Algérie - A la une

«Il y a de l'exagération, voire de l'excès, dans les analyses des uns et des autres»



«Il y a de l'exagération, voire de l'excès, dans les analyses des uns et des autres»
Secrétaire général du syndicat (UGTA) d'Air Algérie, Saïd Tiaouimine brise le silence qui pèse sur la compagnie depuis le crash du vol Alger-Ouagadougou au Mali, il y a une semaine.-De nombreux experts affirment que le DC9 affrété par Air Algérie auprès de la compagnie espagnole SwiftAir n'était pas suffisamment équipé pour la destination africaine. Qu'en pensez-vous 'Lorsqu'un avion est muni de son certificat de navigabilité, il dessert toutes les lignes qu'il veut, qu'elles soient au pôle Nord ou au pole Sud. Il n'y a aucune différence. Le certificat n'est pas délivré s'il n'a pas toutes ses capacités techniques pour transporter d'un lieu à un autre des passagers.-Les spécialistes disent que cet appareil est moins performant que ceux de récente construction. Est-ce vrai 'En matière de navigation aérienne, tant qu'il y a un certificat de navigabilité, nous ne pouvons pas dire que l'appareil ne peut pas être affecté sur une ligne parce qu'il est sous-équipé. Les avis exprimés relèvent beaucoup plus de la spéculation. En tant que technicien de l'aéronautique, ayant fait des études à l'Ecole de l'aviation civile de Toulouse, en France, je ne peux affirmer que l'appareil n'est pas performant. Il a un certificat, délivré par une autorité européenne sévère en la matière, qui ne prend pas de risque quand il s'agit de la sécurité aérienne.-Pourtant on parle de 17 remarques techniques faites sur l'appareil lors de son dernier contrôle en France'je ne peux pas me prononcer sur ces remarques. Mais je peux dire que l'avion est originaire d'un pays, l'Espagne, dont la direction de l'aviation civile est connue comme étant très sévère. Elle ne baisse jamais sa vigilance. De plus, l'appareil a déjà fait cinq fois Ouagadougou avant le crash. Ce qui veut dire qu'il n'était pas à son premier vol. Il a également fait le vol de Paris et a été contrôlé sur place, sans faire l'objet d'une quelconque remarque technique.-Certains anciens cadres de la compagnie reprochent à Air Algérie d'avoir recouru à un avion de plus de 14 ans d'âge, alors que la réglementation l'interdit. Est-ce le cas 'L'affrètement des avions est une décision qui relève du domaine lié à la politique de la compagnie. Néanmoins, il est important de savoir que dans le jargon aéronautique, il n'existe pas d'avion plus vieux qu'un autre. A partir du moment où l'appareil est certifié bon à naviguer, son âge importe peu. D'ailleurs, dans toute la réglementation internationale en matière d'aviation civile, la limite d'âge des appareils n'est pas précisée. L'âge n'intervient qu'en matière de coût. Plus l'avion est âgé, plus son entretien devient coûteux. Il existe des avions de plus de 35 ans en circulation et qui continuent à avoir leur certificat de navigabilité. Ils assurent de nombreuses dessertes à travers le monde.-Est-il vrai que l'équipage n'était pas formé pour des lignes à fortes turbulences climatiques 'Il y a de l'exagération, voire de l'excès, dans les analyses des uns et des autres. Quelle que soit la destination, on ne confie pas la vie des passagers à des pilotes qui ne sont pas reconnus comme tels. Là aussi, il n'y a aucune différence entre un vol vers Bamako ou Paris. Les pilotes sont formés de la même manière. Mais, je tiens à préciser que dans ces analyses, il ne faut jamais perdre de vue le volet commercial. Il y a une forte concurrence sur le continent africain, où la compagnie a commencé à se redéployer. Le crash a été une aubaine pour nombre de ses concurrents, dont Royal Air Maroc ou Air France, pour ne citer que ces compagnies. C'est de bonne guerre. D'ailleurs, les médias français et marocains parlent du crash d'un avion d'Air Algérie et non pas d'un avion affrété par Air Algérie. La nuance est très importante parce que cette digression peut susciter des réactions négatives chez les clients potentiels d'Air Algérie.-Ne pensez-vous pas que c'est le silence des autorités algériennes qui a suscité de telles réactions 'Moi, je pense que du côté algérien, le crash a été géré avec sérénité et sagesse. Face à ce genre de situation, il faut être vigilant parce qu'il y va de la vie des 116 passagers qui étaient à bord de l'avion. De plus, l'avion s'est crashé sur le territoire malien et de ce fait, selon la réglementation internationale, le Mali devient le premier responsable de l'enquête. Il a le droit de déléguer tout ou partie de ses pouvoirs sur cette enquête. Il est souverain et nous ne pouvons pas interférer. Maintenant, il faut attendre les résultats de l'expertise des deux boîtes noires pour connaître les circonstances de l'accident.-Justement, pourquoi avoir remis ces deux boîtes noires à un bureau d'expertise français ' N'avons-nous pas les moyens de le faire 'Nous n'avons pas ce genre de bureau d'expertise. Les plus performants dans le domaine sont le BEA français et le NTSP américain. Je ne veux pas spéculer ou anticiper sur les événements, mais il faut relever que l'Espagne, pays d'origine de l'appareil qui s'est crashé, est aussi en dehors de cette affaire. Le Mali est souverain dans ses décisions et personne ne peut dire quoi que ce soit.En tant qu'employé de la compagnie, le choc est très dur à supporter. Il n'est pas facile de faire face à un crash et de constater la mort brutale de nos clients, les 116, et pas uniquement nos six ressortissants. Pourtant, ce crash a été précédé par d'autres, mais qui n'ont pas connu autant de médiatisation. Rappelez-vous le vol d'Air France Paris-Rio qui s'est crashé alors qu'il avait à peine un an d'âge. A-t-il été aussi médiatisé ' Je ne le pense pas et la compagnie française n'a pas été aussi sévèrement critiquée pour autant. Pour nous, il est prématuré de parler des circonstances et des conditions dans lesquelles l'appareil s'est écrasé. Celles-ci sont du ressort du bureau qui expertisera les boîtes noires. Le plus important est d'aider les familles des 116 victimes à surmonter cette rude épreuve et à faire leur deuil.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)