Algérie

B comme Abdou


L'enfant de Barika s'est éteint dans sa ville adoptive, Alger, où il a vécu comme il a voulu jusqu'à son dernier souffle. Cet espace qui lui était réservé tous les samedis sera aussi orphelin que les enfants de Abdou, que ses amis et tous ceux qui l'ont connu comme journaliste, chroniqueur ou directeur général de l'ENTV qui, sous sa direction, a été d'un professionnalisme exemplaire avant même les chaînes satellitaires arabes qui ont, hélas, dépassé de loin l'Unique et tous ses clones. Certains diront que le contexte était favorable à la période où Abdou était à la tête de la télévision algérienne. Cependant, et au-delà du contenu politique, l'Unique a reculé même en termes de qualité esthétique et de moyens technologiques. Même un spectacle de musique est mal mis en image, en valeur, alors que les effets spéciaux et les techniques de mise en scène ont tellement évolué que l'ENTV paraît aujourd'hui archaïque et obsolète. Abdou a toujours rêvé de l'ouverture du champ médiatique tout comme le champ politique et l'élargissement des espaces de libertés individuelles et collectives. Abdou est parti assez tôt pour rater les lendemains prometteurs qui pourraient présider à l'avènement d'une Algérie plus moderne, plus ouverte, où la concurrence entre différentes chaînes de télévision nationales est de nature à remettre sur les rails un secteur stratégique délaissé et non compétitif. Abdou a aussi rêvé d'un système démocratique, où la compétition politique serait saine, honnête, sans interférence d'aucune partie administrative, militaire ou d'intérêt économique non concernée par les élections et par le droit du citoyen d'élire qui il veut à n'importe quelle institution de la République, de la commune à la présidence. 2012 sera-t-elle cette année où
l'APN jouira de toute sa légitimité que personne ne contestera ' C'est à la veille de cette année charnière que le c'ur de Abdou, rempli de cette Algérie dont il rêvait, a décidé de s'arrêter de battre. Dans cet espace qu'est «Au fil des jours», Abdou a toujours écrit ce qu'il pensait, a toujours exprimé ses convictions, a toujours disserté sur ce qui le préoccupait. Ce qui le préoccupait le plus, c'était son Algérie qu'il voulait libre et modèle de démocratie parce que, disait-il : «L'Algérie a les moyens d'être le pays pivot et le pays phare dans le Monde arabe et en Afrique.» Il était citoyen du monde, ouvert sur toutes les cultures, mais il était pétri dans cette glaise d'Algérie, ce qui explique ses rêves démesurés pour le pays qui l'a vu naître et l'a vu mourir. A 67 ans, Abdou était pourtant l'une des mémoires de la presse et de la culture algériennes. Il pouvait encore donner plus à ces deux secteurs qu'il affectionnait tant, si son c'ur n'avait pas lâché prise alors qu'il assistait aux assises nationales sur les perspectives du développement local. Il a sillonné l'Algérie en compagnie des membres du Cnes. Il a mis le doigt sur des réalités qu'il connaissait déjà. Il en parlait avec passion comme si ce périple à travers le pays était une façon de faire ses adieux à son Algérie dont le destin pesait lourd sur son c'ur fragile.
A. G.
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