Béjaia - ASSOCIATIONS ET ORGANISATIONS

Célébration du printemps à Béjaïa: Amenzu n tefsut, une fête ancestrale



Célébration du printemps à Béjaïa:  Amenzu n tefsut, une fête ancestrale



Au traditionnel déjeuner de partage, Seksou ouderyis, pris par les convives à l’intérieur des maisons restaurées, d’autres activités d’accompagnement ont été au programme à Djebla (commune Beni Ksila).


L’association Tajmaât n Jebla a organisé samedi, 2 mars, la 4è édition de la fête du printemps Amenzu n tefsut, dans l’ancien village Djebla. Selon les estimations des organisateurs, quelque 2.500 personnes, venues de différentes régions de la wilaya de
Béjaïa, ont répondu à l’invitation de l’association et ont honoré de leur présence cette cérémonie, malgré le mauvais temps qui a sévi pendant cette journée.

Au traditionnel déjeuner de partage, Seksou ouderyis, pris par les convives à l’intérieur des maisons restaurées, d’autres activités d’accompagnement ont été au programme et ont donné des airs de kermesse à cet événement. Outre l’incontournable troupe d’Ittebalen (tambourinaires) de Melbou, fidèle à ce rendez-vous touristico-culturel depuis son lancement, une conférence-débat sur le sens de cette fête du printemps a été animée par l’auteur Rachid Oulebsir et l’anthropologue Ali Sayad.

Culturel, social, touristique, économique, cet évènement à plusieurs épithètes ne cesse de prendre d’année en année de l’épaisseur et de jouir d’une certaine notoriété régionale.

«Ce rendez-vous, en plus de son ambition affichée de préserver nos saines traditions, vise davantage à faire connaître, faire partager notre expérience de restauration d’un ancien village kabyle et promouvoir le tourisme dans notre wilaya» nous dit Ahmed Farid, le président de l’association organisatrice.

Les convives ont eu, pendant les festivités, tout le loisir de visiter les maisons kabyles restaurées et ont fait provision de quelques produits du terroir exposés et mis en vente à cette occasion. Le village sauvé ainsi de la ruine par la courageuse association Tajmaât n Jebla arbore d’année en année un visage avenant, et stimule de plus en plus la curiosité des professionnels du secteur touristique.

Pérennité

Amagger n tefsut ou imensi uderyis, rencontre du printemps ou repas de faux fenouil, est l’un des rites les plus anciens de la culture kabyle, et qui se veut un événement fêtant l’arrivée du printemps. Une pratique ancestrale où l’on cueille cette fameuse plante appelée aderyis, faux fenouil. Les femmes préparent avec ce met du couscous en décoction avec des carottes, pommes de terre, pois chiches, œufs durs… le tout saupoudré généreusement ou d’une fine couche de sucre.

Cette fête ancestrale coïncide avec le premier jour du mois de mars du calendrier grégorien. Bon nombre de familles tentent de pérenniser cette tradition aux dimensions socioculturelles. Cette plante dépurative est à portée de main dans les champs et maquis, mais à cueillir avec délicatesse car elle peut provoquer des démangeaisons à son contact.

Les Berbères en générale et les Kabyles en particulier accordent beaucoup d’importance à la nature en la vénérant. Moult rites berbères font référence à celle-ci dont ceux se rapportant à yennayer et amenzu n tefsut. Le printemps est synonyme de fécondité, floraison et prospérité.

On trouve dans la poésie l’éloge dont on fait de dame nature: «A Lalla Tafsut am ijedjigen, a tikli tsekkurt ger iberwaqen, nekki mmugregh-kem s ichebbaden, kemmi mmagri-yid s ijedjigen. (Ô dame printemps à la parure fleurie, démarche de perdrix entre les asphodèles, je viens vers toi les bras chargés de crêpes, viens à ma rencontre, chargée de fleurs)».

On raconte que le rite en question remonte à un fait divers relatant l’histoire d’un enfant atteint d’une maladie inconnue pour laquelle les parents ont tenté de trouver le remède. Le père tombe par hasard sur le thapsia garganica qui s’avère un remède efficace pour l’enfant qui a retrouvé la forme une fois qu’il a bu la décoction préparée à base de cette plante. Le père s’écria «ider yes», (il a survécu grâce à elle). C’est ainsi qu’on retrouve de nos jours le mot aderyis par pur glissement grammatical.


Bachir Djaider



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