la dalle. Une retraite relativement confortable, des enfants qui volent maintenant de leurs propres ailes et des besoins revus à la baisse. Ils ont aussi connu la prospérité.
Les privilèges du haut fonctionnariat. Ils avaient de bons salaires, toutes les primes possibles, des missions à l'étranger, des crédits pour construire leurs maisons et cédé l'appartement de «fonction» à l'aîné des enfants. Ils avaient eu les Honda de Sonacome et se faisaient livrer les achats du souk el fellah ou des galeries algériennes à domicile. Un monde qui s'est écroulé à leurs pieds. Un monde dont ils ne sont pas trop fiers, mais c'était le' système !
Quand quelqu'un de plus jeune prenait la liberté de le leur rappeler, ils ne niaient jamais mais se défendaient autrement : ce n'était rien à côté de ceux qui se servaient dans les caisses pour se construire un empire ! Et des exemples, Mustapha et Omar n'en manquaient pas. Ils étaient au c'ur du' système.
Aujourd'hui, ils ne connaissent plus personne dans les hautes sphères. Il reste bien deux ou trois ministres et quelques ronds-de- cuir, mais ils n'ont pas leur numéro de portable. Il y a quelques jours, ils se sont rencontrés au cimetière pour l'enterrement d'une connaissance commune. Après s'être longuement embrassés, ils se sont dit' que ce système doit changer.
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