Algérie

Il est 50e ballon d?or européen




Ronaldinho, le grand prêtre du football dans sa cathédrale Une chape de froid glacial a privé la messe du dimanche soir au Camp Nou de Barcelone d?un tiers de ses fidèles. Tant pis, ils étaient tout de même plus de 50 000 socios à venir célébrer, Ronaldinho la nouvelle icône sacrée du football mondial. Deux buts venus du ciel le week-end d?avant à Bernabeu sur « le territoire impie » du Réal, une sortie de gala contre Brême en semaine ; Ronaldinho fréquente déjà les cieux, dans ces jours, où il devient pour la première fois Ballon d?or de France football. Le grand maître de cérémonie n?est pourtant pas au centre de la chaire, il se recueille à l?écart sur la gauche du terrain. C?est la doctrine de Frank Rijkaard, l?un des apôtres intégristes du football « grand format » qui le veut ainsi. Ronaldinho attend les ballons le long de la ligne de touche dans une symétrie architecturale avec son homologue de l?autre côté, qui répond au nom bien de circonstance de Messi. La télévision montre bien que l?eau bénite du ballon va de la ligne à la ligne lorsque le Barça en a la possession. Ce que la vue panoramique révèle, c?est l?incroyable foi que les joueurs de Rijkaard ont en leur enseignement religieux. Aussitôt le ballon récupéré, ils sont déployés sur toute la largeur du terrain à des distances abyssales les uns des autres, sans la moindre crainte d?être si peu groupé pour défendre si - à Dieu n?advienne - le ballon devait être perdu trop tôt en cours de déploiement. Mais d?où vient donc cette croyance aveugle ? « De la maîtrise technique collective » semblent soupirer autour de nous des rangées de consultants penchés en l?air sur cette fosse des merveilles. Et alors la virtuosité de matador des blaugranas fait glisser lentement l?Eglise vers l?Arène. Le Racing Santander est le modeste taureau expiatoire de ce soir. Un bloc équipe compacté sur sa moitié de terrain qui courre de la droite vers la gauche, puis de la gauche vers la droite. Presque désolé d?être là, un peu comme Stephan Dalmat, joueur français du club, qui n?aura sans doute jamais poursuivi de sa carrière un ballon aussi insaisissable. De la tauromachie douce. Et Ronaldinho ? On peut être le meilleur joueur du monde et rester tendre pour une bête promise à son sort. Penalty dès la troisième minute. Ronaldinho le tir à la droite du gardien comme à son habitude, mais sans y mettre la conviction. Dudu est parti du bon côté. Une heure plus tard, les deux hommes se retrouvent face à face. La corrida a, entre temps, pris le dessus sur la messe, le public veut voir Dudu « mordre la poussière »... et Ronaldinho aussi. Cette fois, c?est lui qui a obtenu le penalty : contrôle extérieur sur le côté gauche, passement de jambes en vitesse « film burlesque », et son vis-à-vis ne peut rattraper que la cheville d?un furtif pied d?appui. « Tu ne tueras point », le commandement n?arrive plus aux oreilles du toréador. Ronaldinho tire du même côté droit du gardien, mais légèrement plus haut et beaucoup plus fort. Il a marqué son but de la soirée, il peut entamer, fou de bonheur, son rite « bientôt déposé en marque protégée », de remerciement du ciel. Et la paix peut redescendre dans le c?ur des Socios. Un détail tout de même. C?est déjà le troisième but du Barça ce soir. Le coup de grâce en quelque sorte. Le penalty manqué de la troisième a brutalement donné un relief épique à une cérémonie promise à la linéarité d?un protocole. Un but d?Etoo à la Ronaldinho qui débloque une soirée réservée au sacre mondial de Ronaldinho ? Le second est si heureux du cadeau qu?il décide d?en faire profiter la communauté des croyants. Dimanche dernier, Ronaldinho a poursuivi, dans la joie, son ?uvre d?éblouissement des rétines du football planétaire : passes de la poitrine, déviations en aile de pigeon en pleine extension, passes aveugles, fausses pistes, doubles contacts, diagonales de 50 m dans la course de l?attaquant droit, slalom et caviars pour Etoo, puis pour Giuly. Barcelone a battu Santander 4 buts à 1. A la sortie du stade, seul le brouhaha des conversations. La foule n?élève plus la voix. Le grand prêtre du football mondial, entouré de la plus somptueuse des chorales, a fini sa messe. Amen.





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