Algérie - A la une

La mobilisation qui fait reculer la censure



Vendredi, au journal du 19h, la radio Chaîne III a consacré sept minutes à une couverture complète de la mobilisation citoyenne contre le régime, dans plusieurs wilayas. Les journalistes, déployés sur le terrain, ont répercuté les effets de l'affluence, les revendications des manifestants et leurs slogans sans les déformer ou les manipuler. La radio internationale, la Chaîne II et Jil FM ont également diffusé, aux différents flashs d'info, des comptes rendus corrects, sans fioritures certes, mais sans manquement à l'éthique non plus. La radio régionale de Tizi Ouzou a fait plusieurs directs sur l'imposante marche dans la ville des Genêts. Dans la soirée, les réseaux sociaux se sont enthousiasmés sur la propension des personnels d'antenne (journalistes, animateurs, réalisateurs?) de la radio nationale à rendre au service public ses lettres de noblesse au moment où les chaînes de télévision, publiques et privées, ainsi que de nombreux titres de la presse écrite alimentent la contre-révolution par des débats à sens unique et une propagande outrancière du scrutin présidentiel du 12 décembre. Les deux marches hebdomadaires des étudiants et des citoyens, les arrestations arbitraires, les atteintes à la liberté d'expression et d'opinion? sont soumises tacitement à la loi de l'omerta. Sur facebook et twitter notamment, les Algériens n'ont pas manqué de fustiger les organes de presse "qui font des directs sur un incendie banal" ou "diffusent l'intégralité du face-à-face entre les deux candidats à la présidentielle tunisienne", mais ignorent "les millions d'Algériens dans la rue contre l'élection et contre le régime". Edifiés depuis de nombreux mois sur l'ostracisme qui frappe les médias, lourds principalement, les citoyens ont fortement relevé la performance des radios nationales. En réalité, c'est là le fruit d'un combat mené à tour de bras par les travailleurs de ces entreprises, depuis l'émergence de l'insurrection populaire le 22 février dernier. Au gré des rassemblements, des lettres adressées à leurs directions, jusqu'à la menace d'une grève illimitée exprimée la semaine dernière, ils ont reconquis la liberté de couvrir, sans restriction, les actions de la révolution et de répercuter fidèlement les échos de la rue. Le Collectif de la radio pour le service public, qui compte actuellement une centaine d'adhérents, est constamment en alerte, selon les confrères avec lesquels nous avons pris attache hier. Il exige de la hiérarchie rédactionnelle de consigner par écrit la moindre décision de censure des événements liés au mouvement populaire ou autres ou à l'orientation de l'information de manière à consolider l'hégémonie du régime. "Notre radio n'est la chasse gardée d'aucun pouvoir, mais est au service public exclusif", ont-ils réitéré, précisant que le collectif s'engage à se solidariser et à défendre spontanément tout travailleur sanctionné directement ou implicitement pour avoir exercé convenablement son métier. Pour l'heure, les quelques journalistes et assimilés des chaînes de télévision, qui sont dans cette optique, sont stigmatisés et par leurs collègues et par leurs supérieurs hiérarchiques.
Souhila Hammadi
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