Algérie - Revue de Presse

De nombreuses raisons sont évoquées devant la multiplication des accidents de la route. Pour les comprendre, il suffit de voyager en voiture sur une longue distance et observer ce qui se passe. Mais avant tout, il y a lieu de s'interroger sur la représentation que se fait l'Algérien du véhicule, de la route, du déplacement et de l'Etat. Le fétichisme de la voiture devenu suicidaire par cet envoûtement de la vitesse qu'elle procure, particulièrement chez les jeunes, se transforme en couloir de la mort, endeuillant les familles, laissant des traces de traumatismes irréversibles. La voiture est devenue un objet d'affirmation sociale, une sorte de rapport de force au rôle flou dont se saisit l'inconscient pour meubler des vides qui sont à rechercher dans un mode de vie incohérent, aussi bien avec la modernité qu'avec la tradition. Dans une société qui se recherche ou dont l'évolution a été perturbée par des changements sociopolitiques brutaux, passant du socialisme au libéralisme et qui n'a en fait connu ni l'un ni encore moins l'autre sérieusement, il n'est pas étonnant que des dégâts surviennent. D'autre part, la route est devenue un espace d'expression de la force et il est aisé de constater comment de gros camions, de grands autobus se lancent à l'assaut du temps sur une chaussée impropre à la circulation. Le retard accusé dans la construction des autoroutes se fait payer très cher, maintenant que les portes du crédit se sont ouvertes et que l'urgence est là. Quant à la circulation dans les centres urbains, source de stress et de violence au quotidien, la loi du plus fort prime et même les agents de l'ordre n'arrivent plus à faire respecter le plus élémentaire des codes, le code de la route. Comment s'en sortir alors que le défilé vers les cimetières rappelle les effets d'une guerre en temps de paix ? Des jeunes et des moins jeunes meurent chaque jour, victimes de cette situation. Les jeunes, victimes de leur fausse représentation ou d'un faux rêve et du transfert sur leurs personnes de parents inconscients voulant faire d'eux des adultes avant l'âge, en un infantilisme dont la seule garantie est qu'ils exposent leurs enfants au danger de mort. L'Etat enfin, qui doit réguler, protéger, empêcher le pire et proposer un rêve social digne d'une nation, se retrouve à comptabiliser l'aboutissement de la catastrophe. Ce ne sont plus les « campagnes de sensibilisation » à coups de prospectus et d'images de télévision porteuses de l'horreur, qui suffiront à diminuer les risques. Ce ne sont pas les barrages de gendarmerie reconnaissables par les conducteurs à distance et devant lesquels on ralentit par peur du retrait du permis de conduire, qui suffiront à réduire les accidents. La réduction des accidents consiste à faire de la voiture un moyen de facilitation de la vie, et non plus un cercueil ouvert en permanence. Elle consiste à offrir d'autres rêves moins suicidaires, moins meurtriers que la voiture. Est-il encore temps ?
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