Algerie - Ecologie

Planète - Essentiels et méconnus, les champignons sont menacés d’extinction


Planète - Essentiels et méconnus, les champignons sont menacés d’extinction
411 espèces de champignons sont menacées d’extinction mais ce chiffre et largement sous-estimé. Et, malgré la perte de 90 % des champignons des prairies et pelouses en 70 ans, ils ne bénéficient d’aucune protection.

Les champignons disparaissent en silence. Sur les 150.000 espèces connues dans le monde, seules 1.300 ont pu être répertoriées sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Parmi eux, 411 sont menacées d’extinction.

«Un effort significatif a été fait pour explorer un groupe quasiment pas couvert jusque-là, dit Florian Kirchner, responsable du programme Espèces à l’UICN France. C’est un petit pas, mais qui est remarquable». On sait désormais que le bolet rubis, le bolet de plomb, le lactaire des saules réticulés et le lactaire mamelonné des tourbières sont des espèces menacées en France. Un constat encore bien maigre face aux 2,5 millions d’espèces de champignons estimées sur la planète, et non répertoriées.

Ni plantes ni animaux, les champignons sont des êtres vivants formant leur propre règne. Et ils ne se résument pas à un pied et un chapeau. Ce que nous voyons, quand nous nous promenons, est en fait la fructification du champignon. L’essentiel se passe dans le sol, par un réseau de filaments (le mycélium) qui peut produire un appareil reproducteur, la fameuse fructification du champignon que nous consommons quand ils ne sont pas toxiques.

.Lire aussi: Kit de chimiste, loupe et boussole: vadrouille avec des experts en champignons (A lire sur site ci-dessous)

Contrairement aux oiseaux, aux mammifères ou à certains insectes comme les papillons, les champignons sont sous-étudiés. En cause: le manque de financement, de structuration de la connaissance, de données scientifiques et de formation en mycologie — la science étudiant les champignons. Il existe bien des mycologues amateurs. Mais «la mycologie n’est pas une science facile d’accès», explique Hervé Cochard, président de la Société mycologique de France et directeur de recherche à l’Inrae. L’étude des champignons au microscope et l’absence d’un ouvrage recensant toutes les espèces rendent la tâche compliquée.

C’est la raison pour laquelle seulement 1.300 espèces de champignons ont été répertoriées par l’UICN. «Il ne faut pas rester uniquement centré sur les animaux et les plantes. Dans l’écosystème, tout le monde a son rôle», souligne Marc-André Selosse, professeur au Muséum national d’histoire naturelle et mycologue.

- Un rôle crucial pour nos forêts

«Sans les champignons, on ne connaîtrait pas les forêts telles qu’elles sont aujourd’hui», dit Florian Kirchner. Ces derniers vivent en symbiose avec les arbres: les champignons apportent de l’eau et des sels minéraux, protègent les arbres contre les maladies et les sécheresses. En échange, les arbres leur fournissent des sucres issus de la photosynthèse. La santé des forêts dépend de leur présence.

. Le bolet de plomb fait partie des espèces menacées en France. Wikimedia Commons/CC BY-SA 3.0/Max Danz (Voir photo sur site ci-dessous)

Les champignons concourent à la vitalité de nos écosystèmes en décomposant la matière organique morte. Ils sont d’ailleurs les seuls à pouvoir dégrader certains végétaux. Les champignons parasites, souvent perçus négativement, permettent de réguler les populations. «Pour la nature, tout est bon. Le jugement d’une valeur ou d’une autre est issu d’une vision anthropocentrée», rappelle Yann Sellier, mycologue et responsable scientifique à la réserve naturelle nationale du Pinail (Vienne).

En plus de leur rôle pour les écosystèmes, les champignons sont riches en molécules utilisées dans la production de certains de nos médicaments. Autant de raisons rendant nécessaire leur protection. Pourtant, ils ne font l’objet d’aucun programme de conservation.

- Aucun statut «espèce protégée»

Destruction des habitats liée à une mauvaise exploitation forestière, urbanisation, utilisation de produits phytosanitaires, changement climatique avec l’augmentation des sécheresses et des incendies...

«On a perdu 90 % des champignons des prairies et pelouses en Europe de l’Ouest, sur ces 70 dernières années, dit Yann Sellier. Ce n’est pas encore ancré dans nos esprits que les champignons, les algues, certaines mousses sont aussi des espèces menacées par l’activité humaine.»

Pour Florian Kirchner, la liste rouge de l’UICN sur les risques d’extinction est un premier constat «qui doit permettre d’identifier des priorités et d’engager des actions». En France, une liste pour conférer à certains champignons un statut d’«espèce protégée» est en cours d’élaboration, menée par le ministère de la Transition écologique. Yann Sellier espère qu’elle aboutira, mais reste réaliste: «On ne sait pas quel sera le destin de cette liste. Sa mise en place nécessite une volonté politique.»

Photo: L'espèce «Hygrocybe intermedia» est classée comme «vulnérable». - Wikimedia Commons/CC BY-SA 2.0/Lukas

Pour accéder et lire l'article en annexe et illustration ci-dessus: https://reporterre.net/Essentiels-et-meconnus-les-champignons-sont-menaces-d-extinction

Par Annabel Martinez-Canavy

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