Algérie

Bachir REZZOUG n'est plus : Une semence pour le journalisme




Bachir Rezzoug nous a quittés hier à l'age de 66 ans. Un riche parcours, des ?uvres parmi les plus grandes, mais une vie trop courte.

Pantois et assommé à l'annonce de la mort d'un homme qui vous a fait. Qui a permis au levain d'une carrière professionnelle de prendre, sans le vouloir vraiment, à la faveur d'une rencontre fortuite et accidentelle, mais qui imprime irrémédiablement un destin. Je n'ai pas de gêne à reconnaître que Bachir Rezzoug m'a ouvert la grande porte d'un sublime métier qui m'a pétri au sens sans cesse accentué de l'observation des faits, de la vie et des hommes. Oui, Bachir Rezzoug était à sa façon comme un portier du destin, et nombreux sont mes confrères, devenus aujourd'hui des célébrités grâce à lui, qui lui doivent le tournant ou le virage qu'il leur a fait emprunter.

Bachir Rezzoug était plus que le plus grand des journalistes algériens, celui qui, en donnant un second souffle à la mémorable «République», a su réconcilier le journalisme avec lui-même en ayant un art inné pour faire germer, parmi ceux qu'il prenait en charge, un métier que l'on ne peut aimer qu'avec passion.

Mais Rezzoug ne se limitait pas seulement à être une semence pour la profession.

Il était bien plus. Je n'oublie pas une nuit de veille particulière de mes vingt ans. Fauché et sans le sou, il me fallait des habits d'apparat pour une grande circonstance et je m'étais confié à lui dans son bureau. Il ne m'avait pas répondu et s'était contenté de me demander de le suivre.

A son arrivée chez lui, il m'exposa toute sa garde-robe et les moindres détails de sa grande élégance et me demanda de choisir. Nous avions la même taille et je ne m'étais pas gêné avec lui car je connaissais sa majestueuse noblesse et son grand c?ur. Je m'étais rassasié. De la cravate jusqu'aux chaussures. Du Rezzoug pur et dur dans une enveloppe de magnanimité, de compétence et de fraternité avec toute son équipe. Pour peu que l'on respecte la profession comme il le voulait.

Bachir Rezzoug, c'était ça et plus que ça. Un homme rare. Si rare qu'il s'est débrouillé, on ne sait comment, à éviter les pièges de la fausse gloire qu'offraient les portefeuilles ministériels, alors qu'il était le seul patron de presse à tenir tête au grand ogre qu'était le président Boumediène et le seul à avoir l'honneur d'être reçu par lui. On devine le reste, tout le reste, avec cet article sur le FLN qu'il avait signé en 1973, qui n'est jamais paru. En son temps, avec son titre prémonitoire «le FLN tire à blanc», il aurait eu l'effet d'une bombe qui n'aurait pas attendu les événements d'Octobre 88.

Sans doute, lui et nous, jeunes premiers de la profession, avions-nous une longueur d'avance ou de retard, c'est selon, sur le cours des événements, dérangeant les ordres établis, mettant un point d'honneur à refuser les demi-mesures, jusqu'à être traités de colonne occulte aux ordres d'on ne sait qui.






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