Algérie

Ah, ce droit de garde!




Abdenour Amrani, le président de la première chambre correctionnelle d' Alger était plutôt joyeux en ces jours de fête des deux Aïds. Mercredi, la salle d'audience n'affichait pas complet car les jeûneurs semblent encore assommés 54 jours après le départ «en congé de Sidna Ramadhane».Kamel Sidi Moussa et Zahia Gazem, les deux conseillers ont retrouvé de jolies couleurs après le Ramadhan et la joie de travailler avec le discret Yessaâd, le procureur général de l'audience qui n'aura pas à intervenir ce jour -là car honnêtement, il n'y avait pas de quoi fouetter un chaton, du fait même de l' absence des ténors du barreau d'Alger qui voient le congé se prolonger surtout que les week-ends sont vite au rendez-vous! L'Aïd et les vendredi et samedi, cela fait un peu trop pour le boulot!
L'affaire qui a retenu l'attention vers les 14 heures 10mn mettait aux prises un couple brisé qui s'est présenté à la barre pour une triste histoire de non-représentation d'enfants à la mère frustrée de ne pas bénéficier du droit de visite qui est en soi un acte indigne quel que soit le motif.
D'abord, il n'y avait qu'à voir la tête que les anciens amoureux faisaient pour comprendre de suite que la rancoeur était la maîtresse des lieux! Madame regardait à gauche, du côté de Yessaâd, le parquetier et monsieur lorgnait la greffière, du côté opposé!
Le juge, lui, promenait son regard sur toute la surface de la vaste salle d'audience clairsemée, car à cette heure-là le match Maroc-Portugal se déroulait et pour rien au monde les mordus de foot ne voulaient rater une telle rencontre!
Omar H. et Yamina L. ont fait des enfants sans savoir qu'ils allaient en faire des victimes de la haine et du mépris de l'Autre.
Les deux avocats sont là, attentifs et surtout vigilants à ce qui se dit, souvent dans le n'importe quoi! Ils sont à côté de la casserole de lait sur le feu, et à la moindre alerte, ils sont prêts à toute éventualité pour tenter de sauver ce qui peut l'être. Le couple désagrégé ne parle qu'à demi-mot et selon sa manière de faire, Amrani qui a fait ses armes sous la houlette de son aîné Boualem Bekri actuellement faisant les beaux jours à la cour de Tiaret, aime plutôt que les parties en présence répondent surtout aux questions de la composition correctionnelle! Les règlements de comptes et autres coups sous la ceinture peuvent attendre! Pour l'heure, il est question de non-présentation d'enfants à la maman qui n'a que la justice à qui s'adresser et régler le conflit car c'en est un, et un gros!
L'article 327 du Code pénal dispose que: «Quiconque, étant chargé de la garde d'un enfant, ne le représente point aux personnes qui ont le droit de le réclamer, est puni de l'emprisonnement de deux à cinq ans.»
Heureusement que le parquetier de permanence qui a pris le soin de choisir cet article, aurait pu noter le suivant qui est moins incisif que le 327, car l'article 328 est lui aussi plus frappant que le précédent. L'ex-épouse faisait une de ces têtes, on ne vous dit pas, mais alors pas du tout. Vous imaginez la tronche de madame à la barre, surtout lorsque l'ex-mari parle, vous vous demandez alors sur place qu'est-ce qui a bien pu rassembler ce couple qui vraiment n'a rien à voir l'un avec l'autre: physiquement, d'abord; psychologiquement ensuite, car on se pose des questions sur le comment cet ex-couple a bien pu vivre ensemble huit années avant de se séparer et avec pertes et fracas, alors que le plus simple aurait été de se dire adieu sans encombre en pensant d'abord aux enfants, à leur avenir, et non à passer le plus clair de son temps entre le bureau sombre du parquet et le cabinet de l'avocat et chercher noise au conjoint, histoire de l'embêter et de lui rendre la vie insupportable!
Entre-temps, le président voulait se débarrasser au plus vite de ces deux êtres venus à la cour régler leurs comptes. O.K. Mais pas au détriment des gens qui attendent que justice leur soit rendue, car eux aussi veulent rentrer chez eux pour leurs affaires quotidiennes.
Rien que pour cela, Amrani, en bon juge près de ses devoirs, rappelle au couple brisé, la célérité dans les réponses, qui doit prévaloir dans cette salle d'audience afin que chacun saisisse sa chance
d'obtenir satisfaction.
Et pour mieux aller vite vers un dénouement rapide de cette triste affaire qui prend les deux tiers des rôles des magistrats du siège, le président pose alors la fameuse question qui allait enfin de permettre aux deux parties de vider leur gibecière de ce qui les encombrait:
«Mais, bon sang, pourquoi en être arrivé là' Vous ne pouviez pas vous voir avec vos conseils et régler ce problème en gens civilisés' Nous sommes tout de même en 2018 et fin juin!», éclate presque le magistrat que suivent religieusement Kamel Sidi Moussa et Zahia Gazem les deux conseillers prêts à le secourir à la moindre embûche. Mais Amrani, le président reste de marbre, car même s'il va de temps en temps vers une eng..., c'est juste pour démontrer à ceux qui veulent la jouer, qu'il reste le même quelle que soit la situation. Sur cette image, le juge annonce la mise en examen de l'affaire sous huitaine, et lève l'audience pour cinq minutes.





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