Algérie - Revue de Presse

Silence, on regarde ailleurs !



  Paris.
De notre correspondant


L’agencier de l’AFP se délecte avec ironie de la position des autorités françaises. «Pas d’appel à la libération de blogueurs en Tunisie, pas ou peu de réactions face aux émeutes qui secouent l’Algérie... La  France, souvent prompte à appeler à la liberté d’expression dans le monde et à la retenue lors de manifestations, est dans l’embarras avec ses voisins du Sud. La réserve, voire le silence, affichée par la diplomatie française tant à l’égard de la Tunisie que de l’Algérie tient sans doute aux intérêts économiques importants entretenus dans ces pays par la France et à la présence sur le territoire français d’importantes communautés maghrébines.» A quoi Souhayr Belhassen, de nationalité  tunisienne, présidente de la Fédération internationale des ligues des droits  de l’homme (FIDH) basée à Paris, lui répond : «Le silence des alliés de Tunis n’est pas sain. On laisse à Zine El Abidine Ben Ali le temps de se retourner. On le soutient, on fera comme d’habitude.» Le quotidien de droite, proche du gouvernement, le Figaro s’étonne du paradoxe d’un pays riche et d’un peuple pauvre. «Dans un pays qui peine à panser les blessures de la guerre civile des années 1990, la nouvelle crise qui s’annonce révèle tragiquement le paradoxe algérien. Grâce au pétrole, le pays, qui a engrangé 155 milliards de dollars de réserves de change, aurait pu réussir son décollage économique et colmater les brèches qui menacent la paix sociale, notamment le déficit chronique en logements et le chômage des jeunes. Les grands projets, comme l’autoroute Est-Ouest ou la promotion de l’agriculture saharienne, ou encore Sonatrach, la florissante compagnie des hydrocarbures, sont éclaboussés par des scandales récurrents.
De hauts responsables, y compris dans l’entourage proche du président Bouteflika, sont cités dans de sordides affaires de corruption, mais ils continuent de jouir d’une troublante impunité. Malgré l’embellie financière et une incontestable amélioration du front sécuritaire, les pratiques autoritaires et clientélistes du régime ont mené le pays vers une nouvelle impasse. Pour les jeunes laissés sur le carreau et qui tentent, au péril de leur vie, de rejoindre l’eldorado européen à bord d’embarcations de fortune, cette justice à deux vitesses alimente la révolte. L’état d’urgence, qui a plombé les libertés depuis février 1992, et la neutralisation de tous les canaux de médiation ont fait le reste pour imposer la violence et l’émeute comme ultime moyen d’expression du mécontentement.»
Les yeux fixés sur Abidjan, pas sur Alger
Le quotidien de centre gauche a une autre analyse et trouve le moyen d’égratigner le président français : «Jamais les liens n’ont été aussi multiples et vivants entre Français et Maghrébins, jamais les deux rives n’ont pourtant paru si distantes qu’en ces jours d’émeutes et de violences sociales. La Tunisie et l’Algérie s’embrasent, des collégiens, des ouvriers, des avocats hurlent leur colère contre la vie chère et leur ‘mal-vivre’ dans un huis clos verrouillé par la police ou par l’armée. Et dans l’embarras, la France se raidit, détourne son regard et balbutie deux ou trois formules aussi diplomatiques que dilatoires. Il est vrai que le grand dessein de l’Union pour la Méditerranée lancé en grande pompe par Nicolas Sarkozy en 2008 a tourné au fiasco.» Quid des autorités françaises ' On peut résumer ça : «On est occupé ailleurs, avec Abidjan qui se retrouve avec deux présidents après les élections.» Vendredi, le ministère français des Affaires étrangères s’est retranché  lors de son point de presse quotidien, à propos de l’Algérie, derrière un banal : «Nous suivons la situation avec attention.» Rien sur la Tunisie et les blogueurs et cyber-dissidents arrêtés la veille, selon des ONG, relève perfidement l’AFP. Sans citer de pays, la ministre française des Affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie, également présente, s’est bornée à évoquer «la problématique de  l’emploi» à laquelle il faut trouver une solution. Selon les experts, le chômage qui frappe en particulier les jeunes diplômés est l’une des causes de la crise qui frappe la Tunisie et l’Algérie.
Et d’agiter la menace islamiste pour Tarak Ben Ammar, hommes d’affaires et producteur : «Imaginez un ou deux Mahmoud Ahmadinedjad arrivant au  pouvoir en Algérie, en Tunisie ou au Maroc.  C’est entre cinq et dix  millions de personnes qui quitteraient l’Afrique du Nord, en bateau, à la  nage, sur des radeaux, pour venir en Corse, en Sardaigne, en Sicile, la  Côte d’Azur…» «La retenue française vient aussi probablement des accès de tension survenus au cours des deux dernières années avec Tunis et Alger qui, bien qu’aujourd’hui  résorbés, ont marqué les esprits au Quai d’Orsay», croit comprendre l’AFP.                     


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