Algérie

Désillusion




A l?aube de l?Indépendance, Ben Bella avait crié : « Nous sommes tous des Arabes », trois fois et avec rage. Son but était de gommer la dimension berbère de la personnalité algérienne. La contradiction vient de lui être portée par Bouteflika, qui a martelé, à Tizi Ouzou : « Nous sommes tous des Amazighs. » Mais l?ex-chef chef d?Etat ne doit nullement se sentir humilié puisqu?il possède à son actif toute l?armée d?idéologues qui a sévi dans le pays durant quarante années, pervertissant son école, sa religion et sa politique. Mostefa Lacheraf (dans Des noms et des lieux) qualifie ces derniers d?« anti-nationaux religieux et quawmiyine, diviseurs du peuple, pour qui notre amazighité linguistique, aussi réelle et légitime, n?existe pas, puisqu?ils nient même l?existence évidente de cette dernière et ne reconnaissent que la nation arabe, idéologique, abstraite et conservatrice ». Bouteflika, qui appartenait à ce système d?exclusion, ne s?est plié à l?évidence historique que lorsque le sang a coulé en Kabylie et que son régime menaçait de s?écrouler. Le « Jamais tamazight ne sera légalisée », hurlé à Tizi Ouzou au début de son mandat, avait un accent ben-bellien. Ce slogan de provocation puis l?assassinat d?un jeune manifestant ont plongé toute la région dans l?engrenage de la violence-répression.Toute l?Algérie en a été meurtrie. Lasse d?un conflit sans fin dont elle fut la première victime, la population s?en est remise, depuis, à ses représentants au sein des archs pour négocier au mieux avec les autorités, espérant une issue positive à ses revendications inscrites dans la plateforme d?El Kseur, notamment l?officialisation de tamazight. Mais Bouteflika n?en a soufflé mot hier à Tizi Ouzou, alors que son chef de gouvernement a laissé entendre, il y a quelque temps, qu?une solution a été trouvée à la langue. Renoue-t-on en haut lieu avec le jeu politique interlope ? Beaucoup avaient pensé que la décision de se rendre à Tizi Ouzou, après des années d?abandon, a été prise par le président de la République dans le but de porter de bonnes nouvelles et de tourner la page. Mais ce fut la désillusion. Le chef de l?Etat voulait uniquement prouver que la Kabylie lui est « acquise », à quelques jours du référendum sur le projet de charte pour la réconciliation nationale. Il a mis à profit les importantes ressources de la propagande et les gros moyens financiers et humains de l?Etat. Mais les lendemains des fêtes gâchées ne sont jamais bons.





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