Algérie

Introduction à la connaissance du droit de l'urbanisme en Algérie



«Les différents États n'ont guère manifesté d'originalité dans la création de leur droit de l'urbanisme, alors qu'ils pouvaient avoir des traditions urbaines et locales très différentes». (Arlette Heymann - Doat). Le premier texte qui a introduit les règles d'urbanisme en Algérie est le décret du 5 janvier 1922. Ce texte avait été pris en application de la loi du 14 mars 1919, dite « loi Cornudet », qui avait institué pour la première fois en France, au lendemain de la « Grande Guerre », les règles d'aménagement, d'embellissement et d'extension. Le droit de l'urbanisme est apparu, pratiquement, dans le même temps en métropole et en Algérie. C'était la seule colonie à avoir été érigée en département français tombant ainsi sous le coup des textes régissant l'urbanisme en France, après qu'ils aient été réaménagés pour les adapter aux réalités de l'Algérie. En effet, « Une loi n'était applicable au territoire algérien que si elle était expressément déclarée telle par le parlement ou si elle était spécialement édictée pour l'Algérie : c'était le principe dit de la spécialité législative selon lequel les lois métropolitaines avaient besoin d'être adaptées aux conditions locales (1)». La législation française conçue dans le contexte de l'entre-deux guerres pour répondre à l'objectif de reconstruction des villes du Nord et de l'Est, ne s'adaptait pas à l'Algérie, selon le rapport général du plan de Constantine (1958) et devait être réajustée pour prendre en charge les spécificités de ce pays : « Les textes métropolitains ne répondent d'ailleurs qu'imparfaitement à la situation particulière de l'Algérie. Elle n'est pas celle d'un pays à progression démographique lente où les ajustements peuvent être opérés insensiblement, ni non plus celle d'un pays neuf où l'on peut tailler à vif dans la terre vierge. En Algérie, la poussée urbaine est rapide ; elle se produit en outre dans des zones où toutes les terres sont appropriées et comptent le plus souvent parmi les meilleures terres agricoles. Des textes propres à l'Algérie seront sans aucun doute nécessaires pour bloquer la spéculation foncière et lutter contre l'anarchie des implantations ». La loi n° 55-900 du 7 juillet 1955 introduisait, à la fois, l'ensemble des textes relatifs à l'urbanisme dans les territoires de l'Algérie, créait la section algérienne du Comité national d'urbanisme et déléguait au représentant de la France les pouvoirs dévolus au président du Conseil et aux ministres en matière d'urbanisme. Les derniers textes français ont été introduits par les décrets du 6 septembre 1960, après avoir fait l'objet de modifications pour les appliquer à la situation algérienne. En 1962, une ordonnance reconduit la législation coloniale liant durablement le droit algérien au droit français. Cette décision, prise dans un contexte d'après-guerre et en dépit de son annulation en 1973, ne sera pas sans conséquences sur l'évolution du droit de l'urbanisme en Algérie. C'est ainsi que la reconduction du droit colonial d'essence libérale puis son « algérianisation » allait heurter, tout au moins, dans sa forme « le caractère démocratique et populaire » de l'État algérien qui se démarquait « de toute conception féodale comme de toute conception bourgeoise libérale » (Discours du président H. Boumédiène lors du 20ème anniversaire de l'ENA, le 22 juin 1974). En 1977, un ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme a été créé, pour se voir confier « la mise en oeuvre de la politique nationale en matière d'urbanisme ». La période qui correspond à la fin de l'ordonnance de 1962 voit l'émergence des premiers textes sur la gestion foncière faisant référence à la Constitution algérienne de 1976. Ce fut l'avènement des « années ZHUN (2)» durant lesquelles l'État, dopé par d'importants afflux financiers, entamait la réalisation de grands ensembles d'habitat. Ces programmes massifs qui apportaient une réponse quantitative à la crise du logement ont été conduits sans préoccupation de la qualité architecturale et du respect des prescriptions urbanistiques (3). Le retard enregistré en matière d'études et de recherches, a différé l'émergence d'une réflexion critique sur l'état de notre droit de l'urbanisme. Et, comme autre conséquence de ce retard, c'est l'Administration qui finit par envahir « le terrain », élaborant et interprétant les règles qui régissent l'urbanisme sans que personne n'ose lui disputer cette prérogative qu'elle s'est octroyée face au désert ambiant. Il est alors indéniable que l'Administration a grandement contribué à l'état de déliquescence dans lequel se trouve aujourd'hui les villes. Plus que dans d'autres domaines le rôle de l'Administration s'inscrit ici dans une forte logique interventionniste. Elle est omniprésente : elle conçoit, elle légifère, elle gère, elle contrôle. « Cela fait beaucoup de missions à la fois et cela a conduit à une situation de sclérose intellectuelle où l'initiative et la créativité étaient pratiquement du domaine de l'interdit. Les bureaux d'études étaient menés au pas de charge, c'était la course contre la pénurie sans prendre conscience que la véritable pénurie dans l'affaire était une pénurie de réflexion... », (H. Ougouadfel, Revue d'architecture et d'urbanisme). L'Administration s'impose dès lors comme l'unique concepteur et producteur de la législation et de la réglementation de l'urbanisme qui sont hermétiques au grand public. Les deux lois de 1990 sur l'orientation foncière et l'aménagement et l'urbanisme ne sont que « l'acclimatation » de la loi française d'orientation foncière (LOF) du 30 décembre 1967. L'Administration algérienne a « normalisé » la démarche qui a prévalu durant la colonisation et qui « contaminera » des textes élaborés plus récemment (lois relatives à l'environnement, au littoral et à la protection des zones de montagne...). La loi n° 90-29 du 1er décembre 1990 a été l'objet de critiques : « À la lecture des textes sur les PDAU et les POS, l'impression qui s'en dégage est que les rédacteurs de ces textes savent plus ou moins ce qu'il ne faut plus faire mais ne savent pas encore ce qu'il faut faire. Il semble que ces rédacteurs n'ont pas véritablement de projets urbains, d'où une absence de définition du contenu des plans, que ce soit pour les PDAU ou les POS. » (Revue d'architecture et d'urbanisme, p. 54). Nourredine Moussa, ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme a également relevé tout récemment, « le manque de fiabilité de ces plans d'urbanisme directeurs, pour la plupart élaborés durant la décennie 1990 », (El Watan du 07 novembre 2007). En l'inscrivant dans l'évolution du droit de l'urbanisme français, les pouvoirs publics algériens n'ont pas fait oeuvre d'originalité en matière de doctrine, éloignant de façon irrémédiable la construction d'un droit algérien de l'urbanisme. Car, aujourd'hui encore, on semble peu se préoccuper de la nécessité d'élaborer un droit « autonome » de l'urbanisme. Les textes en vigueur restent marqués des défauts de l'ancienne législation française (absence de codification, caractère ponctuel, manque d'effectivité) et qui sont abordés de manière récurrente dans le discours officiel mais sans que les propositions de solutions toujours avancées ne soient mises en oeuvre. Les raisons sont multiples tant l'urbanisme se trouve à la jonction d'intérêts divergents et donc de rapports de force sociaux (politiques ?). Les années 80 et 90 seront les années du « laisser faire, laisser-aller ». Les centres étant depuis longtemps saturés, la spéculation a envahi les périphéries qui deviennent en l'espace de quelques années « de véritables villes «hors la loi», avec leur lot de constructions anarchiques et illicites érigées sous l'oeil laxiste, complaisant, voire complice des responsables locaux, élus et agents de l'État », (Abdelkader Bounekraf, ancien ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme). Il ajoutera que « ces ensembles urbains sont marqués par un sous-équipement chronique, un aménagement insuffisant et des viabilités quasiment inexistantes, (qui en font) les meilleurs terreaux de l'exclusion, de la haine et, partant, de la criminalité sous toutes ses formes ». Face à l'ampleur des dégâts irréversibles causés aux tissus urbains et à l'incapacité des pouvoirs publics à renverser la tendance, on évoque l'idée d'une « amnistie urbanistique » (El Watan du 03 décembre 2006), « eu égard aux nombreux « coups partis » qui défigurent l'urbanisme de nos villes, (...) il est, aujourd'hui, grand temps de réfléchir aux meilleurs moyens d'intégrer les quartiers spontanés aux tissus urbains existants plutôt que de les maintenir dans l'état de marginalisation que leur confère leur statut de construction illicite » (El Watan du 07 novembre 2007). Il est vrai que l'urbanisme est une matière complexe et suscite encore un grand nombre de débats, y compris en France, où le « droit de l'urbanisme est, par certains aspects, trop uniforme. Il convient mieux à un despote éclairé qui veut construire une cité idéale qu'à des élus qui essaient modestement de gérer l'existant. Hélas, les cités radieuses ont fait long feu. Comment adapter, dans le cadre du principe d'égalité, les procédures et les normes aux situations locales ? Tel est l'enjeu de la réforme du droit de l'urbanisme ». (Rapport d'information sur la réforme du droit de l'urbanisme à mi-parcours, Sénat, session ordinaire de 2000-2001, annexe au procès-verbal du 11 octobre 2000, p. 20. Document en ligne, p. 31). La loi du 13 décembre 2000 relative à la Solidarité et au Renouvellement Urbain (dite Loi SRU) et la loi Urbanisme et Habitat du 2 Juillet 2003, ont constitué des réformes importantes du droit de l'urbanisme en vigueur en France depuis 1983. Ces réformes ont eu des incidences à la fois sur l'architecture générale du droit de la ville et sur le gouvernement de la ville. Elles ont réorganisé totalement le système de planification urbaine en substituant aux schémas directeurs (SD) et aux plans d'occupation des sols (POS) de nouveaux instruments : les schémas de cohérence territoriale (SCOT) et les plans locaux d'urbanisme (PLU). Les SCOT remplacent les Schémas directeurs (S.D.). Ce sont des documents d'organisation des aires urbaines. Ils ont pour objectif essentiel de : « (...) faire en sorte que les élus définissent en commun la manière dont les aires urbaines doivent évoluer » et donc de répondre à ce besoin d'articulation entre les différentes démarches de planification dans un contexte où le renouvellement de la ville sur elle-même prend progressivement le pas sur l'extension périphérique. Le plan local d'urbanisme, qui remplace désormais le plan d'occupation des sols, permettra aux conseils municipaux de mieux exprimer leur projet pour la commune, après avoir élaboré un diagnostic d'ensemble et une politique globale pour l'aménagement et le renouvellement de la ville ou du village. En Algérie, le difficile accès aux travaux préparatoires des instances gouvernementales et aux procès-verbaux des débats parlementaires nous prive d'une source essentielle dans la connaissance de l'élaboration du droit de l'urbanisme. Mais, on nous a fait remarquer que l'indigence littéraire et juridique qui les caractérise est telle que leur lecture est de peu d'intérêt. Les premiers se réduisent à des séances d'arbitrage entre les compétences des différents ministères dans un domaine de plus en plus marqué par l'intervention des droits voisins (aménagement du territoire, environnement, littoral, ville...). Les seconds se contentent d'avaliser les propositions du gouvernement, les quelques joutes verbales qui opposent les députés à celui-ci sont la plupart du temps émaillées d'arrières pensées politiciennes ou électoralistes. Par ailleurs, tout projet de loi est généralement précédé ou accompagné d'un exposé des motifs pour en expliquer les fondements et définir les objectifs attendus. Lorsque le document existe et est rendu accessible, il se réduit le plus souvent à un texte sans consistance rédigé à la hâte pour satisfaire à la procédure. Parfois, il est élaboré après le projet de loi et il arrive que les deux textes soient rédigés par des personnes différentes. Questions subsidiaires : les évolutions récentes de la législation française vont-elles avoir une influence sur le droit algérien ? Dans une récente intervention, le président du Collège national des architectes experts, mettant en évidence la désuétude qui frappe les instruments de planification urbaine en vigueur en Algérie - le PDAU et le POS - a clairement fait allusion au SCOT et au PLU comme pour indiquer la voie à suivre (4). Ou bien alors, le droit de l'urbanisme algérien réussira-t-il à trouver sa propre voie pour coller aux réalités du pays dans ses diversités régionales, historiques, sociales...? N'était-ce pas l'orientation qui transparaissait déjà dans l'instruction présidentielle du 11 juillet 1984, selon laquelle « notre vision de l'urbanisme doit refléter la volonté de notre société en tant que témoignage et expression de notre culture ? ». Plus de vingt ans sont passés et à peu de choses près, le ministre de l'Habitat et de l'urbanisme déclare que « L'urbanisme étant un acte civilisationnel qui véhicule toute une culture, il est important de le réhabiliter aux yeux du citoyen appelé à vivre en communauté, avec tout ce que cela exige en termes d'éthique, de respect de l'autre et de la loi (5)». Les dernières assises nationales de l'architecture et de l'urbanisme n'ont-elles été qu'une occasion... de plus ? * Politologue 





slt je vous remercie des information que vous avais donné et nous avons un problème de foncier nous’habitons a douéra de puits 40ans et nous avons un térain de 400 m2 mais sons 'acte nous avens une décision délivrer part la pc de douéra avec une permis de construire un maison délivrer en 2002 mais comment je peut régularisé ma situation et merci pour les renseignement
guellab ali - lébéral - douéra alger, Algérie

24/01/2012 - 25995

Commentaires

je me pleins contre la direction de l'envirennement de la wilaya de sidi bel abbes il mon dis que j'ai pas le droit a l'oposition d'ouverture d'une boulangerie et en précie contre monsieur bourasse qui travail dans la direction.
ABBAD MOHAMED - chauffeur de taxi - sidi bel abbes, Algérie

14/12/2010 - 9262

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