Bejaia - Revue de Presse

Le documentaire L'Autre 8 mai 1945 en projection à Béjaïa


Le film documentaire de la jeune réalisatrice, Yasmina Adi, n'apprend peut-être pas grand-chose aux Algériens sur les événements du 8 Mai 1945 ' là n'est pas son objectif de toute façon. Mais il est sans nul doute un moyen efficace pour faire découvrir l'atrocité de la répression coloniale au regard du monde. C'est en tout cas l'ambition de la réalisatrice qui tire déjà satisfaction des échos venus des premières projections au Maroc, en Tunisie, en France' Des pays pourtant proches, mais où, révèle Yasmina Adi, on ignore tout de cette date qui fut une démonstration monstrueuse de ce dont était capable l'idéologie coloniale. L'Autre 8 mai 1945, aux origines de la guerre d'Algérie s'adresse donc en premier lieu à tous ceux qui, dans le monde, retiennent le 8 Mai 1945 comme la date euphorique de la célébration de la victoire des Alliés sur les nazis ; il peut donc donner l'air, pour le public algérien, de reprendre une thématique et des itinéraires de témoignages déjà largement épuisés par les documentaristes algériens. Mais sur ce plan, le documentaire propose un regard et un nouveau matériau : d'abord la référence à des archives autres que françaises (américaines et anglaises en l'occurrence) ; ensuite le témoignage de ce reporter américain déplacé de Rome jusqu'à Sétif pour fouiner dans les affaires coloniales de la France, les témoignages de Français ayant vécu les manifestations et leur répression et enfin, un fonds photographique inédit qui restitue la dimension géographique et humaine des événements.Il y a pour l'exemple, cette série de photos de la plage de Melbou à Béjaïa où, à la fin mai 1945, les autorités militaires françaises ont organisé une immense « séance de soumission » aux allures dantesques : 20 000 Algériens dépenaillés et terrorisés massés sur la plage pour mesurer de visu et, une fois pour toutes, la force de frappe de l'armée française dont les hélicoptères et les avions larguaient leurs bombes dans la rade. Le document, photos à l'appui, nous apprend qu'une autre séance de soumission, cette fois à Kherrata, a mis en scène la capitulation des « Arabes », venus en l'occurrence déposer les armes. Une série de clichés édifiants qui restituent également une atmosphère d'époque, qui nous change des séquences galvaudées par de nombreux documentaires emphatiques et lacrymaux de la chaîne de télévision nationale. Il y a également que le documentaire, et cela a l'air de ne pas passer inaperçu à en juger par le contenu du débat après la projection de Béjaïa, ne reproduit pas les chiffres jusque-là accolés à l'événement du côté algérien. Les archives sollicitées (services secrets anglais et américains) situent les massacres très loin des 45 000 victimes ; les estimations oscillent entre 6000 et 25 000 morts. Un détail peut-être au regard de la grande tragédie vécue à Sétif, Kherrata et Guelma, mais l'enjeu éthique et historique concernant la production documentaire est certain en le propos. Un principe souvent sacrifié chez nous au nom du culte du martyrologue et des surenchères idéologiques ou simplement politiciennes. Le film de Yasmina Adi est encore en tournée à travers le pays jusqu'à la fin mai. L'Autre 8 mai 1945, aux origines de la guerre d'AlgérieRéalisation : Yasmina AdiProduction : la Compagnie des Phares et Balises France, 2008
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