Algérie

Les mots qui tuent



Les derniers développements des rapports de force entre gouvernés et gouvernants font apparaître quelques axiomes incontournables ; d?un côté les mots seraient des armes de destruction massive et chaque virgule mal placée une atteinte à corps constitué entraînant une cascade de procédures judiciaires. Pendant que, de l?autre, tout serait permis, de dire n?importe quoi et son contraire et même d?insulter son peuple et son histoire. Mais si, au bout de la plume, il y a la lourde sanction, au bout du raï, il y a la sombre prison. Pour cheb Azzedine, qui vient d?être condamné à 12 mois de prison ferme pour une chanson, il y a de quoi oublier pour un instant le nombrilisme de la presse écrite et l?acharnement judiciaire d?une poignée de vengeurs masqués agissant au nom d?une conception psychorigide de la lecture. Dans son dernier album, Chouf el hogra, la star chélifienne s?est 60000emportée, s?organisant une manifestation à lui tout seul et s?adonnant à l?émeute vocale, selon l?appréciation du juge. S?en prenant au wali et au maire sans toutefois donner de nom, Azzedine n?a pourtant fait que chanter ce que tout le monde dit déjà, à savoir que les pouvoirs publics sont tout sauf publics, agissant souvent au nom d?intérêts privés. Si, d?un côté, on aimerait bien que les autorités aiment un peu plus leur peuple et arrêtent de le traiter comme un enfant que l?on bat avant même qu?il ne fasse une bêtise, on aimerait aussi voir se déployer pour cheb Azzedine la même mobilisation que pour un journaliste, un syndicaliste ou un responsable des droits de l?homme. Mettre un chanteur de raï en prison pour une chanson est aussi absurde que de mettre en cage tous ceux qui ont écouté la K7 de cheb Azzedine. Que se passe-t-il dans ce pays qui vient de fêter sans panache le 43e anniversaire du recouvrement de sa liberté ?
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