Les chiffres effarants livrés par la police sur la délinquance juvénile confirment hélas ce que chaque Algérien observe autour de lui : des bandes entières d?adolescents et d?enfants, souvent munis d?armes blanches, règnent en maîtres absolus dans les cités et les rues, à la recherche d?un larcin, d?une agression ou d?un joint. Les villes et villages sont plongés dans la peur, alors même que les prisons sont pleines de ces mineurs vieillis avant l?âge, l?innocence arrachée par la vie terrible qui s?est présentée à eux, la seule qu?ils aient eu à connaître. Aujourd?hui, l?Algérie a peur de ses enfants qu?elle n?a pas su faire grandir : les familles ont baissé les bras, les policiers débordés par l?ampleur du phénomène et les juges incapables de trancher entre clémence et répression. Longtemps, par hypocrisie sociale, une chape de plomb a été posée sur ce grave problème, notamment dans ses manifestations les plus extrêmes que sont l?inceste, l?abandon d?enfant, l?agression sexuelle, la prostitution, etc. On avait jugé que la morale religieuse à elle seule suffisait à prévenir les périls. Aujourd?hui, on se rend compte qu?il n?en est rien, que la protection doit être multiforme, englobant la famille, l?école et l?Etat à travers des politiques sociales, économiques et culturelles. Or, tout a été défaillant. Victimes eux aussi des difficultés de la vie, oscillant entre des valeurs traditionnelles effritées et des normes modernes inassimilables, les parents ont perdu pied avec leur progéniture, trop souvent excessive en nombre. Prise en otage par des démagogues et surpolitisée à l?extrême et gagnée par la médiocrité ambiante, l?école a fini par devenir une machine d?exclusion. Enfin, les pouvoirs publics n?ont jamais senti l?urgence d?une stratégie globale de protection de l?enfance, se contentant de demi-mesures, voire de fausses solutions. Comment dans ce contexte de démission générale peut s?épanouir la jeunesse lorsque de surcroît le pays est plongé dans d?incessantes guerres de pouvoir, sert d?expérimentation à toutes sortes de théories politiques et économiques, divergentes et contradictoires, et qu?il a vu émerger un des intégrismes religieux les plus violents dans le monde, sacralisant le sang et le martyr au détriment du savoir et de la culture ? Enfance algérienne, enfance meurtrie, victime de ses aînés, peut-elle être sauvée un jour ?
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Posté Le : 21/04/2005
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ali Bahmane
Source : www.elwatan.com