Algérie

Hidjabiettes & folles du volant



Hidjabiettes & folles du volant
Nos grands-mères attesteraient certainement que la musulmane a bien changé l'espace de deux décennies, peut-être que, selon les avis, un peu plus. Dans la vie d'une nation ce laps de temps est insignifiant, car, pour forger une personnalité collective capable de transcender une société, il faudrait davantage de longévité aux générations pour réaliser une mue de la culture, surtout si celle-ci est dépendante d'une éducation ancestrale solidement rivée dans les habitudes comportementales.
Le voile a été importé par l'influence arabe et a été consolidé par la présence des Ottomans lorsqu'ils régentaient les principales villes algériennes, et c'est dans les centres urbains que sa fonction était la plus usitée pour se prémunir du regard inquisiteur des étrangers, fussent-ils musulmans. Dans les campagnes, les Algériennes ne se voilaient pas ; mieux, elles vaquaient dans les champs à travers bois parcourant parfois de longues distances, soit pour ramasser du bois, soit pour puiser de l'eau, soit pour bêcher ou cueillir des tubercules, des châtaignes, du caroube ou tout simplement pour rendre visite à une famille sur l'autre versant de la colline, et cet esprit a toujours cours à l'intérieur du pays. Nos ancêtres majoritairement vivaient dans les zones rurales ; rares furent les familles issues d'une lignée citadine. La première femme algérienne résidente à avoir décroché son permis de conduire est une Algéroise exerçant le métier de sage-femme. Elle avait choisi de conduire sa Dauphine en se drapant d'une bâche de couleur bleue en guise de gabardine ; la tête était recouverte d'un foulard bâché laissant déborder une longue mèche blonde, alors que la face était partiellement cachée par un masque blanc commun quelque peu transparent, trahissant la droiture du nez et de ses lèvres sensuelles qui ont fait baver bien des hommes. «Kheira la blonde» fut une femme courage, dans le sens où il fallait donner la vie, et des soins en travaillant pour sa progéniture, taire les médisants des deux sexes, tout en respectant un voisinage très regardant sur une personne qui fut pour eux mi-musulmane, mi-européenne et qui ,de surcroît, savait exécuter aussi bien, sinon mieux que les hommes un créneau. Les femmes voilées étaient cloîtrées dans leur demeure, avec l'instruction donnée de ne jamais recevoir ou sortir pour quelques raisons que ce soit, sans être accompagnées par un tuteur, fusse-t-il un enfant. Elles n'avaient dans la tête que l'obligation du couvent familial, les tâches ménagères et la soumission à l'ordre phallocratique établi. Depuis, les choses ont évolué. Les hommes ont fait des concessions sur le droit à s'instruire, à travailler, à faire le marché et même à aller faire des promenades à plusieurs kilomètres du domicile, et ce, par la «grâce divine» du hidjab ; ce drap noir même hideux a été le cache-misère et le véritable paravent libérateur des femmes. Toutes les luttes et les discours des organisations féminines pour la libération et l'émancipation des femmes ne sont rien comparativement à la révolution dans les m'urs qu'a apportée le hidjab, dans le sens où il attribua à celles qui le portent l'image de l'immaculée conception, avec la bénédiction des plus extrémistes des religieux de surcroît. L'Algérienne sort aujourd'hui voilée, hidjabisée, l'important est qu'elle sorte. L'Algérienne de nos jours contribue à amortir, sinon à améliorer substantiellement les besoins quotidiens pour faire face à notre société de superconsommation, et cela fait bien dans nos décors urbains à les voir presque toutes se mettre à conduire, même si elles ne savent pas faire un créneau, elles savent par contre qu'elles tiennent là le commandement, le volant, pour choisir la direction, la vitesse et la possibilité de freiner ou de se laisser emballer. Elles ont bien raison de défendre l'émancipation du hidjab et même à lui trouver une raison sacrée de le porter puisqu'elles conduisent à présent, le mari assis dans la voiture à la place du mort.
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