Algérie

Alphabétisation dans la steppe : Un véritable casse-tête chinois


S?il est indéniable que la wilaya de Djelfa avec son taux d?analphabétisme de 54,04%, devenu légendaire, occupe le premier rang des régions les plus affectées par ce terrible fléau, il faut, et à juste titre, à des fins de comparaison, noter que la wilaya qui la talonne, à savoir Tissemsilt, est relativement mieux lotie, puisqu?elle n?est qu?à 45,11%. Pour une seule place, le discriminant qui est de 10 est, avouons-le, assurément considérable. Si le constat est ainsi déjà amer, qu?en était-il antérieurement à la mise en place de la stratégie nationale de lutte contre l?analphabétisme entamée en 2006 et prévue en deux phases. Pour rappel, pour l?ensemble du pays, il est question de s?attaquer au problème sur près de 50% de son ampleur en 2012, et de l?annihiler totalement en 2016. Ce qui explique le recours à des moyens colossaux, soit près de 48 milliards de dinars évalués sur 10 ans pour atteindre ou, à défaut, se rapprocher de l?objectif final en 2016. Néanmoins, l?éradication du phénomène s?avère une entreprise d?autant plus ardue, spécialement à Djelfa, étant donné qu?il faut contourner de nombreux obstacles dont cette particularité géophysique pour les populations steppiques (locales ?) d?être instables du fait d?une pratique séculaire, la transhumance. Et davantage, si l?on y ajoute une progression lente du taux de scolarisation depuis que Djelfa a été élevée au rang de wilaya. A noter que l?étude a concerné la période allant de 1975 à 2005. En 30 ans, ce taux est passé de 35% à 65%, soit un accroissement de seulement 1% par an par rapport à la population en âge d?être scolarisée ! Les raisons d?un tel triste état des lieux sont à chercher essentiellement dans le mode d?occupation du sol par les populations autochtones. En effet, 15% sont représentés par une masse d?individus nomade et 25% par une autre catégorisée comme sédentaire vivant dans des groupements d?habitation en zones éparses, loin des centres urbains ; mais qui, au fond, n?est en rien différente de la première, étant, elle aussi, fondamentalement ruralisée jusque dans sa vision du monde. Dans ce cas, il convient d?avancer que l?esprit est presque identique et la conception des choses par rapport à l?idée de s?alphabétiser est, par conséquent, unique pour l?une et l?autre. Autrement dit, l?alphabétisation n?est pas forcément la bienvenue. Pour tirer un enseignement à propos de cette difficulté géographique, tenons-nous à un parcours effectué en 1978 afin de mesurer le degré de concentration des habitants sur une seule ligne longue de 45 km (Charef-El Idrissia). Cette étude a permis de dénombrer 65 groupements d?habitation épars. Aujourd?hui, nous a confié le responsable de l?annexe de Djelfa dépendant de l?Office national d?alphabétisation et d?enseignement des personnes âgées, M. A. Hassani (A.H.), « cette proportion s?est amoindrie à cause ou grâce à l?exode rural dicté par l?impératif sécuritaire. » Mais cela contrarierait d?autre part l?autre politique rurale nationale qui prône la fixation des populations de ces zones dans leur milieu de prédilection. Selon une extrapolation qu?il a faite dans une étude qui se propose de recenser et de favoriser à Djelfa les conditions d?exécution de la stratégie nationale d?alphabétisation, A.H. désespère guère quant à la réussite de l?opération même s?il sait qu?il va être confronté à la résolution d?une équation ardue, comme contenir ces 71,78% d?analphabètes habitant dans la nature. Les principes généraux énoncés dans cette stratégie nationale sont nombreux :  Etendre la lutte contre l?analphabétisme à tout le secteur étatique, autant qu?à la société civile ;  l?activité d?alphabétisation doit cibler l?analphabète sans exception ; mais en accordant la priorité aux âges compris entre 15 et 49 ans, spécialement la gent féminine en zone rurale, les handicapés et détenus en milieu carcéral. Une attention particulière sera cependant accordée aux 10 wilayas qui en sont le plus touchées : Djelfa 54,04%, Tissemsilt 45,11%, Tamanrasset 43,72%, Aïn Defla 43,08%, Relizane 42,29, Médéa 42,13%, Khenchela 41,88%, Chlef 41,79%, Tiaret 40,45% et Illizi 40,29%, toutes loin de la moyenne nationale qui est de 31,66% et avec une prépondérance pour les filles. Pour cela et s?agissant de Djelfa, on n?a pas lésiné sur les moyens en faisant appel à 660 licenciés, 304 TS, 184 bacheliers et 487 du palier secondaire en vue de prendre en charge 23 739/apprenants an au sein de 1582 salles pédagogiques, en sus des mosquées et autres structures s?y prêtant. Cet ancien responsable dans l?éducation, qui a connu maintes situations inextricables qu?il a résolues, saura-t-il, cette fois, gagner le pari du siècle ? Entre-temps, rien n?empêche ces gens de la steppe de continuer intempestivement de nomadiser au gré des précipitations.


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