Algérie

Un lieu, un nom Bendjebbar Mohamed Abdelhak : Le porte-parole des victimes des essais nucléaires français en Algérie.



Le 3 juin prochain, Mohamed Abdelhak Bendjebbar doit intervenir devant le Sénat français. En tant qu'invité de l'Association des victimes des essais nucléaires AVEN, il doit rappeler à la France ses devoirs envers les victimes aussi bien en Algérie qu'en Polynésie. Bendjebbar et les autres invités de cette association seront reçus notamment par un comité composé de Voynet, sénatrice et ponte du PS et Hélène Luc, une autre sénatrice. Il y a à peine quelques années, Bendjebbar a été l'invité de marque de Poncelet, président du Sénat français. Durant la première semaine du mois d'août prochain, Bendjebbar ira à Hiroshima et Nagasaki, au Japon, sur invitation de la puissante Association Genisken qui regroupe les rescapés de la première attaque nucléaire de l'histoire de l'humanité. En 2002, il a fait le déplacement au pays du soleil levant où il a, devant une assistance nombreuse, évoqué les effets des essais nucléaires français dans la région de Reggane et Ineker. De ce voyage, il en a tiré une fierté : voire des dizaines de milliers de Japonais debout par respect à l'emblème national. Il est un des concepteurs de « l'Appel d'Hiroshima » élaboré le 5 août 2002 dans cette ville japonaise où les signataires exigent, entre autres, de la France de lever le secret sur ses essais nucléaires dans ses anciennes colonies et d'indemniser les victimes de ses essais ou leurs ayants-droit. Sur une anecdote propre à lui, il évoque ses déboires avec l'ambassade d'Algérie au Japon. La représentation diplomatique de son pays lui a refusé une couronne de roses qu'il devait déposer sur le mémorial des victimes d'Hiroshima et Nagasaki. Le motif invoqué « absence de chapitre spécifique à cet effet », explique le télégramme qui lui a été adressé et dont il garde la copie. Se considérant pris en charge depuis la fin des années 60, lorsqu'il a été, en tant que militaire, déclaré invalide à 100%, Bendjebbar mène son combat pour la reconnaissance des autres victimes de Reggane et le reste du Sahara algérien. Il se dit incapable d'avancer un nombre approximatif des victimes des essais nucléaires. Elles doivent se compter par milliers, puisque les morceaux de fer, hautement irradiés, traînaient à l'air libre et jonchaient les parcours des nomades. Il a cependant une certitude : les trois cents militaires, qui étaient sous ses ordres, ont été plus exposés que lui aux risques d'irradiation, puisque ce sont eux qui se sont chargés de démonter les équipements de la centrale électrique. Dans ce sens, il donne l'exemple de celui qui le secondait dans sa mission de transférer la centrale de Reggane vers Tindouf et qui est mort à l'âge de 31 ans. Pis encore, avec du recul, il s'explique l'ordre de garder le silence que lui a intimé feu Kasdi Merbah quand il a appris son irradiation. « Il fallait déplacer les populations de tout le périmètre contaminé », estime-t-il. Entreprise dépassant de loin les capacités logistiques d'un pays à peine sorti de la guerre et vivant sous la menace d'un pays voisin, ajoute-t-il. Bendjebbar, sous-directeur du génie à la base 148 se trouvant à Alger, s'est trouvé à Reggane pour accomplir une mission jugée, à l'époque, de la plus haute importance. Actuellement, il est prouvé qu'il a été victime du sceau de secret imposé par la France sur ses essais nucléaires au Sud algérien. Poussant ses recherches et grâce à ses contacts, notamment avec des militants anti-nucléaire américains et japonais, il détient des preuves matérielles sur les essais tenus secrets dans la région de Tanezrouft. Il espère que son procès, intenté contre la France, lèvera le voile sur la question et le rétablira dans son droit. Avant d'être envoyé à Reggane, Bendjebbar a accompli une autre mission dangereuse au lendemain de l'indépendance. En tant qu'ingénieur en génie, formé en Allemagne de l'Est, il s'est occupé du déminage de la ligne Morris. Evoquant cette période, il se contente de dire que la mine encrier pesait 32 grammes. Il se rappelle que les victimes de ces mines et celles des mines anti-personnelles étaient envoyées chez un chirurgien algérien exerçant à l'hôpital d'Oujda dénommé Docteur Naït. A l'ex-RDA, où il a été envoyé par Boussouf pour suivre une formation, il a servi de secrétaire à Kroun Ahmed, le premier représentant du GPRA dans ce pays de l'ex-bloc soviétique. Bendjebbar a, en peu de temps, acquis la langue de Goethe et devait expliquer la cause de son pays aux Allemands. Quand il a rejoint les rangs de l'ALN, en 1956, il avait déjà un niveau de scolarité très respectable à l'époque : il devait passer la première partie de son bac. A la fin de l'année 1959, il a été rappelé à la frontière ouest. Grâce à sa maîtrise de la langue allemande, on lui confie la mission de convaincre les étrangers enrôlés par l'armée française, et se trouvant en premières lignes, de déserter et de rejoindre leur pays d'origine. Cette tâche incombait au service de rapatriement. A l'indépendance, il se retrouve à Oran en tant que chef du génie militaire. Il occupera ce poste quelques années avant d'être nommé à Alger au niveau de la Direction centrale du génie. Au milieu des années soixante, sur ordre du colonel Boumediene, encore traumatisé par la guerre dite des sables, il devait installer toute une infrastructure le long de la frontière sud avec le Maroc. Son atteinte, nécessitant une très lourde médication, ne l'empêche pas de garder le sourire. L'humour est une seconde nature chez lui. On ne s'ennuie pas en sa compagnie. Les sobriquets qu'il affuble à son vis-à-vis sont les témoins de l'affection qu'il voue à son vis-à-vis. Pourtant, Bendjebbar n'a pas eu la vie facile. Né le 8 août 1937 à Tiaret, d'un père magistrat, il sera orphelin très tôt. Le statut social de son père servait aussi de couverture à son activisme au sein du PPA. D'ailleurs, enfant, Mohamed Abdelhak a eu le privilège d'offrir un bouquet de fleurs à Messali El Hadj lors de sa visite à M'dina Jdida à Oran. Il rejoindra le lycée René Basset à Mostaganem pour suivre ses études. Mais à la mort de son père, après trois années d'emprisonnement, il sera obligé de les interrompre. Par force, l'armée française va l'enrôler alors qu'il n'avait même pas 20 ans. Mais, en mars 1956, il rejoindra les rangs du FLN à Sidi Djillali, dans la région de Tlemcen. Après un court séjour, près des frontières où il est tombé malade, il sera envoyé à Oujda avant de rejoindre Dresde en RDA. Considéré comme l'un des plus jeunes retraités de l'armée algérienne, à cause de son invalidité, il a eu le temps de connaître du monde issu des arts et culture. Dans le salon de sa villa, un tableau du peintre Smail Samsoun, tombé quelque peu dans les oubliettes, orne un mur. Quand Bendjebbar était encore en poste au Sud algérien, il lui a offert une balade dans le Sahara, lui qui était infirme et cloué à un fauteuil roulant. En signe de reconnaissance, il lui a offert deux toiles. Pour mettre de l'entrain dans son salon, il « exhibe » le livre d'André Bendjebbar « Histoire secrète de la bombe atomique française » publié en 2002 chez Le Cherche Midi. Dédicacé par l'auteur à Mohamed Abdelhak, on peut lire « à mon cousin musulman. Cordialement ». Du Japon, il a ramené des bibelots faits main dont il est le seul à connaître la valeur. Ce sont des présents qui lui ont été offerts par ses amis japonais avec qui il a fêté son anniversaire en 2002.


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Bonsoir souad, je suis ta soeur nous cherchions a te contacter depuis des années sans succès bendjebbar.aicha@gmail.com ceci est mon adresse mail peux tu m'ecrire afin d'echanger nos coordonnés et te parler de ton pere qui ne cessait de nous parler de toi
Aicha bendjebbar - Coordinatrice RH - Oran, Algérie

29/12/2012 - 55534

Commentaires

Bonjour. Je voudrais savoir un peu plus sur sa vie, je suis sa fille j ai plus de nouvelle de lui depuis qu il c remarie . Merci d avance. Cordialement Mne achouri née Bendjebbar
Achouri Souad - Mère ou foyer - Lambersart France, Algérie

21/12/2012 - 52495

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