Algérie - A la une


Tendances
Youcef Merahi[email protected]/* */J'ai beau chercher, ici et là , un motif de satisfaction, je ne vois rien qui me réjouisse. Sérieusement, il y a péril en la demeure. Il y a tromperie sur la marchandise. Le matin, quand je vois le peuple vaquer à ses occupations, dans ce chaos de bagnoles, et tous ces trottoirs pleins comme un œuf, je me dis que l'Algérien est en attente de quelque chose. Je sens comme une énorme frustration. Un manque flagrant. Ce peuple, qui, le matin, se presse de boire à la va-vite son café serré, accompagné d'une cigarette sur laquelle il tire comme un damné, feuillette son journal à l'affût d'une information qui vaille le coup d'un sourire et va à son boulot, comme on irait à une corvée. Angoissants les regards qu'il jette alentour, prêt à rugir, à bondir et à cogner sur tout ce qui bouge. A croire qu'il est cerné d'ennemis invisibles. Sincèrement, je partage ce qui-vive existentiel. Il ne faut surtout pas contrarier ce peuple ; à la moindre bévue, il risque de péter, comme une grenade dégoupillée. Je le sens en attente. De quoi ' Pas de ces annonces tonitruantes qui viennent le bassiner avec des déclarations à la veille de chaque événement. Tiens, pour le Ramadhan à venir, aucune marchandise ne fera défaut sur les marchés algériens.O la belle blague ! On nous ressort, chaque année, le même refrain. Le peuple en a marre de l'entendre fredonner par tel ou tel ministre ; le disque est rayé à la longue. Le peuple souhaite disposer de toutes ces marchandises (viande, légumes secs, semoule, poissons”?) durant toute l'année. Les prix ' Ne vous en faites pas, ils seront à la portée de chaque bourse. Puis, vlan ! Tout flambe ! La viande du pauvre se monnaye à près de mille dinars. La viande du pauvre ' J'éclaire votre lanterne, monsieur le ministre : il s'agit de la sardine bleue. La bleue, rien que la bleue ! Et le peuple ne cesse de vaquer à ses occupations routinières, indifférent aux litanies ministérielles ! Un bon café bien serré et ça repart ; mais jusqu'à quand 'Le peuple algérien n'est pas heureux ; ce n'est un secret pour personne. Il veut être écouté ; ça lui est difficile, très difficile. Ecouté sur tout ! Les problèmes du quotidien. La route à retaper. Le transport à assurer. Les retards d'avion à éviter. Les longues chaînes, ces interminables chaînes qui bouffent les ressorts du peuple. Les miens, aussi ! Ici et là ! A l'hôpital. A la Wilaya. Au cadastre. A la mairie. Les bouchons routiers. Partout, quoi. Quand il n'est pas écouté, il se fâche, se met en rogne, forme un corps compact et, vlan, il ferme une route.Une mairie. Une daà'ra. Une voie ferrée. Tenez-vous bien, à Zighoud-Youcef, à cause d'un centre d'enfouissement technique (CET), le peuple de cette commune en est arrivé à incendier le domicile du chef de daà'ra. Question à un dinar qui ne vaut plus rien, comment en est-on arrivé là ' Quelle est la responsabilité du maire, du chef de daà'ra, du wali, du ministre ' Qui est responsable de ces émeutes ' Assurément, pas le peuple ! Il n'a pas été écouté, me semble-t-il.Les partis politiques font la politique du sur-place. Il n'y a rien de nouveau ; c'est du moins ma grande déception, personnellement. Le FFS n'arrive pas à se dépêtrer de sa proposition du consensus national, celle de la page blanche. On efface tout, on recommence. Comme il n'arrive pas à se départir de la présence tutélaire de l'historique chef du plus vieux parti d'opposition. C'est comme une faiblesse partisane : il suffit que le chef historique s'éclipse pour que le parti s'étiole. Pas seulement pour le FFS. On ne voit plus le RCD. On ne l'entend plus. Noyé dans la coalition d'opposition, ce parti n'a plus la spécificité de sa création. Le FLN n'échappe pas à ses démons : le zaà'misme et le pouvoir à tout prix. Il cogne sur tout ce qui bouge ; ni les politiques, ni les journalistes, ni les services de sécurité, rien n'échappe à cette inextinguible soif de taper à tout vent. Les partis islamistes n'ont de cesse de traquer les laà'cs, les francophones, la ministre de l'Education, et, maintenant, tamazight”? Tout va à vau-l'eau ! L'université. L'école. La politique. Le football. Les plages (payantes ou pas, au fait '). Le statut de la femme. La religion (la rokia, halal ou pas '). Le peuple n'arrête pas de vaquer à ses occupations, comme obnubilé par son quotidien carnivore. Un quotidien qui lui bouffe le cerveau. Il fait le dos rond. Il attend que le vent de sable disperse les scories de son existence. Il ne croit plus en rien. Que l'on ne se méprenne pas ! Il voit, jauge, analyse, scrute, réfléchit et attend qu'un jour, on lui présente sur un plateau d'argent le bonheur social auquel il ouvre droit. Ce bonheur qu'il n'a pas, pour le moment. Le peuple algérien n'est pas heureux. Que messieurs les sociologues se mettent au travail ! Que les universitaires se bougent le popotin et nous disent la réalité du terrain ! Si le peuple a besoin de se vêtir, de manger, de voyager, de prendre son pied, il a surtout besoin d'être heureux dans son pays. Les politiques n'écoutent pas le peuple. Et ce n'est pas les représentants élus (pas tous, heureusement) qui me diront le contraire ! Si le peuple se soulève pour contester un centre d'enfouissement technique, que ne fera-t-il pas pour son bonheur.L'attente du peuple algérien est gargantuesque ; ce n'est pas en brouillant les téléphones de quelques tricheurs au bac qui lui rendront le sourire. De toutes les façons, à partir de dix-neuf heures, le peuple algérien est absent de son pays ; il est coincé devant sa télé parabolé, bavant devant ces images qui viennent d'ailleurs. Tout est beau, là -bas ! Tout semble moche, ici ! Alors, messieurs les décideurs, rendez au peuple son sourire ! Son bonheur !


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