Algérie

Les mille et une nuits



Histoire d’Aboulhassan Ali Ebn Becar et de Schemselnihar, favorite du calife Haroun Al-Raschid CLVe nuit Quand le prince de Perse et Ebn Thaher eurent entendu ces paroles, ils changèrent de couleur et commencèrent à trembler, comme si leur perte eût été assurée. Mais Schemselnihar, qui s’en aperçut, les rassura par un soupir. Elle chargea l’esclave sa confidente d’aller entretenir Mesrour et les deux autres officiers du calife, jusqu’à ce qu’elle se fût mise en état de les recevoir et qu’elle lui fît dire de les amener. Aussitôt, elle donna ordre qu’on fermât toutes les fenêtres du salon et qu’on abaissât les toiles peintes qui étaient du côté du jardin7; et, après avoir assuré le prince et Ebn Thaher qu’ils y pouvaient demeurer sans crainte, elle sortit par la porte qui donnait sur le jardin, qu’elle tira et ferma sur eux. Mais quelque assurance qu’elle leur eût donnée de leur sûreté, ils ne se laissèrent pas de sentir les plus vives alarmes pendant tout le temps qu’ils furent seuls. Dès que Schemselnihar fut dans le jardin avec les femmes qui l’avaient suivie, elle fit emporter les sièges qui avaient servi aux femmes qui jouaient des instruments près de la fenêtre d’où le prince de Perse et Ebn Thaher les avaient entendus; et lorsqu’elle vit les choses dans l’état qu’elle souhaitait, elle s’assit sur son trône d’argent. Alors elle envoya avertir l’esclave sa confidente d’amener le chef des eunuques et les deux officiers ses subalternes. Ils parurent, suivis de vingt eunuques noirs, tous proprement habillés, avec le sabre au côté, avec une ceinture d’or large de quatre doigts. De si loin qu’ils aperçurent la favorite Schemselnihar, ils lui firent une profonde révérence, qu’elle leur rendit de dessus son trône. Quand ils furent plus avancés, elle se leva et alla au devant de Mesrour, qui marchait le premier. Elle lui demanda quelle nouvelle il apportait; il lui répondit: «Madame, le commandeur des croyants, qui m’envoie vers vous, m’a chargé de vous témoigner qu’il ne peut vivre plus longtemps sans vous voir. Il a dessein de venir vous rendre visite cette nuit; je viens vous en avertir, pour vous préparer à le recevoir. Il espère, madame, que vous le verrez avec autant de plaisir qu’il a d’impatience d’être à vous». A ce discours de Mesrour, la favorite Schemselnihar se prosterna contre terre, pour marquer la soumission avec laquelle elle recevait l’ordre du calife. Lorsqu’elle se fut relevée: «Je vous prie, lui dit-elle, de dire au commandeur des croyants que je ferai toujours gloire d’exécuter les commandements de Sa Majesté, et que son esclave s’efforcera de la recevoir avec tout le respect qui lui est dû». En même temps, elle ordonna à l’esclave sa confidente de faire mettre le palais en état de recevoir le calife, par les femmes noires destinées à ce ministère. Puis, congédiant le chef des eunuques: «Vous voyez, lui dit-elle, qu’il faudra quelque temps pour préparer toutes choses. Faites en sorte, je vous en supplie, qu’il se donne un peu de patience, afin qu’à son arrivée il ne nous trouve pas dans le désordre». A suivre...
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