Algérie

Gouvernance et territoires



Les changements technologiques et les changements d?orientation profonds qui se sont opérés depuis les vingt dernières années ont donné lieu à un nouvel environnement économique (souvent qualifié d?économie du savoir, de mondialisation ou encore de nouvelle économie), dans lequel le savoir prend une place de plus en plus importante, et où les compétences et l?innovation sont considérées comme des moteurs de croissance territoriale.Ce nouvel environnement économique a permis la mise en évidence de la dimension spatiale de la croissance. En effet, le dynamisme économique des collectivités et des systèmes régionaux dépend de plus en plus des capacités qu?ils ont à entrer en concurrence à l?échelle nationale et internationale. La nouvelle économie se traduit, ainsi, par de nouveaux espoirs et de nouveaux enjeux dans les régions rurales, mais elle alimente aussi les débats quant aux risques de voir les inégalités augmenter dans les régions du fait des effets de la libéralisation des marchés.Pour résumer, les principales préoccupations concernent d?un côté les possibilités offertes par les nouvelles technologies qui amoindrissent l?importance de l?agglomération et de la distance, ce qui peut être à l?avantage des régions rurales éloignées, d?un autre côté, le risque qu?elles pénalisent davantage les régions où la main-d?oeuvre est peu qualifiée. La question que l?on se pose est de savoir de quelle manière le capital humain influence le potentiel des territoires. Il existe dans les recherches un certain constat d?échec des politiques publiques à contrer les forces de marchés qui agissent au détriment de la périphérie. Il y a une certaine concentration d?activité économique dans les zones urbaines allant parfois jusqu?au risque d?éclatement et d?anarchie. Il s?agit de déterminer les possibilités d?adopter des politiques de développement territoriales performantes qui peuvent, entre autres, s?appuyer sur le capital humain, l?innovation et la nouvelle approche de la bonne gouvernance territoriale.Dans un rapport intitulé « Perspectives territoriales de l?OCDE », publié en 2001, l?OCDE utilise l?expression « développement territorial » pour mettre en évidence les dimensions régionales ou locales du développement économique. Il est difficile de déterminer quelle définition de l?unité territoriale convient le mieux à l?analyse économique, même si la recherche montre que l?utilisation de diverses échelles spatiales peut donner des résultats très différents sur le plan de la variabilité et de la corrélation observée entre les variables. Autrement dit, selon que l?on utilise l?agglomération, le village, la ville, la région, le pays... comme unité territoriale, les résultats observés seront différents. Du point de vue politique, la solution la plus pertinente semble être l?utilisation des unités territoriales relatives au secteur de compétence administratif en matière d?élaboration et de mise en application des politiques sectorielles. De nombreux spécialistes, parmi lesquels Anselin ou encore Krugman, s?accordent pour dire que dans le nouvel environnement économique, les régions, en tant qu?unité géographique d?analyse, sont de plus en plus importantes par rapport à l?unité du pays. Les études des liens entre le capital humain et la croissance ont surtout eu pour cadre spatial d?analyse l?échelon national. Le passage de l?étude de ce lien supposé fort à des niveaux spatiaux plus réduits comme les régions ou les villes est beaucoup moins présent au sein de la littérature économique. C?est ce que l?on remarque, par exemple, sur le terrain en Algérie, à travers l?inexistence de capital humain et de croissance dans certaines régions, notamment isolées. Pourtant, la pertinence de l?espace n?a pas diminué dans la nouvelle économie.En effet, le savoir, notamment le savoir tacite, constitue un attribut propre aux localités qui ne peut se déplacer facilement dans l?espace. La principale difficulté est liée à la nature de l?échelon spatial : pour un pays, il faut reconnaître que le stock de capital humain ne change pas beaucoup sur le court et le moyen terme et qu?il a tendance à s?accroître avec les investissements en formation. Sur le plan national, il est donc possible de raisonner sur des notions comme « stock » ou « investissement ». De même, concernant l?individu, il possède un savoir-faire propre, et il peut investir dans son propre capital. Cela est plus compliqué quand il s?agit d?une région ou d?une ville, en raison d?une mobilité importante des personnes et en particulier des plus qualifiés. Raisonner en termes d?investissement et de stock est plus délicat, sachant qu?une région peut bénéficier des investissements d?une autre et que le stock d?une région peut avoir tendance à s?épuiser face à une autre région plus attractive. Ceci est particulièrement visible en Algérie où certaines régions investissent dans le capital humain mais ne profitent pas de ces investissements, car leurs populations vont s?installer dans d?autres régions plus attractives, délaissant ainsi certaines régions, qui deviennent en quelque sorte déshéritées. Toujours en Algérie, la plupart des politiques territoriales ont visé les grandes régions. Pourtant, le territoire algérien est vaste et il serait profitable de dynamiser l?ensemble des régions, afin d?acquérir un certain équilibre territorial et régional. Ce qui est souhaitable, c?est de faire en sorte que l?investissement national et étranger soit attiré par toutes les régions. D?un autre côté, les régions, au niveau de leur gestion et administration, doivent être armées par le capital humain et un potentiel humain capable de prendre des initiatives pour permettre à toutes ces régions d?être connectées à l?économie nationale et à l?économie mondialisée et d?y participer. Enfin, Aydalot, dans son ouvrage « Economie Régionale et Urbaine », précise que la croissance d?un territoire est souvent décrite comme un processus composé de plusieurs phases : le processus débute par une phase de spécialisation dans une activité de base, qui lance le développement du territoire. S?ensuit une phase de diversification progressive assortie d?un processus de maturation qui rend alors le territoire moins spécialisé, ce qui accélère alors sa centralisation. Toujours selon le même auteur, le territoire en question se comporte comme une petite économie ouverte caractérisée par des flux d?entrées et de sorties. Les facteurs de production comme les connaissances, les idées, le savoir-faire... sont incorporés dans le capital humain et peuvent se déplacer dans l?espace. Il s?agit de dire que l?attraction, la production et la rétention des facteurs de production constituent la base économique des territoires, la maîtrise de ces flux procurant aux territoires des avantages comparatifs déterminants au niveau de leur compétitivité économique. Au total, mettre en évidence les spécificités des territoires quant à leurs capacités d?attraction du capital humain et des investissements pourrait servir de base à l?élaboration de politiques publiques adaptées à chaque contexte. Car tout le monde s?accorde pour dire, qu?il ne peut y avoir de politique uniformisée que ce soit pour le capital humain, pour l?innovation ou pour l?investissement. Les politiques doivent donc tenir compte des différences territoriales, tout en gardant comme objectif commun l?équilibre territorial. Pour cela, il s?agit de revoir en permanence la recette de la bonne gouvernance territoriale.  * Docteur en Sciences politiques(politologue)
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