Ces sons venus d'ailleurs

Avant, c'étaient des voix venues d'un autre monde, de l'insondable profondeur de l'univers, communications extrasensorielles destinées à remettre de l'ordre sur la planète bleue qui virait au rouge. C'était le temps où les prophètes étaient nombreux à avoir reçu les consignes de la Puissance, l'époque où les peuples superstitieux décrivaient les phénomènes aléatoires comme les interventions colériques des nombreux dieux.Aujourd'hui qu'il y a moins de dieux par dégonflement de la bulle spéculative, les choses n'ont pas vraiment changé. «Une voix m'a dit de ne pas démissionner», a annoncé Bouhadja, ce qui explique son entêtement à rester au Parlement, structure qu'il n'a jamais portée vers sa véritable fonction, celle de préparer, proposer et adopter des lois. «Une voix m'a congédié», a affirmé un autre responsable pour expliquer son limogeage.
«Une voix m'a nommé», a encore admis un autre. Et c'est ainsi que les ministres et walis attendent leur éviction au téléphone, pendant que ceux qui se sont bien tenus attendent leur nomination, par téléphone aussi. De qui ' D'une Puissance qui parle à voix basse et dont on ne donne jamais le nom, surtout pas son 100e, caché aux humains inférieurs.
Mais si l'on se demande pourquoi l'Etat a donc mis autant de temps à introduire la téléphonie portable, la 3G et la 4G bien après la plupart des pays africains, aujourd'hui que l'on parle d'un remaniement et que la guerre de la présidentielle est déclarée, les responsables sont accrochés au téléphone en attendant les ordres, tout en sachant paradoxalement que le Président ne parle plus.
Ce qui pose une question, s'il ne dit plus rien, qui est alors ce personnage qui donne ces coups de téléphone ' D'après un expert contacté (au téléphone), il s'agirait d'un hacker qui a piraté les lignes et s'amuse à limoger, donner des ordres et des contre-ordres. Ce qui expliquerait cette énorme confusion dans les structures de l'Etat, qui avalise un coup d'Etat en rappelant que l'Etat c'est lui.