Algérie

Blida Hammam Melouane rassemble les moudjahidine



Magtaâ Lazreg, à quelque quatre kilomètres de Hammam Melouane, une nature encore sauvage malgré la piscine et le centre de sport. Le hameau, blotti entre les montagnes rocailleuses, n'a qu'une seule issue, la route sinueuse qui le relie au chef-lieu de la commune. Pourtant, la quiétude naturelle des lieux était troublée par la présence de plusieurs voitures rutilantes et de plus d'une centaine de personnes. Mais ce qui attirait l'attention, c'était l'âge moyen des présents : à part une dizaine d'entre eux, la plupart portait le poids de plus de soixante-dix années et des vicissitudes de la vie très visiblement et aussi très dignement, beaucoup d'entre eux ont des souvenirs indélébiles dans ces régions qu'ils connaissent dans le détail. Ils racontent et se racontent, avec une note de fierté, beaucoup de courage et comme une pincée d'amertume et de regret de ne plus avoir leur jeunesse et aussi de ne plus voir des amis avec qui ils ont partagé plusieurs années à travers monts et à travers vaux, tendant des embuscades, ramenant des armes, des provisions, de l'habillement qu'ils auront gagnés au prix fort. Tous ces vieux, à l'allure fière, le dos encore droit, les yeux pétillants d'intelligence, ce sont des moudjahidine que l'APC de Hammam Mélouane et la direction des Moudjahidine de la wilaya de Blida, qui se sont réunis ici, sous le haut patronage du wali pour la deuxième édition du Colloque historique de l'Atlas blidéen et de la guerre de Libération nationale, qui s'est tenu de mardi à aujourd'hui, jeudi. Durant ces trois jours, les anciens moudjahidine se sont souvenus des dures journées de la guerre de Libération nationale à laquelle ils ont participé, ayant eu pour seul but de chasser les colons de leur patrie. Cela n'a pas été facile et c'est justement pour apporter leur témoignage vivant qu'ils ont répondu à l'appel des organisateurs. D'ailleurs, les thèmes choisis pour ce colloque dénotent de la volonté de ces derniers d'aller au fond des choses, et d'informer les générations présentes des différentes phases de la guerre ainsi que de son organisation. Le premier thème a été celui de l'organisation politico-militaire durant la guerre. Mais avant d'entendre les différents intervenants qui ont raconté la guerre d'Algérie avec beaucoup d'amour, de nostalgie et de fierté, nous avons eu à connaître deux illustres combattants encore vivants, et qui ont marqué de leur empreinte la lutte armée. Il s'agit du moudjahid Ahmed Bouchaïb, l'un du groupe des 22 historiques qui ont déclenché la Révolution armée, et du moudjahid Mouloud Aoucha, un autre grand parmi les grands qui ont marqué la guerre de Libération nationale et qui ont préféré l'anonymat et la simplicité. Ces deux figures emblématiques de la lutte armée ont été honorées par les autorités locales et ont reçu, les larmes aux yeux, des cadeaux portant toutes les marques de reconnaissances. Ceux qui sont partis n'ont pas été oubliés puisque deux d'entre eux, les chahid Ahmed Sihli, dit El Misri et Ali Baba-Chaâbane dit Lieutenant, qui ont combattu dans la région et qui ont mené des actions d'éclats contre l'ennemi. Mais ce qui a fait bouillir le sang des présents et briller leurs yeux de larmes, c'st que ces deux grands hommes ne sont pas morts durant la guerre de Libération malgré les ratissages, les bombardements, les trahisons et la torture. El Misri, comme l'ont raconté ses compagnons d'armes, a été blessé à deux reprises par la soldatesque française, mais il a survécu. Son ami, Lieutenant, a réussi à sortir indemne de plusieurs bombardements de l'aviation française. Et le destin a voulu qu'ils meurent, tous les deux, plus de dix années après l'indépendance, les armes à la main, alors qu'ils tentaient de combattre une seconde fois pour que l'Algérie reste debout. Ahmed Sihli, vivait tranquillement et a continué à occuper des postes d'élu (APW d'Alger et APC de Bougara et de Hammam Melouane) jusqu'en 1992, date à laquelle il fut désigné à la tête de l'APC de Hammam Melouane en qualité de DEC. Et ceci jusqu'au 5 avril 1995, le jour de son anniversaire, quand il fut assassiné au niveau du pont de Sidi Moussa alors qu'il revenait d'une réunion à la wilaya et qu'une bombe éclata à son passage. Son fils, qui l'accompagnait ce jour-là, eut la vie sauve et c'est lui qui est aujourd'hui le P/APC de Hammam Melouane, perpétuant le dévouement de son père pour l'Algérie. Quant son alter ego, le Moudjahid Baba Chaâbane Ali, lui aussi a connu l'Algérie indépendante malgré les durs combats qu'il a menés contre le colonisateur, malgré les ratissages et les bombardements. Il intégra la vie civile et occupa plusieurs fonctions dans des entreprises nationales. Il sera secrétaire de la Kasma des moudjahdine de Hammam Melouane jusqu'au 13 avril 1994, où il sera assassiné les armes à la main lors d'un accrochage avec un groupe de 25 terroristes, alors qu'il tentait de créer un groupe de défense pour lutter encore une fois afin que vive l'Algérie. Le choix donc de la région de Magtaâ Lazreg et des noms des moudjahidine qui ont été honorés n'est pas fortuit, puisque c'est dans ces contrées immenses que se situait le coeur de la Révolution et où se trouvait le QG de la wilaya 4 historique. Ces aussi de là que l'armée de l'Emir Abdelkader était fournie en montures et en combattants. D'ailleurs, et malgré le petit nombre de ses habitants, la commune de Hammam Melouane compte 860 chahid, et la quasi-totalité de ses habitations avaient été rasées durant la guerre. C'est donc un retour vers les heures glorieuses de notre peuple, vers des moments difficiles mais exaltants que l'Algérie a vécus, c'est aussi une manière d'écrire notre histoire, de la bouche même de ceux qui l'ont faite, qui ont été vécus par les présents à ce colloque.
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