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Les collines oubliées



Les collines oubliées
Intéressants concours de coïncidences - et de recoupements aussi - en ce dix-neuvième salon du livre. Les organisateurs de cette manifestationchoisissent le moment du déroulement sur la base de paramètres assez rationnels et l'opinion publique dans son ensemble ne trouve jusque-là rien à en redire. La proximité des fêtes religieuses, la fête du Sacrifice encore dans l'esprit et de l'Achoura, dans la période de laquelle le pratiquant s'acquitte de l'Offrande - la Zakat - la période scolaire et la disponibilité de deux week-ends durant les dix jours de la manifestation, la date fixée estimée par rapport au calendrier international des grands salons de réputation, sauf que celui de Beyrouth, du livre francophone, se déroule simultanément, mais surtout la célébration du soixantième anniversaire de la Guerre de libération nationale. Et il se trouve qu'en ce mois d'octobre, presque au jour choisi pour l'inauguration, les générations se souviennent de la disparition il y a un quart de siècle de l'auteur de Nedjma. Un roman paru en pleine Guerre de libération, qui raconte l'histoire de remous passionnels autour d'une amante et d'une patrie, un récit qui traite de la femme-nation. Un livre publié en 1956 et qui continu de susciter la curiosité des férus de littérature, conciliant le bien fondé de la formulation de l'esthétique par rapport aux tourments de l'histoire. Et le sujet ici, dans le souci de sérier dans les évènements propices à la relation au livre et à l'histoire, est la formidable épopée d'une révolte populaire, traduite dans les divers témoignages, entendus ou lus surtout.Sur la foi de quoi une bonne partie de l'opinion publique, en attente de cet important et prestigieux évènement, ne comprend pas pourquoi les mêmes responsables ne projettent-ils aucune allusion à Kateb Yacine, décédé exactement le 28 octobre 1989, à l'âge de soixante ans, ou encore à Mouloud Mammeri, mort quelques mois auparavant dans un accident de la route de retour du Maroc après avoir assisté à un colloque international sur l'amazighité. Auteur de multiples publications, entre essais critiques, ouvrages didactiques, pièces de théâtre, nouvelles et quatre romans, dont l'Opium et le bâton, qui raconte les affres de la guerre d'Algérie dans un village de la haute Kabylie Deux écrivains algériens d'expression française qui ont marqué la vie culturelle en Algérie, dans l'ensemble du Maghreb aussi, et qui ont inscrit une empreinte indélébile dans la pensée universelle à propos de l'histoire du combat contre l'ordre colonial et la volonté des communautés humaines à s'affranchir de l'acculturation et d'aller à la quête de leurs origines.Dans la tradition des salons du livre, partout dans le monde, on invite un pays pour un mérite civilisationnel ou un autre, comme l'année dernière la Belgique, parce qu'il s'agit d'une nation qui aénormément contribué à la sauvegarde du livre et à la promotion de l'édition -cette année, on invite les Etats-Unis, qui réalisent des prodiges, entre autres pour transformer la littérature en cinéma. On sollicite un écrivain pour son rôle joué dans l'avancée d'un courant de pensé positif. Certains font appel aux auteurs de la génération nouvelle afin d'ancrer l'intérêt dans les meilleures vertus du devenir culturel et inciter à l'innovation.Mais il y a la part de la mémoire. Ce patrimoine solennel qui ne pardonne aucune omission et qui condamne les partis pris. Proposer dans le programme Belkacem Saadalah, c'est extraordinaire comme devoir de reconnaissance, quand il s'agit de ne pas oublier Mahfoud Kheddache ou Mohamed Harbi, encore vivant. Remettre à jour Emmanuel Roblès et Jean-Louis Hurst, c'est indiscutablement conforme à la vision mnémonique nationale, mais inventer le silence sur Kateb et Mammeri, ce n'est vraiment pas sérieux. N. B.


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