Algérie

Crue par-ci,incurie par-là



La catastrophe de Ghardaïa puis celle de Aïn Defla rappellent une fois de plus, une fois de trop, que notre pays n'est pas encore sorti de l'auberge de la gabegie et de l'imprévoyance. Nos gouvernants se contentent, comme nous, de dresser les horribles bilans de victimes des adversités naturelles et humaines et d'inventorier les dégâts matériels. Une fois l'estimation faite, le laxisme collectif qui n'a ni su ni pu éviter les drames réagit par une fausse générosité étatique sous forme de montants faramineux destinés à secourir ceux qui peuvent l'être et indemniser les' morts.Il est bien sûr inutile de chercher les raisons qui auraient rendu possibles ce genre de catastrophes. Qu'il s'agisse de séismes, d'inondations, de glissements de terrain ou même de la décrue de la production agricole, la nature et ses caprices ont bon dos aux yeux de nos responsables pour s'en laver les mains.Mais en réalité, ce recours récurrent à la fatalité du climat signifie au mieux une indigence et une incompétence dans la gestion, au pire un laxisme des autorités qui font semblant de n'avoir rien vu venir. Pourtant, en termes « d'expériences », notre pays est hélas copieusement servi ces derniers temps ; ce qui aurait pu faire de lui un donneur de leçons aux autres.Or, force est de constater, n'en déplaise à la littérature officielle, que nos responsables n'ont pas assimilé les leçons de Bab El Oued et de Boumerdès ou, plus grave encore, sont de mauvais élèves. Alors là, les crues des oueds seraient effectivement une fatalité face à l'incurie de l'administration. Que le wali de Ghardaïa lève les bras au ciel pour suggérer la force divine ou que son collègue de Aïn Defla évoque « le déboisement 'uvre de citoyens irresponsables » ne fait que confirmer ce prêt à penser des autorités non pas pour se donner bonne conscience, mais simplement pour se sortir de la boue de leur mauvaise gestion.Résultat des comptes : si des dizaines d'algériens meurent quotidiennement dans des accidents de la circulation, ce n'est pas l'état de nos routes qui est en cause, mais la conduite de nos chauffeurs. Si un regain des actes de violence terroriste est constaté, c'est parce que les forces de sécurité les a forcément « provoqués » en liquidant un émir. Si un orage d'été vire au cauchemar comme ce fut le cas à Ghardaïa et Aïn Defla, Dame nature est toute désignée pour lui faire porter le chapeau, coupable d'avoir craché plus que d'habitude.Et, paradoxalement, nos responsables réussissent à chaque fois l'exploit de passer allégrement de la posture d'accusés le jour de la catastrophe à celle de protecteurs, voire d'accusateurs le jour d'après. A coups d'argent, de nourriture et de logements, ils achètent le silence de citoyens marqués par les épreuves subies et leur arrachent même des sourires devant les caméras de la télévision. Exit donc les vrais coupables qui devraient rendre compte en pareilles circonstances.Quant à l'absence de textes d'application des lois, la violation au nez et à la barbe des autorités des normes d'urbanisme, ou encore l'inexistence d'une structure de veille et d'alerte contre les catastrophes majeures ; tout cela reste tout juste un débat d'experts que l'Etat finance à coups de séminaires et forums sans lendemain. Gouverner, c'est prévoir mais nos gouvernants font précisément le contraire. Et, fatalement, les mêmes conditions produisent les mêmes effets.


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