Le Fort Turc de Biskra, situé dans la ville algérienne surnommée la « porte du désert », est une structure historique qui témoigne de l’époque ottomane dans la région des Zibans. Construit au XVIe siècle sous l’occupation turque, ce fort avait pour vocation de consolider le contrôle ottoman sur Biskra et ses environs, une zone stratégique reliant le nord de l’Algérie au Sahara. Érigé sur une butte au cœur de la palmeraie, dans ce qui était alors le noyau originel de la ville, il symbolisait la puissance militaire et administrative des Turcs dans cette oasis prospère.
Contexte Historique
L’arrivée des Ottomans à Biskra s’inscrit dans une série d’expéditions menées au XVIe siècle, notamment celles de Hassan Agha en 1542 et de Salah Raïs en 1552. Ces campagnes visaient à soumettre les Zibans et à y établir une garnison permanente. Le fort fut ainsi construit dans le premier noyau urbain, à l’intérieur de la palmeraie, au sud de la ville actuelle. Ce premier Biskra ottoman était protégé par trois portes principales : Bab El Dharb, Bab El Feth et Bab El Mekbra, qui marquaient les limites de la forteresse et de ses environs immédiats. Pendant cette période, deux grandes familles locales, les Benganah et les Bouakkaz, dominaient la ville et se disputaient le pouvoir sous l’égide ottomane.
Vers 1740, une épidémie de peste ravagea Biskra, décimant une grande partie de sa population et entraînant l’abandon progressif de ce site initial. Les habitants se dispersèrent alors dans la palmeraie, formant de nouveaux ksour (villages fortifiés), tandis que le fort turc, isolé sur sa butte, perdit de son importance vitale. Un second fort turc, situé sur les collines au nord (près des châteaux d’eau actuels), complétait le dispositif défensif, offrant une vue panoramique sur la ville et ses alentours.
Architecture et Rôle
Bien que les détails architecturaux précis du Fort Turc soient peu documentés aujourd’hui, il est probable qu’il suivait les principes des fortifications ottomanes de l’époque : une structure robuste en pierre ou en matériaux locaux, avec des murailles épaisses et une disposition permettant de surveiller les accès à la palmeraie. À son apogée, il abritait une garnison militaire et servait de point de contrôle pour les routes commerciales reliant le Tell au Sahara. Sa position élevée en faisait également un poste d’observation idéal.
Évolution et État Actuel
Avec l’arrivée des Français en 1844, sous le commandement du duc d’Aumale, le Fort Turc perdit son rôle stratégique. Les Français s’établirent plus au nord, construisant le Fort Saint-Germain (1849-1851) sur les ruines d’une ancienne casbah turque, qui devint le noyau de la Biskra coloniale. Le vieux Fort Turc, situé à environ 2 km au sud de la ville moderne, en lisière de la palmeraie sur la route de Touggourt, tomba en désuétude. Aujourd’hui, il ne subsiste que des ruines, témoins silencieux de son passé. Ces vestiges, bien que dégradés par le temps et l’urbanisation, offrent encore une vue imprenable sur la vieille ville et la palmeraie, attirant les visiteurs curieux d’histoire.
Signification Culturelle
Le Fort Turc reste un symbole de l’héritage ottoman à Biskra, une ville marquée par les influences numides, romaines, arabes et coloniales. Sa silhouette délabrée, perchée au-dessus de l’oasis, rappelle les siècles de luttes et d’échanges qui ont façonné la région. Bien que moins connu que le Fort Saint-Germain ou le jardin Landon, il figure parmi les sites proposés pour un classement patrimonial par les autorités locales, soulignant son importance dans la mémoire collective.
En somme, le Fort Turc de Biskra, bien que réduit à l’état de ruines, incarne une page essentielle de l’histoire de cette ville-oasis, un lieu où l’écho des caravanes et des garnisons ottomanes résonne encore dans le vent du désert.
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Posté par : patrimoinealgerie