Algérie

La conception pédagogique chez Ibn Khaldoun


La conception pédagogique chez Ibn Khaldoun Tous les habitus, nous dit Ibn Khaldoun, sont nécessairement corporels. Cela veut dire, pour lui, que l’habitus est quelque chose que l’âme ne peut acquérir que par les sens, par opposition à un autre type de connaissance, propre aux prophètes et aux mystiques et qui ne s’obtient que grâce à la contemplation par l’âme de sa propre essence. Cela concerne aussi bien les aptitudes physiques que les aptitudes intellectuelles, à commencer par le fait même de penser. La formation d’un habitus requiert au départ une répétition continue jusqu’à la fixation de sa forme.Pour avoir le maximum d’efficacité, celle-ci doit être pratique, élaborée à l’exemple des modèles les plus parfaits et avec le concours des meilleurs maîtres, de préférence suivant des méthodes d’observation directe. Ibn Khaldoun pense que l’âme n’à qu’une réceptivité assez limitée. Tout d’abord, elle ne peut pas recevoir plusieurs «teintures» à la fois; ensuite, quand elle en reçoit une, sa capacité à en accueillir d’autres diminue progressivement. La formation doit donc intervenir dès l’âge le plus tendre, quand l’âme est encore vierge, «car les premières choses à s’imprimer dans les coeurs sont comme des fondations pour les habitus; et l’édifice vaut ce que valent ses fondations.» Le choix du contenu du premier enseignement a, par conséquent, une importance déterminante. Par ailleurs, aussi bien dans le domaine des arts que dans celui des sciences, Ibn Khaldoun déconseille formellement d’enseigner plus d’une spécialité à la fois. D’ailleurs, remarque-t-il, les faits d’observation nous montrent qu’«il est rare de trouver une personne habile dans un art qui soit capable d’exceller ensuite dans un autre art et au même degré».Ibn Khaldoun signale un autre important facteur dans la formation des habitus, celui de l’autorité. Une attitude trop sévère des maîtres a les conséquences les plus néfastes, surtout pour les jeunes enfants. Il rappelle à ce propos la situation des esclaves et des serviteurs, et aussi celle des nations opprimées. La contrainte et l’oppression brisent le caractère, briment les énergies, et finissent par détruire chez ceux qui la subissent la capacité de réaliser «leur fin et leur pleine humanité». Il prône donc un usage modéré de l’autorité et des châtiments, prenant en considération la personnalité de l’étudiant et le souci de l’«instruire sans l’affliger et tuer son esprit». En définitive, les habitus peuvent être bons ou mauvais; ils peuvent revêtir la forme de la vertu ou du vice, du bien ou du mal, du bon ou du mauvais goût, du raffinement ou de la rudesse, de la clarté et de la rigueur ou de la confusion. Ils comportent aussi des degrés en raison de la qualité de l’enseignement et des modèles imités, ainsi que du niveau général du développement de la civilisation. Méthodes et contenus C’est en partant de son concept d’habitus qu’Ibn Khaldoun pose le problème de l’enseignement des sciences. Pour maîtriser une discipline quelconque et la posséder à fond, il faut, dit-il, acquérir «un habitus permettant d’en cerner les principes et les règles, d’en connaître à fond les problèmes et des principes tirer les questions secondaires». La formation d’un tel habitus exige une démarche rigoureuse où il faut prendre en considération d’un côté, la «réceptivité» de l’étudiant et son pouvoir d’assimilation, et de l’autre, la quantité d’informations et le degré de complexité de la matière à enseigner. Ibn Khaldoun estime que l’ensemble du processus doit se dérouler en trois étapes progressives, dont il prend soin de définir les objectifs et les moyens. La première est une étape préparatoire. Elle a pour objectif de familiariser l’étudiant avec la discipline enseignée et de le préparer à en saisir les problèmes. À ce stade, on se contente donc de donner une vue d’ensemble de la discipline, en insistant sur les points principaux. Les explications doivent être simples et générales et tenir compte des aptitudes de l’étudiant à comprendre et à assimiler. La deuxième étape est celle de l’approfondissement. On doit y «faire le tour» de la discipline en sortant des généralités. Les explications et les commentaires doivent être exhaustifs et tous les points de vue divergents seront exposés.   A suivre... Abdesselam Cheddadi
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