Algérie

L’Emir Khaled




Premier nationaliste et premier patriote (5ème partie) Des agglomérations importantes sont dépourvues de tout. Comme au temps d’Abraham on y puise l’eau avec des peaux de boucs, dans des citernes ou des puits à ciel ouvert. C’est ainsi qu’en tout et pour tout, la part des plus nombreux est la plus faible et la charge des plus pauvres est la plus forte. Sous un régime dit républicain, la majeure partie de la population est régie par des lois spéciales qui feraient honte aux barbares eux-mêmes. Et ce qui est typique, c’est que certaines de ces lois qui instituent des tribunaux d’exception (tribunaux répressifs et cours criminelles) datent des 29 mars 1902 et 30 décembre 1902. On peut voir là un exemple de la marche régressive vers les libertés. Pour que nous ne soyons pas taxés d’exagération, nous joignons à cette requête deux brochures écrites par deux Français d’Algérie: MM. François Marneur, avocat à la cour d’appel d’Alger et Charles Michel, conseiller général et maire de Tébessa. Elles sont édifiantes sur l’odieuse injustice de ces lois. Un autre exemple démontrera la violation de la parole donnée; le voici: Avant 1912, les troupes indigènes étaient recrutées par voie d’engagement volontaire moyennant quelques avantages offerts aux engagés. Ces avantages furent supprimés progressivement et on arriva, en 1912, à la conscription obligatoire, d’abord partielle (10% du contingent) ensuite totale et cela malgré les énergiques protestations des Indigènes. L’impôt du sang nous a été appliqué en violation des principes les plus élémentaires de la justice. Appauvris, asservis et avilis par le droit du plus fort, nous n’avions jamais pu croire cependant qu’une pareille charge, réservée aux seuls citoyens français, jouissant de tous les droits, viendrait un jour peser sur nos épaules. Des centaines de milliers des nôtres sont tombés aux différents champs de bataille, luttant malgré eux contre des peuples qui n’en voulaient ni à leur vie ni à leurs biens. Les veuves, les orphelins et les mutilés de cette guerre ont des traitements ou des subsides inférieurs même à ceux des néo-français. Beaucoup de blessés, incapables de tout travail, viennent grossir les rangs des malheureux qui pullulent dans les villes et les campagnes. Il est bien facile à l’observateur impartial de constater la grande misère des Indigènes. A Alger même, des centaines d’enfants des deux sexes, déguenillés et rachitiques, traînent leur misère dans les rues en sollicitant la charité publique. En présence de ces faits navrants, le Gouvernement général de l’Algérie reste absolument indifférent. Sous le fallacieux prétexte de ne pas porter atteinte à la liberté, les mœurs se sont complètement relâchées et les boissons alcoolisées sont servies à profusion aux Indigènes dans les cafés. En vaincus résignés, nous avons supporté tous ces malheurs en espérant des jours meilleurs. La déclaration solennelle suivante: «aucun peuple ne peut être contraint de vivre sous une souveraineté qu’il répudie» faite par vous en mai 1917, dans votre message à la Russie, nous laisse espérer que ces jours sont enfin venus. Mais, sous la tutelle draconienne de l’administration algérienne, les Indigènes sont arrivés à un degré d’asservissement tel qu’ils sont devenus incapables de récriminer: la crainte d’une répression impitoyable ferme toutes les bouches. Malgré cela, nous venons, au nom de nos compatriotes, faire appel aux nobles sentiments de l’honorable Président de la Libre Amérique: nous demandons l’envoi de délégués choisis librement par nous pour décider de notre sort futur, sous l’égide de la Société Des Nations. Vos 14 conditions de paix mondiale, monsieur le Président, acceptées par les alliés et les puissances centrales, doivent servir de base à l’affranchissement de tous les petits peuples opprimés, sans distinction de race ni de religion. Vous représentez au nom du monde entier le digne porte-drapeau du droit et de la justice. Vous n’êtes entré dans cette guerre gigantesque que pour les étendre à tous les peuples. Nous avons une foi ardente en votre parole sacrée. Cette requête est faite pour éclairer votre religion et attirer votre bienveillante attention sur notre situation de parias. Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’assurance de notre haute considération. (Mai 1919)   A suivre... Par le Dr Chemyl Boutaleb El-Hassani(*) (*)Arrière petit-fils de l’Emir Khaled


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