Algérie

Gentilles alouettes


Un 08 mars de plus et la perpétuation d?une légende de lutte pour le droit des femmes qui n?est en fait que le reflet de la lutte des classes.Partout la célébration de cette journée continue à se transformer en récupération politique à des fins de propagande. Sans plus. Le reste n?est que rose d?un jour qui entame son cycle de dégradation, une fois placée dans un vase, les pieds dans l?eau, avant de pourrir. Le reste, c?est cette hypocrisie qui consiste à faire valoir par les hommes leur disponibilité à libérer la femme des contraintes d?une croyance en un modèle parfait et parfaitement religieux alors qu?ils sont mal préparés à y croire eux-mêmes. Mais le reste c?est aussi la pauvreté qui touche les femmes en générale et la femme dite rurale en particulier. Une autre forme de résistance à la souffrance plus concrète que celle qui fait le lit des salons algérois et des manteaux en «fourires».Les distractions d?un jour et les jeux qu?offrent les images de la femme glorifiée cachent mal les réalités amères que vivent les femmes mais aussi les hommes. Elles cachent mal l?exposition du sexe féminin aux affres de la prostitution devenue une source de revenu pour la seule survie. Entre abolition par nécessité religieuse ou réglementation par nécessité fiscale et prise en charge par l?Etat, la prostitution s?égare sur des chemins inconnus, ignorés par le tabou de voir plus clair et des réflexes sociaux fruit d?une perversion collective. Au centre de ce monde d?inconnues, se trouvent la violence et l?exploitation du corps dont bénéficient surtout les «protecteurs». Que d?encre a coulé sur le «plus vieux métier du monde», sur son apparition depuis l?antiquité, sur son évolution et les dégâts qu?il occasionne depuis l?apparition du sida.La prostitution a pris chez nous des formes qui ont varié avec la libéralisation économique sauvage et paradoxalement avec une plus grande religiosité depuis l?avènement de l?islamisme politique qui tend à apprivoiser les espaces du pouvoir. Libéralisation et islamisme ont été les deux facettes d?une même politique durant ces dernières années. Mieux, elles en ont constitué les piliers les plus aptes à propager le discours démagogique plus facilement absorbable par la population. Mais qu?ont-elles produit comme effets sur le fonctionnement social ? Des expéditions punitives à l?exemple de celle qui a vu trois femmes célibataires faire l?objet d?une quasi-lapidation en 2001 pour avoir été soupçonnées de pratiquer la «débauche» à Tébessa. Des hommes qui se sont sentis investis d?une mission divine pour purifier la société de tous ses maux renforcés dans leur action par un moi collectif qui nécessite qu?on y mette de l?ordre en toute urgence. Pour se protéger contre le péché et protéger leurs familles. Le droit ? Personne ne s?en soucie. La loi ? C?est du papier tout juste bon à dire on a fait quelque chose.Entre-temps, le divin a été interprété selon le bon vouloir des hommes, selon ce qui les arrange pour le moment. Pour le moment, la prostitution continue à grimper sur le dos de la misère. Combien sont-elles qui, faute de conditions humainement acceptables, célibataires, divorcées ou veuves ou même mariées, sont dans l?obligation de tirer profit de leurs corps ? Comment d?abord les comptabiliser faute de reconnaître leurs situations et leurs statuts, leurs aires de pratique. Les études socio-comportementales qui ont été menées sur elles sous la houlette des Nations unies ne sont motivées que par la propagation du sida.Mais ailleurs, en dehors des ateliers où l?on intellectualise même la sexualité des mouches, il y a un malaise visible à l??il nu que les hâbleurs ne voient pas. Les noctambules qui traversent les artères des grandes villes peuvent témoigner de l?alignement de jeunes filles sur les trottoirs, souvent mineures, dans l?attente d?une «clientèle» véhiculée, qui les embarque en contrepartie de quelques billets.Elles ont toutes une caractéristique commune, elles sont pauvres. Toutes pauvres. Elles ont quitté l?école par besoin de gagner leur vie. Elles sont passées par la recherche d?un travail sans qualification, de femmes de ménage, sous-payé et plein d?humiliation. Elles ont dormi dehors, souvent. Lorsque la chance leur sourit, elles peuvent «gagner» une place dans un cabaret, qui leur permet au plus de «travailler» dans le luxe. Elles entrent alors dans un mécanisme boursier. Qu?en disent les promoteurs du tourisme ? Pas grand-chose. La prostitution existe depuis Mathusalem et ce n?est pas maintenant qu?elle va disparaître, au contraire c?est bon pour le tourisme. Alors qu?en disent les prédicateurs qui se voilent la face et ne voient en cela qu?une dérive individuelle de la malédiction ? Rien de plus que ce qu?ils disent sur la femme en général, il faut l?abolir quels que soient les déséquilibres sociaux et par n?importe quels moyens y compris par la lapidation et les expéditions punitives.Les politiques quant à eux ne s?expriment pas par «pudeur». L?interdit produisant souvent son contraire, à la fermeture des «maisons closes» fortement contrôlées par la loi, la multiplication des lieux de prostitution a pris le relais profitant de la conjoncture.En attendant, le miroir aux alouettes continue d?attirer de plus en plus de femmes. Le métier se raffine et se prépare bien à la mondialisation, comme le reste d?ailleurs.
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