Algérie

Le prix de la pomme de terre ne cessant de grimper



Va-t-on vers une grève des couffins ? Depuis longtemps encouragée par les pouvoirs publics, la production de la pomme de terre qui a englouti des milliards, n’arrive toujours pas à répondre aux besoins du marché au point de constituer une préoccupation nationale. En effet, les Algériens, connus pour être de grands consommateurs de pommes de terre, n’arrivent que très difficilement à s’en passer. Ceci fait que depuis quelques mois déjà, les prix de ce légume n’arrêtent pas de grimper pour battre les anciens records. Ainsi, en l’espace de seulement quelques jours, le kilogramme de pommes de terre est passé allègrement de 25 à 30 puis 40, 50 et maintenant 60 et 65 dinars. Au marché de gros de l’avenue Chakib Arslane d’Oran, les producteurs et mandataires que nous avons approchés et interrogés sur l’origine de la flambée des prix ont des vues divergentes. Pour les premiers, l’expérience a montré qu’à chaque fois que la production est abondante, le produit n’est pas payé à son juste prix et ce sont les paysans qui en font les frais. Pour conformer leurs déclarations, des producteurs se référent à l’année passée au cours de laquelle disent beaucoup de leurs camarades ont laissé des plumes alors que d’autres ont carrément abandonné le travail de la terre et changé d’activité. L’un d’eux, un producteur de la wilaya de Chlef assure avoir perdu plus de 250 millions de centimes. «Les pouvoirs publics nous ayant demandé de relever le défi, approvisionner le marché et répondre à la forte demande, j’ai investi la totalité de mes économies dans la pomme de terre. Au bout du compte, je me suis retrouvé avec des dizaines de tonnes sur les bras dont personne ne voulait. Instruit par cette malheureuse expérience, j’ai décidé, à l’instar d’autres fellahs, de ne produire que de petites quantités. De la sorte, je suis sûr de rentrer dans mes frais et ne plus m’endetter». Egalement approché, un producteur de pommes de terre de la wilaya de Mascara assure avoir, lui aussi, perdu plus de 150 millions l’année passée. «L’amère expérience m’a appris qu’il ne faut jamais vendre la peau de l’ours avant de l’avoir abattu. En effet, selon les calculs que j’avais faits, la production de pommes de terre de l’année 2006 devait m’apporter près de 320 millions de bénéfices nets. Le marché inondé, les prix ont chuté et je me suis retrouvé avec une importante quantité sur les bras. Depuis lors, j’ai décidé de ne pas m’aventurer et de ne produire que la moitié». Prié de dire s’il est vrai que des producteurs préfèrent stocker le produit dans des chambres froides au lieu de l’écouler à bas prix, cet interlocuteur a estimé que la loi de l’offre et de la demande exige cette pratique d’autant plus que les prix des semences ont eux aussi fortement augmenté et que les engagements des pouvoirs publics à soutenir la production de semences n’ont pas été respectés. Selon ce producteur, les paysans ayant finalement appris à compter, ils ont décidé de ne plus se laisser faire et de prendre leurs destinées en main. «Dorénavant, je produirais moins et suivrais l’évolution du marché avant de m’aventurer. S’il le faut, je stockerais la production et ne livrerais plus que de petites quantités. De la sorte, je suis sûr de ne pas me retrouver endetté». Egalement sollicités, des mandataires du marché de gros ont rejeté la responsabilité de la flambée des prix sur les producteurs, les intermédiaires et les producteurs de semence étrangers. Sur place, nous avons constaté qu’un producteur de Mostaganem a vendu les 30 quintaux qu’il a ramenés 45 DA le kilo. Aussitôt la transaction réglée et le fournisseur parti, c’est un autre mandataire de ce même marché qui a payé cash les 3 tonnes au prix de 47 DA le kilo. Moins de cinq minutes après, c’est un restaurateur qui se pointe et, après avoir examiné la marchandise, il en achète 4 cageots au prix de 58 dinars le kg. Un peu plus loin, des patates en provenance de Mascara étaient vendues 47 et 48 dinars le kg. Au marché de la cité des Amandiers, hier, le prix du kilogramme de pommes de terre oscillait entre 60 et 65 dinars. Une ménagère qui n’avait sur elle que 150 dinars et qui ne pouvait se permettre le luxe de se payer 2 kg de patates, s’est rabattue sur les navets et les épinards. «Comme çà, dira t-elle ironiquement, mes enfants auront l’impression de partager le repas préféré de Popeye et me laisseront tranquille». Devant cette flambée des prix et les charges que cela induit pour les foyers, quelles mesures prendront les pouvoirs publics pour protéger le pouvoir d’achat des ménages et éviter une grève des couffins?
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