Algérie

Si notre campagne se racontait...



Chaque strate de la société a ses opportunistes, ses incompétents et autre tire-au-flanc, mais il existe, Dieu merci, d?autres qui gardent, malgré tout, le coeur à l?ouvrage, une conscience inébranlable et surtout une loyauté envers le pays à toute épreuve.De cette catégorie, surgit de temps à autre une idée que certains qualifient, avant même de l?avoir essayée, de fantaisiste. Et si par malheur, elle ne laisse entrevoir aucune possibilité de gratter quelques dividendes au passage ou qu?elle dérange les affaires de quelques lobbies, elle est passible d?être dénaturée ou étouffée dans son berceau. Combien d?hypothèses de développement conçues par des cerveaux hors pair se retrouvent oubliées sur des étagères poussiéreuses et leurs auteurs accusés de rêveurs mis sur voie de garage. On verse des larmes de crocodile par la suite sur la fuite des cerveaux.Pourtant, quelle que soit l?adversité endurée par ces cadres, que de chemin a été fait depuis !En prenant n?importe laquelle de nos routes, le premier espoir qu?on formulait secrètement c?était de rencontrer la présence rassurante de quelques habitations ou s?offrir une halte à l?ombre d?un arbre qui viendrait miraculeusement rompre la monotonie des immensités désertiques écrasées par un soleil de plomb. Tomber en panne même sur les routes du nord du pays était un risque pour lequel on prenait toutes les précautions en se dotant de provisions et...d?eau. L?Etat a engagé des sommes faramineuses pour rendre hospitaliers ces espaces, synonymes de désolation où, jusqu?à très récemment disposer de ce précieux liquide était une utopie. Pour en avoir, c?était la corvée quotidienne et on allait la chercher des fois à quelques dizaines de kilomètres. Aujourd?hui, on peut traverser le pays dans tous les sens, et il faut être singulièrement aveugle ou d?une indécrottable mauvaise foi pour ne pas voir ces vergers qui se succèdent à perte de vue. On est agréablement surpris de découvrir une campagne verdoyante et des océans de serres en plastique là où il n?y avait que des champs de pierres et des ergs de dunes de sable. On citera, comme exemple représentatif d?une grande partie du pays: Biskra.La bien nommée « Sukra » pour ses amoureux ajoute chaque jour quelques nouveaux joyaux à sa couronne de reine des Zibans qu?elle mérite avec panache. Sa vaste région qui se satisfaisait, il n?y a pas si longtemps, seulement de quelques points épars de cultures vivrières, même si elle nous a toujours gratifié généreusement de l?emblématique Daglet Nour de Tolga, rivalise maintenant avec l?antique Mitidja. Ses fruits et ses légumes se retrouvent dans les assiettes des Algérois et même des Oranais. Je m?accorde l?insigne privilège de vous inviter chez ces gens si simples et si hospitaliers pour voir de près les prouesses de leur génie et de leurs efforts. Ils sont tout simplement admirables et forcent le respect loin de toute forfanterie. On devrait offrir des circuits touristiques aux dénégateurs invétérés qui n?admettent pas encore que le visage de notre campagne a complètement changé et leur faire rencontrer ces bataillons de jeunes aux manches retroussées en train d?arracher des pans entiers au désert, chaque jour, pour les convaincre que ce qu?ils voient ne date pas de l?antiquité. Il n?est pas le produit d?une génération spontanée ni d?un mirage, mais bien le résultat de la conjugaison de plusieurs paramètres mis en synergie pour prendre à bras le corps les problèmes de la terre. On a commencé par bannir deux comportements inhibiteurs: le paternalisme démobilisateur de l?Etat et l?esprit de l?éternel assisté dans lequel se complaisait le citoyen. Ce dernier se retrouve, dans la nouvelle philosophie, impliqué jusqu?au cou dans l?établissement de son propre diagnostic et la médication qu?il juge la mieux appropriée à ses difficultés. La réussite devient naturellement tributaire des moyens engagés et le bénéfice proportionnel à la quantité d?efforts déployés. Rien n?est imposé de haut, tout s?organise autour de programmes flexibles sous l?entière responsabilité du bénéficiaire. L?Etat, qui montre plus de rigueur dans ses interventions, assure un compagnonnage discret et bien ciblé.Echaudé par les déboires des expériences antérieures, personne ne pariait sur la réussite de cet énième plan appelé PNDA (1). Non seulement il a permis l?élaboration d?un véritable software exhaustif du monde agricole mis à la disposition des futurs plans de développement intersectoriels, mais là où il présage, malgré quelques insuffisances, des résultats encourageants c?est ce qui se passe concrètement sur le terrain.En effet, sur le volet pratique, des milliers de forages, de bassins et de réseaux d?irrigation ont essaimé sur tout le territoire national pour la mise en valeur de milliers d?hectares intégrés dans des périmètres de mise en valeur.Des millions d?arbres ont été plantés et leurs fruits commencent à garnir le marché et à être exportés. De l?avis d?observateurs avisés, la pérennisation à hauteur de trente pour cent seulement de ce qui a été réalisé peut nous sortir de l?ornière de la dépendance alimentaire pour peu que l?on organise davantage ce secteur et qu?on l?épargne des lenteurs bureaucratiques. Ces investissements, adaptés aux besoins du terrain, ont créé une dynamique indéniable et donc des bouleversements économiques et sociologiques de la société qu?une autre stratégie vient soutenir et compléter en offrant un accompagnement judicieusement ajusté aux attentes du fellah. Les fameux PPDRI (2) et dérivés: des programmes de travail certes ambitieux mais réalisables grâce au soutien technique et au suivi effectué par des équipes qui se sont constituées en cellules de veille. A charge pour les décideurs d?assurer la constance de la trajectoire vers les objectifs assignés quitte à apporter les correctifs adéquats en cours de chemin. Il s?agit, en premier lieu, de la mise à disposition des moyens nécessaires non seulement au travail de la terre (énergie, logements et routes !), mais à la création d?activités de proximité diversifiées pour attirer et maintenir le maximum de jeunes.Une aventure exaltante qui laisse rêveur, mais au vu des premiers résultats qu?on peut honnêtement palper dès maintenant, on peut dire que cette fois il y a de grandes chances d?être sur la bonne voie.Malgré les maladresses et les malversations qui sont des risques concomitants à toute activité, nous pouvons, avec un minimum d?objectivité, escompter que notre agriculture atteindra un rendement optimum dans un très proche avenir. Le temps que la dure confrontation aux exigences de la terre fasse le tri naturel des véritables paysans d?entre les éventuels intrus et que ce bouleversement soit stabilisé et la décantation faite. Ajouter à cela que les prémices d?une volonté d?évolution des mentalités est en train de faire son bonhomme de chemin. Grâce aux possibilités offertes par la stratégie mise en place graduellement, être paysan, ne se limitera plus au rôle champêtre que nous accolons traditionnellement au seul chef de foyer, mais concerne tous les autres membres de la famille. Chacun d?eux peut devenir un opérateur efficient et se retrouver dans n?importe quel palier ou branche de la sphère agricole: de la fabrication et de la commercialisation des intrants et des équipements nécessaires jusqu?à la transformation et à l?écoulement des produits de la terre avec toutes les activités induites. Structurer le monde agricole en associations de producteurs es spécialité (céréales, agrumes, dattes, fourrage, etc.) pour mieux maîtriser l?information à travers la communication, l?inévitable grand déficit, surtout avec l?environnement.  PNDA : plan national de développement agricolePPDRI : projets de proximité de développement rural intégré



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