Béjaia - Nadir Chikhoune

LE CHANTEUR NADIR CHIKHOUNE À L'EXPRESSION «La musique algérienne est très riche»



LE CHANTEUR NADIR CHIKHOUNE À L'EXPRESSION «La musique algérienne est très riche»
Mon pays me donne envie de lui composer chaque jour des milliers de chansons. Le fait de prononcer le mot «Algérie» est déjà une inspiration.

L'Expression: Voulez-vous vous présenter aux lecteurs de L'Expression?
Nadir Chikhoune: Nadir Chikhoune est un jeune artiste natif de la wilaya de Béjaïa. Je suis né, il y a 21 ans, et grandi dans un environnement plein d'artistes, mes amis sont tous des artistes, en un mot, tout mon milieu est artistique. Dans notre maison et mon village, on adorait écouter les musiques et les paroles écrites par les grands cheikhs comme El Hasnaoui, Slimane Azem, Idir et tant d'autres chanteurs, symboles irréfutables de la musique algérienne. C'est peut-être cela qui m'a valu, à plusieurs fois, mon lancement dans le chant et les titres de lauréat de la chanson moderne et ceux de la musique chaâbi que j'ai raflés plusieurs fois consécutivement. De toutes les manières, quoi qu'il arrive, la musique et le chant feront toujours partie de ma vie.

Comment vous êtes-vous retrouvé dans la chanson?
C'était heureusement un pur hasard. Dès mon jeune âge, je composais des petits poèmes et petites mélodies que je fredonnais avec fierté. A l'âge de 13 ou 14 ans, des jeunes et copains m'encourageaient à chanter. Au vu de certains paramètres, j'ai hésité au départ. Mais je me suis lancé quand je me suis rendu compte que les tabous dont j'avais peur ne me posaient plus problème.

Quels sont les genres que vous chantez?
Je chante tous les genres algériens. Ceci dit, je me retrouve bien dans la musique algérienne mais sans pour autant occulter les autres genres musicaux universels, notamment la musique africaine. Je ne me vois pas comme interprète de la chanson en langue française, quoique je n'ai rien contre la langue, je suis de père et de mère, de grands-parents et arrière-parents algériens alors que mes racines sont africaines. En clair, je défendrai la musique algérienne et africaine jusqu'à mon dernier souffle.

Y a-t-il des situations, des paysages, des faits, des paroles, des personnes ou des gestes qui vous inspirent le plus?
D'abord, mon beau pays et ses différents contrastes me donnent envie de sauter, de danser et de lui composer des milliers de chansons et des milliers de belles mélodies. Le fait de prononcer le mot «Algérie» est déjà une inspiration.

Vous dites que vous êtes un fan des maîtres?
Effectivement, je ne peux pas m'endormir le soir sans écouter au moins une ou deux chansons de Slimane Azem, El Anka, Dahmane El Harrachi, Cheikh El Hasnaoui, Blaoui El Houari, Idir et Ahmed Wahby. Au vu de leur engagement pour le développement de la musique et du chant algériens, ces grands monuments me donnent la force de travailler sans répit.

Justement, on croit savoir qu'en plus du chaâbi, vous interprêtez aussi de la musique moderne, est-ce vrai?
Effectivement, vos sources d'information ne vous ont pas trompé. Vous savez, la musique algérienne, qu'elle soit chaâbi, tindi, gnawi, folk kabyle, raï, hawzi, malouf ou andalouse, moderne ou classique, elle est très riche. Ce qui est le plus urgent, est la nécessité de passer à la création puisque les grands chanteurs que j'ai énumérés tout à l'heure ont, eux, innové, il est de notre devoir de créer nous aussi. Sinon, nous continuerons à tourner autour du pot et ne rien faire. Les moyens existent, les salles de spectacles sont là, pourquoi ne pas passer à la création? La création est le meilleur moyen permettant la pérennisation de notre richesse culturelle. C'est pourquoi je me suis attelé à mettre en valeur notre large héritage patrimonial.

De quels instruments jouez-vous?
Du mandole! Il est de nationalité algérienne. Comme tous les chanteurs, je joue de la guitare, du banjo et de la flûte.

Avez-vous été formé dans une quelconque école?
Actuellement, les moyens qui existent comme l'outil informatique nous permettent de nous former facilement. La seule formation que j'ai reçue résulte de mes recherches via Internet. Je télécharge des sujets un peu drôles et bizarres que j'étudie à tête reposée. Croyez-moi, grâce à l'Internet, j'ai pu acquérir des choses drôles que j'ai découvertes à partir de très belles oeuvres. C'est terrible ce que l'on voit ces derniers années, le développement technologique est d'un apport conséquent quant au développement de toutes sortes de recherches. C'est grâce à l'Internet que j'ai connu tous les airs musicaux. Mais, bien sûr, tout cela a été accompli grâce au soutien que m'apportaient mes amis.

Chanterez-vous un jour le raï?
Vous savez que la musique raï n'est pas tombée du ciel. C'est grâce aux hommes, comme Ahmed Wahby, Blaoui El Houari, Ahmed Saber, Cheikh Zargui que cette musique est devenue ce qu'elle est aujourd'hui. De toutes les façons, la partie Ouest du pays a vu naître de grands maîtres dont le parcours ne peut être remis en cause par personne. Qu'on cesse toutes ces critiques. Si un seul chanteur a déraillé on ne doit pas mettre tout le monde dans le même sac. Le chanteur qui a dévié n'engage que sa personne et non pas tous les autres artistes.

Quel est ce chanteur, selon vous, qui a dévié?
Je ne dirai rien à ce sujet, les chanteurs qui ont amoché la musique sont connus de tout le monde. Et puis, dans tous les genres musicaux, il y a du bon et du mauvais. Mais, il faut dire que la musique algérienne n'est pas la propriété exclusive de ceux-là. Il faut, par contre, voir la chose du bon côté. Que peut-on dire du parcours de Aziouez Rais, de Boudjema El Ankis? Que peut-on reprocher à Takfarinas, à Houari Benchenet ou encore au défunt Hasni et tant d'autres chanteurs de raï? Rien, absolument rien, hormis la reconnaissance des efforts qu'ils ont fournis. El Hadj Tahar El Fergani, qui a apporté sa touche personnelle, a mondialisé le chant et la musique du malouf, Nouri Koufi est aussi de notoriété mondiale. Idir, Cheb Khaled, Bouhi Abdelkader ne sont pas en reste. La défunte Sabah Essaghira a consacré toute sa vie à l'art. Qu'on laisse les artistes faire et parfaire leur art tranquillement.

Vous vous faites l'avocat des artistes?
Certes, je suis jeune mais je suis convaincu que personne n'a le droit de tirer sur les chanteurs. Un peuple sans artistes est un peuple mort. L'artiste est avant tout un éducateur et un éveilleur de conscience. Rappelons que si les artistes de la période coloniale n'avaient pas existé, qui connaîtrait la cause algérienne? Moufdi Zakaria a joué un rôle de premier ordre durant la guerre de Libération nationale. Qui a internationalisé la cause palestinienne? Ce sont sans doute les artistes comme Mahmoud Darwiche. Ça a toujours été comme ça, les artistes ont toujours été à l'avant-garde des événements.

Parlons un peu de vos oeuvres...
Actuellement, je suis en plein boulot, j'enregistre un nouvel album intitulé «Je suis amoureux de ma guitare». Le tube est du genre gnawi tandis qu'à travers la chanson, je rends un vibrant hommage à El Hasnaoui, El Anka, Slimane Azem et pratiquement tous les artistes qui ont mis en valeur la musique algérienne. Je me prépare également à monter sur scène au Théâtre de verdure d'Oran le 10 août prochain et ce, à l'occasion des soirées ramadhanesques organisées, avec brio, par les responsables de la commission et l'Office des arts et de la culture de la commune d'Oran que nous saluons au passage, particulièrement MM. Aouad Mohamed et Abbès Bouakeul. Cette ville m'inspire beaucoup. J'ai eu l'occasion de me rendre dernièrement dans la deuxième capitale du pays, j'ai constaté que beaucoup de choses ont changé et que la commune a tracé un programme d'animation très riche et varié. Pourvu que ça dure, car celle ville et ses habitants méritent tant d'égards. N'oublions pas qu'Oran a enfanté d'illustres artistes et sportifs. Il suffit juste de se remémorer le géant Ahmed Wahby, que Dieu ait son âme. Bien sûr, nous n'avons pas le droit d'oublier la voie tracée par Blaoui El Houari que j'ai eu l'occasion de voir de près à l'occasion du dernier Festival de la chanson oranaise, tenu cet été. Le festival m'a permis de peaufiner mes recherches. A l'occasion, je rends hommage à la Direction de la culture et l'Office des arts et de la culture d'Oran.

Une conclusion?
L'art algérien est, dans toutes ses composantes, riche. Etant donné que les moyens existent, l'artiste n'a qu'à se mettre à l'oeuvre, la finalité est, bien sûr, de mettre en valeur l'art algérien. Nous sommes tous interpellés par le devoir national qui est de se remettre au travail pour passer au stade de la créativité et bannir cette petite morosité qui a frappé, durant ces toutes dernières années, la musique algérienne.
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