Algérie

Naïnaâ, Mimi et leurs pairs à l?honneur



Cette année, contrairement à l?an passé, les autorités locales étaient là. Les artistes, très sensibles à ce type de présence en leur journée nationale, étaient ravis de l?intérêt des représentants de l?Etat. Ils étaient heureux, particulièrement ceux qui ont raccroché depuis des lustres et chez lesquels toute marque d?attention réveille les émois d?un narcissisme qu?ils ont appris à étouffer la mort dans l?âme. Parmi les premiers, il y avait Benchagra Abdelkader dit Naïnâa à Hammam Bou Hadjar. 75 ans, bon pied, bon ?il, « avec encore toutes mes dents, même les molaires », il demeure aussi vert et boute-en-train qu?il a toujours été. Il n?y a en lui que le blanc de ses cheveux, surtout celui de ses sourcils qui rappelle son âge. Benchagra est également un moudjahed comme on peut aimer. Victime de la répression coloniale pour activité nationaliste, et après une condamnation dont il purge la peine à Béthioua, il est cueilli à la sorti de prison pour se retrouver dans un camp d?internement à Bossuet (Sidi Bel Abbès) et traîner, de 1957 à 1960, d?un camp à l?autre. Parce considéré « tête dure », il est transféré au camp de Paul Cazelles (Aflou), celui où l?on regroupe les irréductibles. Ils sont 1 700 et, parmi eux, il y avait Hassan El Hassani. Celui-ci le recrute comme comédien pour avoir fait du théâtre, enfin du théâtre sketch, au sein des scouts. Hassan Hassani, l?artiste militant du mouvement national, s?était donné pour mission de maintenir la mobilisation nationaliste par le biais de ce qu?il sait faire le mieux : le 4e art. Abdelkader est ainsi distribué dans « Hier, aujourd?hui et demain », évocation directe de l?hier dans l?impuissance sous le joug colonial, puis de l?aujourd?hui de la lutte de libération et des futurs lendemains de l?indépendance. « Qui pouvait censurer ? Les gardes-chiourmes gardaient alentours, pour le reste, on gérait le reste nous-mêmes. On répétait dans les chambrées et, lors de la représentation, il n?avait pas intérêt quiconque à faire le mouchard ». A l?indépendance et jusqu?en 1966, Benchagra s?investit dans l?activité théâtrale amateur à Hammam Bou Hadjar. Il prendra pour personnage Naïnâa, celui du paysan naïf qu?avait créé celui qui deviendra Boubagra. Mercredi, il était une quinzaine d?autres artistes honorés, il n?est pas possible de les citer tous. Signalons, cependant, quatre autres. Il y a Abdelkrim Bouteflika, musicien, interprète et chef d?un orchestre d?andalou. Artiste que la modestie étouffe, très proche parent du Président, il n?a jamais tiré la couverture à lui pour tirer profit de son illustre nom. Il y a encore Mimi T?mouchenti, celui dont les tubes et son inoubliable « Rani nadem ala lyam » ont été repris par feu Hasni et Khaled. Depuis quelques années, Mouffok Boumédienne s?est éclipsé de la scène. Il y avait également le sympathique Touil Mourad, celui qui sait tirer comme peu de déchirants lamentos de sa flûte. Enfin, il y avait Baroudi Rouba, celui dont la voix cristalline chante merveilleusement les mouachahate sous le mode du tragique ou de la volupté. Mercredi, c?était fête pour les artistes. Dommage que leurs confrères fêtés les années passées n?étaient pas là également. Attendaient-ils une invitation pour venir à la maison de la culture ?
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