Alger - Revue de Presse

Oranitudes


Critique culturelle ou brosse à reluire ? Une certaine habitude, fâcheuse, installée (surtout) dans la presse, consiste à encenser à peu près tout ce qui est donné à cette dernière de voir comme production ou manifestation culturelle. Avec d’ailleurs un jargon répétitif que l’on retrouve d’un écrit à un autre. Nous avons tous applaudi, sans distinction, à ce qui a pu se créer ou s’organiser, sur le plan culturel, durant la décennie noire parce que, en ce temps-là, cela relevait du courage de contribuer à maintenir une société debout. Des artistes ont payé de leur vie. On ne le dira jamais assez. Aujourd’hui, cela n’est plus de mise et il faut être soit naïf, soit complaisant, pour fermer les yeux sur le fort pourcentage de médiocrité que comporte la création culturelle, ces dernières années. Et sur la perversion des mœurs introduite par l’argent. A l’image du reste de la société. Pour ces raisons -et sans rentrer dans les détails-, il est navrant de voir des journalistes se transformer en distributeurs d’éloges, à tout va, et en attachés de presse ou agents publicitaires, déguisés. Lorsqu’ils ne fonctionnent pas au copinage et à la solidarité de confrères. On a vu des journalistes se faire mousser dans leur propre journal, lorsqu’ils se mettent à passer à la création artistique. Le pire est que tout le monde le sait et ferme les yeux sur ce qui est une corruption de la profession et, si on veut pousser le bouchon plus loin, une insulte à la mémoire des journalistes qui ont laissé leur vie pour ce métier. Ainsi que celle des grands hommes qui ont voué la leur à l’âme de ce pays: Kateb Yacine, Mohamed Dib, Jean Sénac, Alloula, Kaki, Mimouni, Djaout, et tant d’autres. Comment appeler ce phénomène? Une omerta? C’est, en tous cas, faire peu de cas pour le lecteur crédule et la cause de la culture en Algérie. Alors, on comprendra que, si on a fait vœu de faire dans la critique culturelle et non dans la brosse à reluire, on se sent bien à ramer à contre-courant. Tant pis, c’est à ce prix-là que l’on peut contribuer à réhabiliter le journalisme culturel. Et le journalisme tout court qui a besoin d’un bon coup de balai. Rappelons que l’une des missions premières de cette profession n’est pas de faire dans l’encensement mais de mettre le doigt sur ce qui ne va pas. C’est ainsi qu’on éclaire l’opinion publique et qu’on enrichit la culture de son pays.   Brahim Hadj Slimane
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