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Une Transition Inédite au Sommet de l’État Algérien : Sifi Ghrieb Nommé Premier Ministre par Intérim


Une Transition Inédite au Sommet de l’État Algérien : Sifi Ghrieb Nommé Premier Ministre par Intérim

Le 28 août 2025, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a pris une décision inattendue en limogeant le Premier ministre Nadir Larbaoui, en poste depuis novembre 2023, pour confier l’intérim du gouvernement à Sifi Ghrieb, ministre de l’Industrie et de la Production pharmaceutique. Cette nomination marque une première dans l’histoire politique algérienne : le poste de « Premier ministre par intérim », un rôle inédit qui soulève des interrogations sur sa légalité constitutionnelle et ses implications politiques.

Un limogeage sans explication officielle

Le décret présidentiel signé par Tebboune, annoncé via un communiqué de la présidence et relayé par la télévision publique, n’a fourni aucune justification pour la destitution de Nadir Larbaoui. Cette absence de transparence est devenue symptomatique des décisions politiques en Algérie, où les changements au sommet de l’État se font souvent dans l’opacité. Cependant, plusieurs éléments contextuels permettent d’éclairer cette décision. L’absence remarquée de Larbaoui à une réunion sur les transports, organisée après un tragique accident de bus le 15 août 2025 ayant causé 18 morts dans l’oued El Harrach, a suscité des critiques virulentes sur les réseaux sociaux. Cet incident, combiné à une gestion jugée insuffisante face à la crise des transports et à l’effondrement de l’industrie automobile, semble avoir précipité sa chute.

Nadir Larbaoui, ancien avocat et diplomate de carrière, était pourtant considéré comme un proche du président. Nommé chef de cabinet de la présidence en mars 2023, puis Premier ministre en novembre de la même année, il n’aura occupé ce poste que 21 mois. Son départ brutal, après celui de son prédécesseur Aïmene Benabderrahmane, illustre l’instabilité chronique de la primature algérienne, un poste de plus en plus perçu comme un « fusible » pour absorber les critiques adressées au pouvoir présidentiel.

Sifi Ghrieb, un technocrate à l’épreuve de la politique

Sifi Ghrieb, désigné « Premier ministre par intérim », est une figure relativement peu connue du grand public, mais respectée dans les cercles industriels. Titulaire d’un doctorat en physique-chimie des matériaux de l’université d’Annaba, il a occupé des postes stratégiques, notamment à la tête de la société Algerian Qatari Steel (AQS) et comme conseiller du président Tebboune. Sa nomination, tout en conservant son portefeuille ministériel, suggère une période de transition plutôt qu’un changement définitif. Ghrieb s’est distingué par son engagement pour l’innovation industrielle, notamment à travers le développement d’équipements médicaux pendant la pandémie de Covid-19 et la création de pôles technologiques dans les secteurs de l’acier, de la pharmacie et de la mécanique.

Sa désignation comme intérimaire pourrait être une mise à l’épreuve, Tebboune testant sa capacité à gérer les complexités d’un rôle politique plus large. Cependant, ce choix soulève des questions : s’agit-il d’une solution temporaire pour assurer la continuité gouvernementale, ou d’un signal d’un remaniement plus profond à l’approche des échéances électorales de 2025 ?

Une nomination inédite : le « Premier ministre par intérim »

Le terme « Premier ministre par intérim » est une nouveauté dans le lexique politique algérien. Contrairement aux pratiques antérieures, où un successeur permanent était nommé immédiatement après un limogeage, cette désignation temporaire marque un précédent. La Constitution algérienne de 2020 ne mentionne pas explicitement un tel poste, ce qui a conduit certains juristes, comme Me Heboul, à questionner sa conformité légale. Selon eux, cette formule pourrait être une manière de contourner les procédures de nomination permanente, qui nécessitent des consultations plus longues et un aval politique plus complexe.

Cette innovation institutionnelle reflète une volonté de flexibilité de la part de Tebboune, mais elle alimente aussi les spéculations sur l’état de la gouvernance en Algérie. Pour certains analystes, elle traduit une fragilité structurelle de l’exécutif, dans un contexte où la dépendance aux hydrocarbures, l’inflation et les tensions sociales pèsent lourdement sur l’économie. D’autres y voient une stratégie pragmatique pour maintenir la stabilité tout en préparant une transition plus large.

Un contexte politique et économique tendu

Ce limogeage intervient dans un climat de défis multiples. L’économie algérienne, bien que portée par une croissance de 4,5 % au premier trimestre 2025, souffre d’une baisse du secteur des hydrocarbures, principal moteur des exportations. La crise des transports, illustrée par des accidents mortels et des infrastructures vétustes, a exacerbé le mécontentement populaire. De plus, l’industrie automobile, autrefois un fleuron avec des acteurs comme Renault, traverse une période d’impasse, marquée par des fermetures d’usines et une dépendance accrue aux importations.

La nomination de Ghrieb, un technocrate orienté vers l’industrie, pourrait être un signal adressé aux partenaires internationaux, notamment l’Union européenne, principal acheteur de gaz algérien. Elle vise peut-être à recentrer l’action gouvernementale sur la relance économique et l’innovation, tout en évitant une rupture immédiate dans la chaîne de commandement.

Perspectives et interrogations

La nomination de Sifi Ghrieb comme Premier ministre par intérim ouvre une période d’incertitude. Combien de temps durera cet intérim ? Un nouveau Premier ministre permanent sera-t-il nommé avant les élections présidentielles prévues pour octobre 2025 ? La composition du prochain gouvernement et les messages envoyés aux partenaires internationaux seront scrutés de près. Pour l’heure, Ghrieb devra naviguer entre des attentes sociales croissantes et un système politique où le pouvoir reste concentré entre les mains du président.

Ce remaniement, s’il reflète une volonté de répondre aux critiques, risque néanmoins d’accentuer la défiance d’une opinion publique lassée par l’opacité et l’instabilité. La passation de pouvoirs entre Larbaoui et Ghrieb, survenue le 28 août 2025 au Palais du gouvernement, marque le début d’une nouvelle séquence politique dont les contours restent à définir.


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