La révolte est
pratiquement la même. Partout, la rue est en ébullition, en folie ! Qu'il
s'agisse de Tunis, Le Caire, Damas, Sanaa, Benghazi, Athènes ou d'autres
capitales ou villes encore… La foule, tel un fleuve en crue ou en furie, fait
peur à son monde, à ses gouvernants en priorité.
Ce monde-là
bouge. Il est en effervescence continue, progressive et bien soutenue par une
population qui refuse d'abdiquer, de quitter la rue. Elle en fait d'ailleurs
son propre territoire, sa seule patrie. Les uns sont toujours présents à «Sahat Ettahrir **» pendant que
d'autres gesticulent et occupent nuit et jour l'autre camp appelé «Sahat Ettaabir** *». D'autres
encore ne décolèrent jamais à «Sahat Ettaghiir ****». Tout cela se fait, se conçoit et se
réalise pierre par pierre, jour après jour sous les yeux réprobateurs et
l'attitude de vrais dictateurs de leur gouvernant du haut de leur palais connu
par euphémisme sous le nom de «Sahat Ettadmir *****».
Tous ces jeunes,
bravant la répression, la pauvreté et le jeun, sont conscients de l'enjeu de
leur mouvement et surtout de la portée héroïque de leur action.
Ils ne demandent
pas seulement à ce que des tètes, telles des fruits murs, disparaissent à
jamais ou sautent et tombent, ils exigent plutôt à ce que des régimes
autocratiques changent, des dictateurs partent, des biens publics spoliés ou
soustraits reviennent à la communauté et qu'un nouveau climat de confiance
s'instaure enfin pour que s'installe à jamais une vraie démocratie dans le
pays.
Au sud comme au
nord de la Méditerranée,
le climat politique est chaud, instable et bouleversant parfois. Ainsi, au
printemps arabe difficilement gérable succède cet été grec exécrable. Au
chiffre «zéro» de la fameuse algèbre et des fastidieuses mathématiques répond à
partir de l'autre rive la logique philosophique.
Ici, au sud de
cette même mer, on compte ses morts, on dénombre ses mutilés et ses nombreux
exilés ou potentiels disparus. Là, bien au nord, on est plutôt assez philosophe
devant pareille catastrophe, à l'origine économique qui prend l'allure d'une
véritable révolution politique parée de ses victimes, héros et autre monde qui
court les rues, reçoit des coups ou en donne et brule
tout sur son chemin.
De ce coté-là, on
évoque cette très belle poésie de Abou El Kacem Echabbi, le tout célèbre poète arabe et tunisien, et de
l'autre, on convoque à juste titre d'ailleurs cette autre «vérité» propre à la
formidable philosophie de Platon.
Les deux hommes
hors du commun sont pour l'occasion ressuscités, déterrés et exhumés de leur
tombe et sommeil du juste ou éternel tout juste afin de porter bien secours à
leurs concitoyens, pays et à l'humanité de façon plus générale.
Lorsque les eaux
salées de la Méditerranée
tremblent de l'effet de la colère des pauvres gens, les peuples des pays
installés de part et d'autre de ses deux rives succombent : les uns sous les balles
assassines du régime, les autres, tyrans de leur état, à leur propre façon de
toujours gouverner par la force.
Au nord tout
comme au sud de cette grande bleue, on aura vu des forces de l'ordre battre
leurs victimes et empêcher la foule de publiquement se manifester et exprimer
pacifiquement sa révolte et nombreux courroux à l'égard de ces régimes
dictatoriaux.
Et si ce n'est
l'uniforme porté et arboré par ces mêmes agents de l'ordre et autres forces de
la répression, on aura sans le moindre doute bien cru qu'il s'agissait d'un
seul et même pays face à ses mêmes victimes parmi sa nombreuse population
rebelle.
Cela nous aurait
bien éloignés de la réalité, sans jamais croire un seul instant que la
«solution violente» est également bien présente sur le territoire du vieux
continent, comme parfois «seul remède démocratique» utilisé pour l'occasion.
Logiquement donc,
l'été grec s'inscrit dans le sillage du printemps arabe, né de cet hiver chaud
tunisien.
La Grèce a-t-elle à ce point été contaminée par le
mouvement de révolte continu lui parvenant de ces pays arabes situés sur la
rive opposée de cette mer limpide qui sépare les deux continents ?
Y-a-t-il en vérité un effet de proximité ? La revendication
populaire et citoyenne a-t-elle pour autant carrément changé de territoire et
de continent ? Les autres pays arabes sont-ils à ce point à jamais épargnés
pour ne plus connaitre ces violentes tempêtes de
contestations qui avaient emporté ces dirigeants tyrans, frères et amis de
fortune d'autrefois et d'infortune du moment ?
Et pourquoi la Grèce seulement, avec
probablement l'Espagne et le Portugal, et non pas les autres pays du vieux
continent ?
Aborder la
question ainsi posée au travers de son volet économique peut parfois mener vers
l'impasse tout simplement. Chez les grecs, ces grands philosophes d'antan, la
donne est avant tout d'essence politique. Exactement comme l'est le cas des
pays arabes, faut-il au passage et au besoin bien le confirmer !
A vrai dire, dans
ce même pays, depuis la nuit des temps seuls trois noms bien connus ou familles
«distinguées» ont gouvernés ce pays, vieil empire et ancien bastion de la
philosophie. Dans son ouvrage «Misère de la Kabylie», Albert Camus ne sous-titrait-il pas son
texte au travers de cette expression «la Grèce en haillons !» ? Avait-il alors cette
prémonition que la misère sévissant au sein de ce pays potentiellement très
riche (l'Algérie, en l'occurrence) valait tout juste la caricature de cette
philosophie grecque encore bloquée ou pour toujours accrochée aux temps anciens
?
Tout porte à
croire que l'esprit bien tordu ou très malveillant a, à lui tout seul, empêché
le progrès de s'exprimer, la science de s'imposer, l'économie de se développer
et la jeunesse du pays de pouvoir enfin rêver et surtout de bien communiquer :
au sud de l'Europe comme tout à fait au nord de l'Afrique. Le diagnostic est
donc pratiquement le même : il est toujours question de ces vieilles mentalités
qui bloquent toute initiative salutaire et idée novatrice. La conscience
collective a pour nature de remuer ces anciennes et très mauvaises habitudes de
leurs gouvernants.
Ces peuples-là,
au nord comme au sud de la planète, font désormais la guerre à leurs
dictateurs, avec comme seule arme cet espoir d'instaurer au plus vite des
régimes démocratiques.
A ce titre et pour la même cause, la Grèce rejoint ces
paresseux pays arabes pour s'asseoir cote à cote sur le même palier et le même
brasier.
Ils sont tous
dans le même panier : ils disent ou prédisent se défaire de leurs dictateurs.
Leur seul terrain de bataille : la rue. Leur seul slogan : «Echaab
yourid iskat ennidham !» (Le peuple veut se débarrasser du régime !).
Et ni l'Europe
unie n'a pu sauver la
Grèce de son naufrage annoncé, ni l'instrumentalisation à
dessein de la religion pour ces souverains arabes n'a pu faire d'eux des «califs» éternels !
L'heure des
réformes et du changement a bel et bien sonné. Le temps accordé à la longue
récréation est déjà écoulé. Les choses sérieuses ont donc commencé.
Moubarak est
enfin passé par cette justice de l'homme qui lui obéissait encore hier au doigt
et à l'Å“il. Ben Ali lui emboitera le pas d'ici peu,
lui succédant au travers de ces marches de la fausse gloire et vraie infortune
et déboire gouvernementale. A qui le tour demain… ? Serait-ce celui de Ali Abdellah Salah, El Assad, El
Kadhafi ou encore celui de tous les tyrans arabes qui passeront, en bloc ou à
tour de rôle, à la trappe ?
Une page
d'histoire est déjà tournée. Une autre est sur le point de s'ouvrir. Déjà, au
loin, on y voit nous parvenir au trot ces bribes de la démocratie… !
Note :
(*) Auteur
(**) Place de la
liberté (de la rédaction)
(***) Place de
l'expression
(****) Place du
changement
(*****) Place de
la destruction
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Posté Le : 23/06/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Slemnia Bendaoud*
Source : www.lequotidien-oran.com