Oran - Revue de Presse

La loi américaine de la jungle


Pourquoi Sami Al-Hadj, caméraman soudanaisd'Al-Jazeera, a-t-il été détenu six longues annéesdans le goulag de Guantanamo ? Poser la question n'a guère de sens, tant ceserait accréditer l'idée qu'il serait peut-être suspect. Or, il n'en est rien. SamiAl-Hadj a été enfermé dans ce camp hors-les-lois pour une seule raison: les Américains l'ontdécidé. C'est tout. Le reste, tout le reste, n'est que mensonges etfabrications. Propagande et désinformation. A l'instar des fantasmatiques armesde destruction massive que Saddam Hussein pouvait déployer en cinquante minutes(dixit Tony Blair), comme l'aberrant état permanent de légitime défense descriminels de la société de mercenaires Blackwater - souscontrat avec le gouvernement américain - qui tuent pour le plaisir et nerelèvent d'aucune loi.Les Etats-Unis sont bien une démocratie: à l'intérieur deleurs frontières, l'Etat de droit est consacré. Hors leurs murs, seule existela loi de la jungle. Guantanamo est un Goulag tropical né de la démence bushienne nourrie de l'idéologie guerrière des néoconservateurs. Sami Al-Hadjcomme la plupart des pensionnaires forcés de Bush est un innocent, une desnombreuses victimes collatérales de la paranoïa impériale et de l'hégémonisme. C'étaitun jeune homme au moment de son arrestation, c'est aujourd'hui presque unvieillard des suites de l'entreprise de destruction systématique accomplie, aunom d'une Civilisation défigurée et au mépris des valeurs premières de la démocratie.A Washington, le commandant JeffreyGordon, un porte-parole du Pentagone, s'exprimant parfaitement dans lanovlangue de George Orwell, a «justifié» l'incarcération du caméraman: «Il aété désigné comme un combattant ennemi par le département de la Défense». Voilàl'explication lapidaire expliquant une aussi longue incarcération dans lesconditions indignes que l'on sait. «Combattant ennemi». Dans l'esprit obscurdes néoconservateurs américains, tous les musulmanssont des «combattants ennemis» potentiels, il suffit au Pentagone, à la CIA de dresser des listes pourque des malheureux accèdent irrémédiablement à ce statut. Dans le cas de Sami Al-Hadj s'est ajoutée la volontéhargneuse de construire un «dossier» à la chaîne Al-Jazeera.La démocratie, la presse libre, l'Etat de droit, tout ce qui faisait lagrandeur des Etats-Unis a été balayé au nom d'unevision tragiquement absurde de la politique.S'il faut saluer la libération de Sami Al-Hadjet de ses compagnons d'infortune, il ne faut pas oublier que ce camp continued'accueillir des individus, hors des règles élémentaires du droit et hors desconventions internationales. Il faut rendre gré aussi au gouvernement soudanaisde ne pas jouer la pitoyable comédie américaine qui consiste à faire croire queles citoyens rendus à leurs pays sont néanmoins des coupables qu'il fautpoursuivre et surveiller. Car c'est cela la gestion honteuse de Guantanamo parun Etat qui a kidnappé des individus, les a soumis à des interrogatoiresmusclés, à des privations de sommeil et à l'humiliation.Faute de preuves ou d'aveux, les détenus sont renvoyés dansleurs pays qui doivent, en quelque sorte, justifier la détention en lesincarcérant ou en les plaçant sous surveillance. Des méthodes dignes des plussombres totalitarismes... Faut-il s'étonner alors que les Etats-Unis suscitentautant d'aversion - pas seulement dans l'arc arabo-musulman- et ne représentent plus aux yeux du plus grand nombre le pays des libertés etdu droit mais celui de la violence et de l'arbitraire ?
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