Algérie

Il nous a quittés en mai 2005 Salah Sadaoui, un chanteur trilingue


Publié le 11.05.2024 dans le Quotidien l’Expression

Il y a déjà 19 ans, le grand chanteur Salah Sadaoui nous quitta après une longue maladie...
La nouvelle de son décès, tout comme celle de tout grand artiste, écrivain ou homme de culture de manière générale, se propagea telle une traînée de poudre. Avec la mort de Salah Sadaoui, la chanson algérienne perdit l'un de ses piliers. En plus de son talent indéniable, Salah Sadaoui a marqué la chanson algérienne par ses nombreuses spécificités. Il chantait dans trois langues: le kabyle, l'arabe et le français. De même qu'il a brisé les tabous en abordant des thèmes peu chantés mais aussi en les appréhendant de manière très courageuse. Salah Sadaoui a aussi été un excellent comédien et il a joué dans de nombreux sketchs. Il était donc un artiste polyvalent dont l'oeuvre continue d'abreuver les mélomanes. Quand on cite de grandes figures de la chanson algérienne d'une certaine époque comme les monuments Youcef Abdjaoui et Akli Yahiatène, le nom de Salah Sadaoui ne peut pas être occulté. Il est de la même dimension que ces sommités bien qu'il avait vécu loin des feux de la rampe. Le fils de M'chedellah dans la wilaya de Bouira, naquit en 1936. Bien que d'origine kabyle, Salah Sadaoui ne parait pas kabyle et ne l'apprit que bien plus tard car ayant décidé de chanter dans cette langue. Il vécut son enfance à Alger où s'installa sa famille après le retour de son père de France. Très jeune, son talent artistique s'exprima.

Naturellement, il chercha des espaces où il pouvait laisser éclore son don. Et c'est la chorale de l'association L'espérance qui lui tendit les bras. Heureux hasard, il fit connaissance avec le chef d'orchestre Amraoui Missoum. Ce dernier était un pilier qui mit sous son aile un nombre important de figures de proue de la chanson algérienne issue de l'émigration, durant les années 50.
Salah Sadaoui explore divers univers artistiques et lorsqu'il découvre la musique orientale, il en est happé. Il en tombe amoureux et bien entendu, s'en inspire. Il est également subjugué par les comédies musicales égyptiennes dont il s'inspirera plus tard. Tout en animant des spectacles dans les cafés maghrébins de France, Salah Sadaoui écrivait et composait des chansons dont certaines deviendront vite des perles.

En rencontrant des ténors dénommés Chérif Kheddam, Akli Yahiatène, Kamel Hamadi et d'autres encore, Salah Sadaoui devint comme un poisson dans l'eau. Il ne faisait que progresser artistiquement. Il s'imposa vite. Il prit part à la tournée de la troupe artistique du FLN dans les pays de l'Est, qui a pour objectif de sensibiliser l'opinion à la cause des nationalistes algériens. Ce n'est qu'au milieu des années 60 qu'il entama sa carrière artistique en solo. En plus de sa voix suave, Salah Sadaoui réussit à écrire des chansons d'actualité qui marquèrent profondément les Algériens, surtout ceux vivant à l'étranger et en exil.

La souffrance des exilés, leur désespoir et solitude, leurs désenchantements, etc., étaient les thèmes de prédilection de Salah Sadaoui. Ce dernier trouvait les mots justes et profonds pour les exprimer et les dépeindre. Il a abordé ces sujets aussi bien en kabyle qu'en arabe et même en français comme dans la chanson «Le déménagement» ou encore «Le pays où je suis né». Salah Sadaoui a énormément exprimé l'amour de la patrie dans ses chansons. Il a abordé le thème de l'exil sous des dizaines d'ongles et en plusieurs langues. Il a parlé de tous les aspects de la vie des émigrés.

Les vices d'une vie pas du tout rose ont été décrits dans des chansons comme celles intitulées «Tiercé», «Soukardji», «Aâyit, mellit», «Ya ouled el ghorba»... Salah Sadaoui, dans des chansons comme «Bqa ala khir a França», invita les émigrés à retourner au bercail pour renouer avec une vie plus simple et plus authentique. Il campa de nombreux rôles, avec brio, dans des sketchs en compagnie du célèbre comédien Kaci Tizi Ouzou. Salah Sadaoui a également chanté l'amour sous plusieurs formes. Il compte plusieurs titres très populaires dans ce chapitre comme «Ldjouhe»r, «Habitek», «Allo téléphone»,... Salah Sadaoui a rendu hommage à Slimane Azem et Si Mohand Ou Mhand. Il a également loué la femme algérienne dans de nombreuses chansons. Sa poésie mérite d'être transcrite et réunie dans un livre.
Aomar MOHELLEBI

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