Algérie

Crise de l?ordre international et réforme de l?ONU




Depuis sa création en 1945, l?Organisation des Nations unies est l?objet d?une attente importante, celle d?une institution qui assurerait la régulation d?un système international de plus en plus ressenti comme injuste, d?une défense possible des droits de tous les peuples et des droits de tous les Etats, notamment des moins influents sur la scène internationale.Mais l?apparence du droit par rapport à la réalité du pouvoir donne naissance à une immense déception de la part de la communauté internationale envers une institution appelée à aider à résoudre un nombre toujours croissant de problèmes internationaux, tel que le vrai problème de la Palestine et les massacres de la population qui s?en suivent... Les Nations unies sont au centre de ce débat, même si elles ne résument pas à elles seules le système international. Il existe d?autres acteurs et d?autres institutions, mais les Nations unies occupent une situation stratégique: elles sont censées être les seules à détenir une légitimité qui se réfère à un intérêt collectif international comme une étape vers l?intérêt de l?Humanité. En principe, elles devraient remplir plus ou moins bien la fonction d?une communauté politique nécessaire au fondement du droit international. Aujourd?hui, les Etats souhaitent dans l?ensemble trouver dans cette organisation une manière de satisfaire leurs intérêts nationaux. Il s?agit de dire que malgré le rôle majeur qui incombe à l?ONU en matière de gestion des crises, cette organisation a des limites qui l?ont obligée à partager ou à déléguer l?application de ses décisions et de ses compétences en la matière. La question de la réforme de l?ONU est devenue insistante aujourd?hui afin de mieux gérer les crises internationales qui sont de plus en plus nombreuses et sans solution. Il faut dire que la crise, de par son ancienneté, est devenue un mode normal de fonctionnement de l?ONU et que cette organisation, comme le dit bien Yves-Marie Laulan, semble avoir « porté en elle les germes de sa propre impuissance ». Dans ce sens, différentes positions structurent aujourd?hui l?espace du débat et les affrontements sur les réformes. Pour certains, les Nations unies devraient devenir le système politique de la mondialisation libérale, un mélange d?institutions du type Banque mondiale, FMI et OMC, d?une part, et une alliance militaire du type OTAN, de l?autre. Pour d?autres, comme les tenants du réformisme modéré, l?existence d?une régulation, même partielle et peu efficace, est déjà un objectif en soi. Enfin, les tenants d?une réforme radicale estiment qu?il faut accepter les risques d?une remise en cause qui marque une rupture nécessaire compte tenu de la nature des enjeux. Ces derniers sont multiples. Il s?agit en effet de répondre à la construction de la paix et au règlement des différends dans un monde où les conflits s?enchaînent. Il s?agit aussi de la construction d?un système international et d?instances politiques qui encadrent la globalisation des échanges politiques, économiques, culturels... Il s?agit enfin de contrer l?unilatéralisme et les inégalités géopolitiques et aussi de donner une place à de nouveaux acteurs (notamment d?autres Etats...), avec au centre de tout cela l?ONU comme organisation qui peut jouer le rôle de gouvernement mondial juste et efficace dans la résolution des conflits internationaux. L?ONU comporte un ensemble d?institutions relevant du domaine public et composées d?une multitude d?entités. Toutes ces entités gravitent selon des liens plus ou moins forts autour des organes principaux: le Conseil de sécurité et le Secrétariat général couvrent l?exécutif et l?administratif, tandis que le législatif est du ressort de l?Assemblée générale. Sa mission pourrait se résumer principalement au maintien de la paix et de la sécurité collective et au développement de la sécurité humaine sous toutes les formes de protection de la vie et des droits y afférents, notamment dans les domaines politiques, culturels, économiques, financiers, humanitaires, alimentaires...La crise interne de l?ONU et sa répercussion sur la forme de résolution des conflits sont en grande partie dues à un déficit démocratique au sein du Conseil de sécurité et de l?Assemblée générale. Le déficit démocratique interne au Conseil de sécurité est d?abord lié au système de représentation inégalitaire des Etats au sein de cet organe. Alexandra Novosseloff, qui a écrit un livre intitulé « Le Conseil de sécurité des Nations unies et la maîtrise de la force armée », s?est attachée à étudier la structure et la composition du Conseil de sécurité et montre que cet organe politique possède un pouvoir hiérarchique, un pouvoir discrétionnaire, un pouvoir d?action et un pouvoir autoritaire et « L?ensemble de ces pouvoirs fait du Conseil de sécurité un organe disposant de pouvoirs très étendus qui s?appliquent à l?ensemble des dispositions relatives au volet sécurité de l?ONU ». En théorie, le Conseil de sécurité a donc un pouvoir fort, mais en réalité ce pouvoir ne se manifeste pas dans la résolution des conflits, qui parfois durent dans le temps sans véritable intervention, tel que le problème de la Palestine et autres qui ne trouvent pas encore de solutions. Dans ce sens, il existe aujourd?hui dans le monde un certain sentiment de partialité.Comme l?a affirmé d?ailleurs l?ancien diplomate algérien Lakhdar Brahimi, chargé de la mission sur la sécurité des Nations unies, cité par Le Quotidien d?Oran du 1er mars, « Le drapeau de l?ONU n?est plus désormais une garantie de protection ». Justement, il s?agit de rendre à cette institution le rôle, le rang et l?autorité qui lui reviennent pour mieux gérer les crises.Il est important de revoir le problème du déficit démocratique interne à l?Assemblée générale, qui vient du fait que les résolutions de l?Assemblée générale sont sans force obligatoire. En effet, les véritables décisions se prennent au Conseil de sécurité, ce qui nous ramène au problème du déficit démocratique qui se situe au double plan des décisions et des compétences. En fait, le Conseil de sécurité peut décider en accord avec ce qu?il pense opportun. Cela veut dire qu?il peut voir dans n?importe quelle situation une menace contre la paix et la sécurité internationales, exiger d?un Etat n?importe quel comportement et prendre envers lui des sanctions. Mettre de tels pouvoirs entre les seules mains du Conseil de sécurité, à l?exclusion de l?Assemblée générale, est dangereux pour des relations internationales censées être démocratiques.L?ONU est également confrontée à la montée de l?unilatéralisme qui entend régenter les relations internationales en fonction de ses intérêts et de sa conception du monde. Finalement, même si l?ONU constitue pour les Etats un moindre mal qu?il faut sauvegarder, l?erreur était de croire que cette organisation resterait adaptée à l?ordre international qui succède au bipolarisme. Yves-Marie Laulan précise aussi que « Les organisations internationales créées au lendemain de la dernière guerre sont aujourd?hui inadaptées par rapport aux grands problèmes qui se posent (...). Cette inadaptation tient, en partie, à la mutation profonde que l?environnement international a connue depuis le début des années 90 ». Par ailleurs, l?ONU est aussi absente des questions de développement. Or, la discussion sur le développement est centrale et n?est pas indépendante de la question du règlement des conflits et de leur prévention. L?idée selon laquelle la paix et la stabilité sont des conditions nécessaires et préalables au développement est souvent fondée.Certains pays souhaitent marginaliser l?ONU. Or, selon de nombreux spécialistes, cette organisation ne peut pas être remplacée par d?autres institutions. A ce sujet, Sébastien Daziano affirme que pour que l?ONU prétende régir un nouvel ordre mondial, il lui faudra être démocratique dans ses représentants, rigoureuse dans sa gestion et solidaire dans son action. Olivier Russbach, quant à lui, préconise d?utiliser le droit international de façon plus juridique car il porte en lui des mécanismes d?application efficaces prouvant que la communauté internationale est bien dotée de pouvoir et d?autorité. Enfin, face à l?inaction de la communauté internationale qui accompagne par exemple quelques problèmes internationaux et l?incursion meurtrière dans les territoires palestiniens aujourd?hui, il est important d?appeler à agir pour corriger les insuffisances de l?ONU dans la gestion des conflits en lui permettant de devenir le seul et unique acteur-régulateur dans ce domaine sur le plan international, pour mettre un terme à l?injustice et protéger les peuples désarmés face à des puissances militaires...  * Docteur en Sciences politiques (politologue)
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