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Baisse des recettes pétrolières, scandales de corruption, dévaluation du dinar...



Baisse des recettes pétrolières, scandales de corruption, dévaluation du dinar...
Dans moins d'une semaine, Abdelaziz Bouteflika bouclera sa première année de son quatrième mandat présidentiel. Il peut-être un peu tôt de dresser le bilan de cette période, mais il y a des indices qui ne trompent pas. Et pour cause, depuis la quatrième investiture de Bouteflika, les clignotants sont au rouge.Si durant les premiers mandats les prix du baril ont connu une ascensioneffrénée pour dépasser les 100 dollars en 2008 et poursuivre la hausse jusqu'en 2013, la tendance s'est inversée en 2014. Un ingrédient loin de jouer en faveur du quatrième mandat de Bouteflika, lequel a enchaîné au cours de ses premières années de règne les dépenses, faisant de l'Algérie un grand chantier à ciel ouvert. Ainsi, après avoir largement profité de la rente pour financer les importations, acheter la paix sociale via les subventions, lancer des projets d'infrastructures publiques et améliorer les indicateurs du développement humain, Abdelaziz Bouteflika, déjà affaibli par la maladie et fragilisé par une administration bureaucrate, a entamé son quatrième mandat avec des indices guère rassurants.Entre les affaires de corruption, les retards de livraison de bon nombre de projets issus des précédents quinquennats, les surcoûts, l'explosion de la facture des importations, la dégringolade du dinar, les attentes de relance de l'investissement productif, la stratégie de neutralisation du patronat et le débat houleux sur le gaz de schiste, la situation n'est guère reluisante. Elle résume globalement l'absence d'une vision à long terme.Exemples : l'agriculture, en dépit des résultats encourageants, n'arrive toujours pas à infléchir les importations des produits agricoles ; des chantiers entiers de logements attendent d'être livrés, à l'image du programme de logements de l'AADL de 2001 qui n'a pas été réalisé totalement 15 ans après son lancement. Aussi, l'emploi continue encore à être financé sur la base des transferts budgétaires toujours croissants, alors le privé contribue faiblement à la résorption du chômage.«Le replâtrage du secteur public ne fait que perpétuer la situation»Il a fallu que le marché pétrolier s'effondre pour que la vulnérabilité de l'économie nationale soit de nouveau mise à nu. Mais surtout pour que l'absence d'une stratégie et d'une vision de développement à long terme soient confirmées. Cette conjoncture a brouillé les cartes du staff dirigeant. D'où, d'ailleurs, l'effervescence au sein de l'équipe de Sellal dès les premiers signes de l'effondrement du marché pétrolier. Si au début de l'épisode baissier des prix du pétrole les ministres multipliaient les assurances, par la suite l'Exécutif a enchaîné les réunions pour tenter de trouver des solutions à la crise.Comme première conséquence, le chef de l'Etat s'est retrouvé contraint de renoncer à certaines de ses promesses faites lors de la campagne électorale et de reporter certains projets faute de proposer d'autres solutions face à l'amenuisement des ressources pétrolières. Avec 60 milliards de dollars d'importations entre produits et services, la 13e année de Bouteflika à la tête de l'Etat n'a pas été celle de la transition d'une économie de la rente à celle de la production.Ce qui fait que les effets de la crise pétrolière se font déjà ressentir.«L'année 2014 a été une année difficile pour tout le monde, même s'il y a des pays qui s'en sortent mieux que d'autres, car plus organisés et leurs économies sont plus équilibrées, notamment le plus grand d'entre eux, les USA. Mais la crise persiste pour un grand nombre de pays et le nôtre ne fait pas exception. L'Algérie ne vit pas en vase clos, le pays subit en partie les impacts négatifs de cette situation globale de crise.»C'est à travers cette déclaration que l'expert financier, Mohamed Ghernaout, résume la situation. Pour ce dernier, dans un pays mono-exportateur comme l'Algérie, «il y a très peu de choses à faire». «Il suffit que les prix des hydrocarbures chutent ? et en conséquence les revenus qui leur sont liés ? pour que le reste des secteurs de l'économie tombe comme un château de cartes : les soldes de la balance des paiements et les réserves de change chutent, les revenus fiscaux à travers la fiscalité pétrolière baissent, les importations de biens de consommation d'intrants et d'investissements suivent, provoquant une augmentation des prix et donc de l'inflation pour les premiers, et une baisse de la production industrielle pour les seconds et un accroissement du chômage pour les troisièmes, le tout engendrant une chute du PIB», expliquera notre expert. Pourquoi une telle situation 'En réponse à cette question, M. Gharnaout dira : «Nos gouvernants n'ont jamais retenu la leçon, ce sont des mauvais élèves comme disait le générale Giap, qui était pourtant un ami de notre pays. Son pays, le Vietnam, a bien retenu la leçon puisqu'il a entamé des réformes au moment opportun et il se porte bien.»Or, l'Algérie n'a pas terminé ses réformes. «Le replâtrage que le gouvernement propose en direction du secteur public ne fera que perpétuer la situation», avertit dans ce cadre M. Gharanout qui récapitulera en guise de conclusion : «C'est comme si vous aviez un malade qui nécessite une opération chirurgicale ; un coup de bistouri, et vous le mettez en lieu en place de cette thérapie sous sérum et vous l'oubliez.»Députés FLN et RND : «une année riche en réalisations»Du côté des députés, notamment ceux proches du cercle présidentiel, les avis sont tout à fait différents. A ce niveau, l'on estime globalement que les résultats sont satisfaisants. Ahmed Saadani, député du Front de libération nationale (FLN) et président de la commission des affaires économiques, du développement, de l'industie, du commerce et de la planification juge la situation tout à fait positive pour une première année d'un quatrième mandat.«C'est un début, les promesses tenues commencent à être concrétisées dans le cadre des lois allant dans le sens de la diversification de l'économie notamment», dira-t-il avant d'enchaîner : «Nous assistons à une dynamique.C'est une année riche en réalisations en dépit de la conjoncture régionale et internationale. Le code des investissements est en cours d'étude. Il y a aussi des mesures pour maîtriser les importations et regrouper des sociétés publiques.Ce qui va relancer le tissu public. Ce qui est en fait une période de semences.» Concernant le débat sur le gaz de schiste, «nous sommes en phase d'exploration, cela fait partie des promesses. On travaille pour les futures générations», précisera M. Saadani.Torche Toufik, du même parti, abonde dans le même sens : «Les projets sont clairs en dépit de la chute des prix du pétrole, tous les projets sont en cours de lancement. Tout est normal et les nouvelles lois vont encadrer l'ensemble de ces projets», avancera ce parlementaire, qui rejoint l'avis de Mahdjoub Bedda, du FLN.«Cette première année du quatrième mandat s'est caractérisée par la volonté des pouvoirs publics de réadapter le climat des affaires et des investissements avec les amendements du code des investissements, avec comme point de mire le maintien de la régle des 51-49%. Elle a également connu une tendance vers la renationalisation de certaines entreprises et une politique coûteuse pour l'Etat avec le rachat d'une part des actifs du complexe El Hadjar ArcelorMittal et le rachat également de Djezzy, l'opérateur de téléphonie Vimpelcom», constatera M. Bedda.Ce dernier relèvera toutefois un développement manifeste des scandales de corruption liés à certains grands projets, notamment l'autoroute Est-Ouest et ceux relatifs aux contrats de Sonatrach. Pour sa part, Mme Ourida Larfi, membre de la commission Finances et budget à l'APN, du Rassemblement national démocratique (RND), évoque une conjoncture financière difficile avec des risques de déséquilibre budgétaire, et juge nécessaire de revoir certains projets, notamment ceux qui n'ont pas encore été lancés.Cependant, estime-t-elle, la situation n'a pas empêché l'avancement des chantiers au niveau local.C'est le cas à Tizi Ouzou qu'elle représente. «Malgré les blocages, un travail important a été réalisé à Tizi Ouzou. Il y a les logements ruraux, l'alimentation en gaz naturel, l'avancement du projet du nouveau CHU et du stade de Tizi Ouzou», illustrera-t-elle. Safi Larabi, de la même formation politique, préfère évoquer le rôle de l'Algérie à l'échelle régionale.«C'est une année de grande réussite sur le plan diplomatique avec le règlement politique de la crise malienne. L'Algérie est devenue incontournable pour beaucoup de pays qui viennent la consulter sur la question de la lutte antiterroriste et aussi sur comment faire face à la chute des cours pétroliers.Même si on a été affectés par la baisse des cours du pétrole, les grands chantiers sont toujours ouverts, les transferts sociaux sont maintenus, ainsi que les subventions», tiendra-t-il à préciser, contrairement à Hamlaoui Akouchi, du parti El Islah.Pour ce parlementaire, «l'année qui s'écoule est la pire de l'ère Bouteflika, étant marquée par une baisse du prix du pétrole. Avec l'embellie des années précédentes, l'Etat avait l'habitude d'acheter la paix sociale. Mais, présentement, il ne s'occupe plus des préoccupations quotidiennes du citoyen. Le dinar s'engouffre dans la chute, la corruption gangrène le pays, le pouvoir et l'opposition sont en pleine bataille», notera-t-il avant de conclure : «C'est une période maussade pour le pays.»


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