Ayant travaillé quelque trois décades sur la responsabilité sociétale des entreprises, je trouve utile de résumer les 39 pages du rapport de Francesca Albanese, Rapporteuse spéciale des Nations unies sur les territoires palestiniens, nommée le 1er mai 2022 pour un mandat de trois ans, puis confirmée jusqu'en 2028. Son rapport a été présenté en juillet 2025 à l'ONU, au Conseil des droits de l'homme sous le titre : De l'économie de l'occupation à l'économie du génocide, dressant sans complaisance la situation des droits de l'homme en Palestine occupée et démontrant comment des entreprises importantes jouent un rôle crucial de soutien au projet colonial sioniste… et en profitent.
Cadre juridique
Son rapport s'appuie sur les Principes directeurs de l'ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme. Il établit que les entreprises doivent mener une diligence raisonnable en matière de droits de l'homme. Si elles causent des violations, elles doivent cesser toute activité, si elles contribuent aux crimes, elles doivent indemniser les victimes. Leur responsabilité pénale peut être engagée. Les avis de la Cour internationale de justice confirment que toute connivence avec l'occupation sioniste est liée à des crimes internationaux.
Secteurs essentiels à l'économie sioniste criminelle
Le rapport identifie huit secteurs économiques essentiels à l'économie sioniste criminelle et les entreprises qui y participent :
1) Armement (ex. : Elbit Systems, partenariat F-35) ;
2) Surveillance et incarcération (ex. : NSO Group, Microsoft, Google, Amazon) ;
3) Machinerie lourde (ex. : Caterpillar, Volvo) utilisée pour les démolitions, notamment en Cisjordanie ;
4) Construction de colonies et d'infrastructures (ex. : Heidelberg Materials AG) ;
5) Ressources naturelles (eau, électricité, gaz) contrôlées par Israël (ex. : Mekorot, Chevron) ;
6) Commerce (agro-business, vente au détail, tourisme) profitant aux colons (ex. : Airbnb, Booking.com) ;
7) Finance (ex. : banques souscrivant aux obligations d'État, investisseurs comme BlackRock, assurances comme Allianz) ;
8) Produits ‘savants' (universités et instituts de recherche collaborant au développement militaire et à légitimer l'occupation).
Mécanismes utilisés/documentés
1) Déplacement : Les entreprises fournissent armes, technologie de surveillance et machinerie pour détruire les infrastructures palestiniennes afin de déplacer la population ;
2) Remplacement : Les entreprises construisent/entretiennent les colonies, exploitent les ressources naturelles palestiniennes et commercialisent les produits des colons, effaçant ainsi les Palestiniens ;
3) Facilitation : Le secteur financier investit et assure les activités illégales. Le secteur académique et de la recherche fournit une légitimité et développe les technologies utilisées.
Le rapport conclut que l'économie de l'entité s'est transformée en « économie du génocide ». C'est une « entreprise criminelle conjointe » rentable pour un large réseau d'entreprises structurellement dépendantes. Le génocide se poursuit, car il est rentable !
Recommandations principales
1) Aux États : Imposer des sanctions, l'embargo militaire complet et la suspension des relations commerciales et d'investissement.
2) Aux Entreprises : Cesser immédiatement toute activité contribuant aux violations et verser des réparations au peuple palestinien.
3) À la Cour pénale internationale et aux juridictions nationales : Poursuivre les entreprises et leurs dirigeants pour complicité de crimes internationaux.
4) Aux Nations Unies : Se conformer à l'avis de la CIJ et élargir la base de données des entreprises complices.
5) Appel général : renforcer les pressions pour appliquer les mesures de boycott, désinvestissement et sanctions (BDS) et garantir l'obligation des entreprises de rendre des comptes.
Rappelons pour notre part que les Palestiniens sont l'un des peuples les plus démunis au monde. Et que depuis le 7 octobre, Gaza a été ciblée par 85 000 tonnes de bombes, six fois la bombe de Hiroshima. La Cisjordanie subit le raz-de-marée de colons armés avec le soutien du gouvernement. Ils sont devenus avec leur pays, la Palestine, l'épicentre d'une prise de conscience morale mondiale à cause des crimes de l'entité sioniste et de la complicité de certains États et de multinationales.
Francesca Albanese a écrit : « Au cours des 21 derniers mois, alors que le génocide israélien a détruit la vie et les paysages des Palestiniens, la Bourse de Tel-Aviv a grimpé de 213%, avec 225,7 milliards de dollars de gains boursiers, dont 67,8 milliards ce dernier mois. Pour certains, le génocide est rentable (des entreprises ont participé à développer en Palestine occupée) une « économie construite pour dominer, déposséder et effacer les Palestiniens de leur terre ».
Si Francesca Albanese a appelé à renforcer les pressions pour appliquer les mesures de BDS et garantir l'obligation des entreprises de rendre des comptes, ajoutons qu'il appartient aux militants de droits humains de soutenir les plaintes de Palestiniens contre les multinationales complices pour réclamer des dédommagements à la mesure des gains tirés du territoire et du génocide permanent.
A ce titre, le principe de compétence universelle permet de saisir tout juge national où l'entreprise incriminée est présente. En France, par exemple, l'article 121-2 al. 1 du Code pénal fonde la responsabilité des entreprises ou celle de filiales dotées de personnalité morale présentes au pays.
La responsabilité des multinationales complices en Palestine peut être engagée partout dans le monde, pour violation de droits fondamentaux protégés par des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme ; et par d'autres textes des Nations Unies.
Quant à Hamas, acronyme de Mouvement de résistance islamique en arabe, auteur de l'acte de résistance du 7 octobre, c'est un parti politique fondé en 1987, vainqueur aux dernières élections palestiniennes (2006). Il s'est insurgé par sa branche (Brigade Izz-Eddin Al-Qassam) contre l'occupant. Hamas est représenté par ses diplomates dans les pourparlers au Caire et non par ceux de l'Autorité palestinienne embourbée depuis la farce de Camp David et d'Oslo. Les manifestations successives des Palestiniens des décades durant, à l'aide de pierres, n'ont occasionné que plus de victimes palestiniennes. Le combat de l'État palestinien, lequel est reconnu par une grande majorité des États du monde et le sera davantage en septembre prochain, est légitime sur la base du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.
Le gouvernement Taliban d'Afghanistan n'était pas reconnu ; il l'a été en août 2021. Les États-Unis ont traité avec lui ; la Russie l'a reconnu et le drapeau de l'Émirat islamique a été hissé à son ambassade à Moscou. Ce 20 août, les talibans se sont réunis avec la Chine et le Pakistan...
*Juriste
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Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Ibrahim Taouti*
Source : www.lequotidien-oran.com