Algérie

Planète (Climat) - La surprise des scientifiques: Cas de l'Europe


Planète (Climat) -  La surprise des scientifiques: Cas de l'Europe


Inondations, chaleurs, incendies… De nombreux records climatiques ont été battus en 2023 en Europe, selon un bilan de Copernicus et de l’Organisation météorologique mondiale.

L’inventaire, dévoilé par le climatologue Carlo Buontempo, est glaçant: «En 2023, l’Europe a affronté le plus grand incendie de forêt jamais enregistré, l’une des années les plus humides, des canicules marines extrêmes et des inondations dévastatrices généralisées.» Le 22 avril, une grande photographie de l’état du climat en Europe a été publiée par l’Organisation météorologique mondiale (OMM) et l’observatoire Copernicus, respectivement rattachés aux Nations unies et à l’Union européenne.

Analysant différents indicateurs clés, tels que la température de surface ou la fonte des glaciers, ce rapport établit les tendances climatiques de l’Ancien continent au cours de l’année écoulée. Et autant dire que certains phénomènes «ont pris par surprise la communauté scientifique, en raison de leur intensité, de leur étendue et de leur rapidité d’apparition», ajoute le directeur du service dévolu au changement climatique de Copernicus.

Au-delà des incidences sur les écosystèmes, ces épisodes ont aussi mis à rude épreuve la santé publique. «Des centaines de milliers de personnes ont été touchées en 2023», assure Carlo Buontempo. D’après les estimations préliminaires, 63 Européens auraient perdu la vie dans des tempêtes, 44 dans des inondations et 44 autres dans les feux de forêt. Celles concernant les victimes des chaleurs extrêmes, bien plus nombreuses, ne sont pas encore disponibles.

Côté portefeuille, les pertes économiques engendrées par ces conditions météorologiques et climatiques ont été chiffrées à plus de 13,4 milliards d’euros en 2023. Plus de 80 % d’entre elles sont imputables aux seules inondations. «La crise climatique est le plus grand défi de notre génération, déclare Celeste Saulo, secrétaire général de l’OMM. Le coût de l’action climatique peut sembler élevé, mais celui de l’inaction l’est beaucoup plus.»

- Des températures extrêmes

Début janvier, non sans effarement, les scientifiques qualifiaient 2023 comme l’année la plus chaude jamais enregistrée sur Terre. Et l’Europe n’a pas été épargnée. Avec 2,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle, 2023 se hisse sur la deuxième marche du triste podium des records européens. Onze mois sur douze, le mercure a dépassé les normales. Le mois de septembre a par ailleurs été le plus chaud de l’histoire des enregistrements.

Malheureusement, il ne s’agit pas là de records sporadiques. Les trois années les plus chaudes qu’ait vécu le Vieux continent se sont toutes produites depuis l’an 2020, qui trône à ce jour en haut de la pyramide. Plus que n’importe quel autre continent, l’Europe se réchauffe à vitesse grand V. Sa courbe de températures grimpe près de deux fois plus vite que la moyenne planétaire.

. Climat: 2023, une année rouge pour l'Europe. © Emmanuel Clévenot / Reporterre (A voir photo sur site ci-dessous)

Résultat: la santé en pâtit. En 2023, un nombre record de jours de «stress thermique extrême» a été observé. Autrement dit, la température ressentie s’élevait à plus de 46 °C. Combinés à d’autres facteurs tels que l’humidité ou le vent, ces conditions dérèglent le bon fonctionnement du corps humain : «Une exposition prolongée au stress thermique peut exacerber les problèmes de santé existants et augmenter le risque de maladies liées à la chaleur», note le rapport.

Une tendance claire d’exposition croissante à ce phénomène se dessine. Les auteurs estiment qu’en Europe le nombre de décès entraînés par les fortes températures a augmenté de 30 % en l’espace de deux décennies. D’après les données recueillies, le public, les personnes vulnérables et certains prestataires de soins de santé perçoivent pourtant encore la chaleur «comme un risque faible». Aux yeux de Chris Hewitt, directeur de l’OMM, les mentalités doivent évoluer sur ce point: «Chaque année, entre 2002 et 2010, près de 500.000 décès dus à la chaleur ont été enregistrés sur Terre», insiste-t-il.

Les thermomètres marins, eux aussi, ont dû s’affoler en 2023. Sur l’ensemble de l’année, les eaux européennes ont affiché une température moyenne absolument inédite. Une canicule marine «extrême», voire «plus qu’extrême», a frappé l’océan Atlantique nord-est. «Le 21 juin, celle-ci a culminé avec des anomalies dépassant de loin tout ce que l’on a pu observer dans les annales», assure la chercheuse de Copernicus, Rebecca Emerton. Autour de l’Irlande et du Royaume-Uni, le mercure a parfois dépassé de 5 °C les normales saisonnières. En juillet et août, un constat semblable touchait cette fois la mer Méditerranée.

- Des inondations historiques

2023 a bien failli grimper sur un podium supplémentaire. Avec des précipitations supérieures de 7 % aux normales, l’Europe a connu la quatrième année la plus humide enregistrée à ce jour. En décembre, le record mensuel de débit des cours d’eau a d’ailleurs été battu. Alors, sans surprise, des inondations historiques s’en sont suivies. Selon les estimations préliminaires, 1,6 million d’habitants ont été touchés par celles-ci. À titre de comparaison, 550.000 personnes ont été victimes des tempêtes et 36.000 autres des incendies.

La tempête Minerva a été la première à frapper, au mois de mai, en Italie. Vingt-trois rivières ont quitté leur lit pour submerger quelque 540 km2 de terres. «Près de 36.000 personnes ont alors été déplacées, et 15 ont perdu la vie», précise Rebecca Emerton. Au mois d’août, la Slovénie a affronté à son tour les eaux boueuses dans ce qui restera comme la catastrophe la plus coûteuse de l’histoire du pays.

«En un seul jour, l’équivalent d’une année de précipitations est tombé du ciel»

Quelques jours plus tard, la tempête Hans a perturbé la Scandinavie, puis début septembre, la tempête Daniel s’est abattue sur la Grèce, la Bulgarie et la Turquie. «Dans certains endroits, en un seul jour, l’équivalent d’une année de précipitations est tombé du ciel», poursuit la scientifique. Au moins 17 personnes sont mortes en Grèce, 8 en Turquie et 4 en Bulgarie. Une fois la Méditerranée traversée, la tempête Daniel a frappé la Libye, où au moins 4.700 victimes et 8.000 personnes portées disparues ont été dénombrées fin décembre. En France, les tempêtes Ciarán et Domingos ont aussi provoqué des crues exceptionnelles en série, à compter du mois de novembre.

- Entre feu et glace

Des trombes d’eau, mais peu de flocons. Toujours en 2023, le nombre de jours enneigés a été inférieur aux normales européennes. Associé aux fortes chaleurs, ce phénomène a accéléré la fonte des glaciers sur l’ensemble du continent. Depuis 1976, celle-ci s’élève à 850 km3 perdus. Et les Alpes n’y échappent pas: en deux ans, 10 % du volume restant des glaciers y ont disparu. Pareille tendance s’observe à l’échelle planétaire, déplore Rebecca Emerton: «Une perte annuelle de glace record a été enregistrée, avec 600 gigatonnes, soit 600 milliards de tonnes d’eau. C’est l’équivalent de presque cinq fois la quantité de glace contenue dans tous les glaciers d’Europe centrale.»

Aux quatre coins de l’Europe, des forêts ont enfin été en proie aux flammes en 2023. Les superficies de Londres, Berlin et Paris cumulées sont parties en flammes. Et l’incendie le plus dévastateur jamais enregistré dans l’Union européenne a frappé la Grèce dès le début de l’été. Plus de 950 km2 ont été brûlés, soit deux fois la taille d’Athènes, la capitale du pays. Vingt-huit personnes y ont perdu la vie.

«Malheureusement, l’ensemble de ces chiffres ne diminueront pas dans un avenir proche, conclut Carlo Buontempo. Les modèles indiquent au contraire une augmentation de leur fréquence et de leur intensité.» Le climatologue promet toutefois que cette quantité inédite de données sur le climat européen permettra d’analyser notre actuelle vulnérabilité et d’éclairer notre action future.






Photo: Une inondation à Saintes, en Charente-Maritime, le 17 décembre 2023. - © AFP / Thibaud Moritz

Pour voir la photo sur: Climat: 2023, une année rouge pour l'Europe: https://reporterre.net/13-4-milliards-d-euros-voici-le-cout-chaos-climatique-en-Europe-en-2023

Par Emmanuel Clévenot



Nous avons eu tort.

Quand nous avons créé Reporterre en 2013, nous pensions que la question écologique manquait de couverture médiatique.

Nous nous disions qu’il suffirait que la population et les décideurs politiques soient informés, que les journaux et télévisions s’emparent du sujet, pour que les choses bougent.

Nous savons aujourd’hui que nous avions tort.

En France et dans le monde, l’écrasante majorité des médias est désormais aux mains des ultra-riches.

Les rapports du GIEC sont commentés entre deux publicités pour des SUV.

Des climatosceptiques sont au pouvoir dans de nombreuses démocraties.

Nous savons aujourd’hui que l’urgence écologique n’a pas besoin de presse : elle a besoin d’une presse indépendante de toute pression économique.

Chez Reporterre, nous faisons le choix depuis 11 ans d’un journalisme en accès libre et sans publicité.

Notre structure à but non lucratif, sans actionnaire ni propriétaire milliardaire, nous permet d’enquêter librement. Personne ne modifie ce que nous publions.

Mais ce travail a un coût.

Celui des salaires de nos 26 journalistes et salariés.

Celui des reportages menés sur le terrain, au plus près des luttes.

Celui des centaines de milliers de lettres d’info envoyées chaque semaine pour vous informer.

En 2023, 39.257 donateurs ont soutenu Reporterre : ces dons représentent 98% de nos revenus.

Du plus modeste au plus important, ils sont les garants d’un travail journalistique sérieux et indépendant, capable de faire avancer la cause écologique.

Quels que soient vos moyens, nous travaillons pour vous.

Ensemble, nous pouvons agir.

Si vous le pouvez, choisissez un soutien mensuel, à partir de seulement 1 €. Cela prend moins de deux minutes, et vous aurez chaque mois un impact fort en faveur d’un journalisme indépendant dédié à l’écologie. Merci.

Soutenir Reporterre


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)